Télévision, enfant et publicité
Chaque année 7 millions d’enfants âgés de 2 à 10 ans ingurgitent 36 000 spots de pub télé.

Ségolène Royal avait émis le vœu, alors ministre de la famille, de suivre l’exemple de la Suède et d’interdire toute publicité télé concernant les programmes pour enfants, ce qui avait provoqué un véritable débat national. Il est vrai que, dotés d’un important pouvoir de prescription, les enfants ont souvent le dernier mot sur la décision d’achat de nombreux produits, et parfois sur les plus inattendus. Ainsi, de l’aveu même du directeur marketing de Renault, 3% des achats de la voiture Kangoo auraient été réalisés « par des parents voulant faire plaisir à leurs enfants » !
Pourtant, les publicités de Kangoo ne passaient pas pendant les programmes pour enfants. Cet exemple illustre bien le véritable amalgame qu’il existe entre télévision et publicité. L’incitation à l’achat est dans tous les programmes : les spots publicitaires bien sûr, mais aussi les clips aux chanteurs sponsorisés, les émissions de plateau où l’on vient vendre du livre, du film, du gadget... Les enfants maîtrisent dès le plus jeune âge la télécommande. Le débat sur l’effet de la publicité au sein des programmes pour enfants cache en réalité un autre débat, plus préoccupant. Si l’on en croit une étude TNS-Sécodip commandée par Canal J, les 2-4 ans regardent la télévision en moyenne neuf heures par semaine, et les 5-7 ans, onze heures. Ils savent très jeunes déceler la différence entre programme et publicité. Pourtant, par la force de son impact et par son pouvoir d’influence, l’effet publicité peut créer de véritables tensions entre parents et enfants ; frustration d’un côté pour tel objet qu’a le copain et que les parents refusent d’acheter, et mauvaise conscience du côté des parents, de ne pas faire plaisir.
Souvenez vous de l’effet Pokemon et des spots publicitaires de produits dérivés placés justes après ladite série. Combien de parents ont parcouru les bureaux de tabac à la recherche de vignettes vendues à des prix fous. Lorsqu’on sait que 84 % des programmes pour enfants sont financés par la publicité, on voit vite le chien qui se mord la queue : la consommation finance la publicité qui finance des programmes qui facilitent une audience enfant concentrée qui permet la publicité ciblée qui crée la consommation, etc. Sous l’effet d’un rapport concocté par le Collectif enfant-média, un projet de loi devait être présenté au Parlement en 2002. Mais le gouvernement avait préféré le remettre après les élections. En 2006, le débat n’est toujours pas réouvert. Le collectif entend bien reprendre ce projet, qui n’irait pas jusqu’à la suppression pure et simple de la publicité à destination des enfants. La publicité serait cependant placée avant et après les programmes, et non plus à l’intérieur des émissions. Le deuxième volet de ce plan, appelé « Education à la publicité », viserait à former l’esprit critique des enfants grâce à de véritables cours dispensés dans le cadre scolaire dès le CP. A quand des cours pour inciter à regarder moins et mieux la télévision ?
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