Umut-Talha et les parangons de bioéthique
La conception in vitro d’un “bébé-médicament” (quelle horreur cette expression !) suscite évidemment la réprobation des défenseurs de la morale chrétienne, fiers parangons de bioéthique, pour qui cette démarche est “indigne de l’homme”, selon les propos de Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes et président du groupe de travail épiscopal sur la bioéthique.
Plus grave : pour Mgr André Vingt-Trois, cardinal et président de la Conférence des évêques de France, l’enfant ainsi conçu n’est qu’un instrument thérapeutique. Le prélat n’hésite pas à utiliser un raccourci saisissant : “Cela signifie qu’on va utiliser quelqu’un au service exclusif de quelqu’un d’autre et que cet enfant est un instrument pour tenter de guérir un autre enfant”.
La pasionaria des catholiques conservateurs français, l’ex-ministre et ex-député Christine Boutin, présidente du parti chrétien-démocrate (PCD), s’indigne, lance un vibrant cri d’alarme et en appelle à Nicolas Sarkozy que l’on met décidément à toutes les sauces : “On a franchi un pas excessivement grave. Avec un tel progrès, l’homme devient un objet de consommation et un matériau”. Rien de moins !
Pardonnez-moi, mais c’est vraiment n’importe quoi, surtout que c’est dit de manière tellement dogmatique et sans nuance.
Je remarque que les critiques qui font l’actualité dans la presse et les médias, outre les déclarations incendiaires de la bouillante Boutin, proviennent de hauts responsables de l’Eglise catholique. Je n’entends rien du côté des Protestants ni des Orthodoxes, ni des autorités de l’islam et du judaïsme. C’est tout de même un signe. Ces confessions seraient-elles plus ouvertes aux progrès de la science ? A chacun de juger.
La bioéthique est une matière délicate qu’il faut prendre très au sérieux et la France, comme ses voisins de l’UE, prend évidemment la bioéthique très au sérieux. La technique d’implantation d’embryons sélectionnés est appliquée depuis plusieurs années aux Etats-Unis mais aussi en Belgique (2005) et en Espagne (2006), trois pays qui n’ont certes pas à rougir de leur rigueur en matière médicale.
Les règles d’application, instaurées par la loi française de 2004 et contrôlées par l’Agence de la biomédecine, sont contraignantes, ce qui limite les cas. Ce n’est donc pas une ‘industrie’ au même titre que la simple fécondation in vitro. Il faut que l’enfant soit désiré en tant que tel par les parents et que la finalité thérapeutique ne prime pas sur ce désir parental. On ne peut décider de concevoir un enfant uniquement pour sauver une autre vie, un enfant qui ne serait qu’un « bébé-instrument » fait sur mesure. C’est très clair et le corps médical y veille. Que vouloir de plus ?
Comme l’a déclaré très justement le professeur René Frydman, à l’origine de la naissance d’Umut-Talha, il faut sortir des dogmes et regarder la vie.
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