Un chemin tout tracé
L'inexorable dégradation des consciences.
Depuis que nous crions au loup, il finit par poindre le bout de sa face hideuse. Il a pris garde de se donner belle allure canine, le sourire cachant la bave qui ne saurait tarder, une fois que la victoire sera consommée. Il ne sera alors plus question de montrer patte blanche et humour docile, les fauves seront lâchés pour la chasse aux sorcières, aux tendres bergères et aux moutons noirs.
Mais plutôt que de blâmer ceux qui croient bien naïvement que devant l'incurable faillite des autres clans, il n'est plus qu'à espérer en des lendemains qui chantent au pas de l'oie pour que tout aille mieux, il convient en tout premier lieu de condamner ceux qui ont fait de la politique une mascarade, une pétaudière, une profession à l'exclusion de toutes les autres.
Non seulement depuis quarante ans, ils n'ont cessé de nous mettre le nez dans la farine, de nous leurrer et de nous mentir sans jamais oublier de se servir. Ils ont dénaturé la représentation nationale, n'y offrant de place qu'à une seule classe sociale, coupée du monde rural, des zones périphériques, du monde des ouvriers et des déshérités.
De plus, ils n'ont eu de cesse de transformer le peuple en masse docile, bêlante, prompte à marcher dans leur vaste opération d'abrutissement des foules. Tout a été entrepris pour réduire à néant la culture pour laisser place à un rouleau compresseur de la distraction qui ne donne jamais à réfléchir. La télévision fut à ce titre le plus parfait exemple de la course effrénée vers la médiocrité la plus éclatante.
La gaudriole, la franche rigolade, l'humour à deux balles, le mépris des humbles, la dérision et la moquerie ont supplanté le trait d'esprit, l'humour subtil, la critique grinçante des travers de la société. La musique a découvert qu’assommer de basses fracassantes les cerveaux tout en imposant un rythme syncopé permettait de mener les foules à la transe sans jamais leur nourrir l'imaginaire. Les décibels faisant le reste pour empêcher toute communication pour ceux qu'on entend réduire à l'état de robots décérébrés.
Les grandes municipalités se sont chargés d'ouvrir de grandes salles pour le conditionnement des masses tout en fermant la porte et les subventions aux défricheurs, aux poètes, aux véritables créateurs. L'art est devenu un espace de spéculation pour lequel le discours supplante le message, le prix devenant la seule référence acceptable.
Les collectivités territoriales ont enfoncé le clou organisant des festivals où le nom, l'image, la réputation remplacent la qualité, le message et la véritable création. Il suffit de donner au peuple ce qu'ils ont appris à aimer à grand coup de matraquage pour le détourner de ce qui pourrait l’amener à penser. Elles pensaient qu'ainsi il ne leur arriverait rien de fâcheux.
Pour aller jusqu'au bout de cette logique de la régression, de la décadence, l'école a été sacrifiée à l'autel d'une modernité factice qui n'avait d'autre but que de réduire les facultés d'indignation, de création, d'imagination, de récrimination au profit d'un nivellement par le bas systématique et d'une chasse impitoyable à l'originalité et à la différence. Les grilles n'évaluent rien et remplissent parfaitement la seule mission qu'elles ont toujours connu : enfermer.
Alors soudain, ils se réveillent en se disant que le fascisme est en train de prendre le pouvoir sans se rendre compte qu'ils en ont appliqué eux-mêmes toutes les recettes éculées mais toujours si efficaces : propagande d'État, mensonges, grandes cérémonies fastueuses, messes collectives, Commémorations en boucle, grande célébration des élites, colifichets et jeux.
Maintenant que vous avez fait des masses ces moutons sans culture, sans histoire, sans avenir, sans espoir, pourquoi espéreriez-vous qu'elles ne se jettent pas dans la gueule du loup, vous les chiens qui leur avez aboyé dessus sans jamais les considérer ni même les respecter. Vous avez consciencieusement préparé le terrain. De grâce, ne vous en indignez pas.
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