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Accueil du site > Actualités > Société > Une arme de déstabilisation méconnue : la rumeur

Une arme de déstabilisation méconnue : la rumeur

Un jour, il faudra bien considérer la rumeur pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un mode privilégié de la pensée sociale sachant que la pensée sociale repose sur la croyance et non sur la preuve. Alors, le management le plus pragmatique et le moins politiquement correct pourra aborder le sujet autrement que par la défensive.

La rumeur, outre un coût négligeable, est un outil extraordinaire en terme d'influence et simultanément elle est parfaitement incomprise et dénigrée.

La rumeur s'oppose aux tentatives d'influence qui reposent sur la persuasion, sur l'argumentation et qui font appel à la capacité de compréhension de l'interlocuteur. Globalement, cette approche est inopérante car les individus ne s'exposent qu’aux discours qu'ils ont bien envie d’entendre c'est-à-dire aux discours qui ne remettent pas en question : faites lire l'Humanité à un lecteur du Figaro et vous verrez ce lecteur vous dire que ce qu'il lit n'est pas la vérité. L'inverse est également vrai.

De plus, cette technique qui consiste à faire appel à la logique et au discernement d'un interlocuteur est particulièrement aléatoire car ces composants sont largement variables d'un individu à un autre. Ceci est préjudiciable à une bonne diffusion « rumorale ».

Entre le besoin de croyance et le besoin de vérité, le besoin de croyance domine simplement. Notre plus grand besoin est de croire et non pas de savoir. Ceci va à l'encontre du formatage que nous avons toujours reçu qui consiste à privilégier la vérité. Ce même formatage est applicable à la rumeur quand il s'agit de nous faire croire qu'elle est toujours fausse. Seulement voilà, si la rumeur peut nous induire en erreur elle peut également nous apprendre la vérité. C'est d'ailleurs pour ça qu'elle irrite… Car à ce moment, la rumeur devient moyen de sédition et un outil efficace de contrôle des individus dominants. Et ça, on n’aime pas…

D'ailleurs, introduire une notion de « vérité » dans la pensée sociale est un exercice stérile. Lorsque quelqu'un croit quelque chose, ce quelque chose devient vrai à ses yeux.

Le concept de vérité relève plus d'un cours de philosophie, voire même de théologie.

L'influence par la rumeur est beaucoup plus efficace car elle repose sur la volonté de croire. Chaque strate sociale véhicule avec elle un certain nombre de croyances dont elle ne peut se séparer. Peu importe le contenu de cette croyance, l'important étant d'y faire appel. Nous véhiculons tous un certain nombre de stéréotypes voire de préjugés sur à peu près tous les sujets. Par exemple, si une rumeur concernant un politicien est recherchée, en fonction du niveau socio-professionnel de l'auditoire, il faudra la considérer soit comme « tous pourris » soit comme « tous incompétents ». Intuitivement, on pressent que le politicien aura un peu de mal à gagner…

Ce système de croyances est à la base de toutes nos actions et de toutes nos décisions. Il représente le ciment de notre vie en commun. Faire appel à lui c’est faire appel à l'inconscient collectif du groupe. Une fois le système de croyances établi, il est dans la nature humaine de le défendre et accessoirement de l’imposer aux autres. Il devient alors quasiment impossible au groupe d’y renoncer et ce, même si la réalité dément brutalement cette croyance. L’individu en dissonance cognitive modifiera le réel plutôt que renoncer à ce qu’il croit. C'est la raison pour laquelle les rumeurs doivent s’ancrer dans le système de croyance. Une bonne rumeur trouve un écho dans l’existant social. C'est pourquoi la rumeur doit « dire quelque chose » à l'auditoire. La rumeur trop innovante, trop décalée par rapport à cet inconscient collectif à peu de chances de voir le jour. L'auditoire, face à la nouvelle, ira piocher dans le passé, des références qui légitiment la rumeur d'aujourd'hui. C’est là que le stéréotype prend toute sa force. L'individu est ainsi constitué, il aura tendance à conserver tout ce qui confirme le stéréotype et à évacuer le reste. Il auto-valide sa croyance !

La rumeur nous dit qu'un ministre de la santé aurait commandé 120 millions de vaccins antigrippaux pour faire face à une épidémie imminente. 3 cas de figures :

- Les soupçons de collusion avec le lobbying pharmaceutique apparaîtront (tous pourris),

- La grippe sera beaucoup moins virulente que prévue et le coût de l’exercice extravagant (tous incompétents),

- Si la virulence de la grippe est bien présente et si la commande n’a pas été faite aux laboratoires, les accusations d'incompétence seront également présentes.

On voit que le seul cas de figure dans lequel le ministre en sort indemne est celui où la grippe a bien lieu avec la virulence attendue et que les vaccins ont bien été commandés à temps. La marge est plutôt étroite…

Même si toutes les entreprises ne sont pas à égalité devant la rumeur, il n'en demeure pas moins que le champ d'application de cette arme de déstabilisation est pratiquement infini. Les sociétés impliquées dans des produits de forte proximité physique avec le consommateur sont plus sensibles que les autres à cette problématique. Au hit-parade annuel de la rumeur se trouve la gigantesque et inépuisable famille des alertes sanitaires. Dans nos choix « rumoraux », elle est à privilégier car largement couronnée de succès. L’entreprise dont le produit est protégé par un (pseudo) secret est fragile parmi les fragiles. Il va sans dire que si le produit peut menacer la santé et être secret… la tâche est simplifiée d’autant car nous basculons sans effort dans une autre grande famille de rumeur que l’on peut appeler « la théorie du complot ». D’ailleurs, à ce propos, nous pouvons voir en ce moment sur Youtube ou sur rue89, une rumeur selon laquelle le président Hollande serait sataniste… Oui, oui, vous pouvez vérifier. Mais attention, car intellectuellement, c’est du lourd, du très lourd…

 

Laurent Gaildraud

Auteur « Orchestrer la rumeur » - Eyrolles


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8 réactions à cet article    


  • Hermes Hermes 6 septembre 2012 14:29

    On s’autorise à penser dans les mileiux autorisés..... vous savez quoi ?

     smiley


    • Claude Courty Claudec 6 septembre 2012 16:07

      La rumeur : Une arme de déstabilisation méconnue.

      Méconnue ??? L’auteur plaisante ou quoi ?
      C’est une arme au contraire connue depuis toujours et qu’ont utilisé tous les pouvoirs, particulièrement ceux qui se réfèrent à la pensée marxiste et de manière plus générale, empreints d’idéologie totalitaire.
      La rumeur, comme le mensonge, la calomnie et autres figures du même acabit, sont en effet des procédés relevant de la dialectique marxiste-léniniste la plus pure.
      La rumeur est même devenue l’arme par excellence d’une opposition stérile, dans les complots qu’elle fomente faute d’être capable de mieux.
      L’exemple le plus récent a été celui mené pendant cinq ans à l’encontre d’un certain pouvoir.

      • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 6 septembre 2012 20:26

        Excellentes ces vidéos, ce Ouaimec, c’est mieux que Coluche !


        • moulins 6 septembre 2012 21:43

          d’accord concernant l’importance des rumeurs, tous ceux qui en ont déjà fait les frais peuvent facilement le confirmer. ce n’est donc pas un scoop.

          mais l’exemple est mal choisit. L’incompétence du ministère de la santé et la collusion de l’OMS avec les lobby pharmaceutique, ce n’est PAS une rumeur mais la triste réalité.


          • Bobby Bobby 7 septembre 2012 04:42

            Bonjour,

            Parler de rumeur et affirmer qu’elle est méconnue... me paraît peu vraisemblable.

            Un certain neveu de Sigmund Freud, un certain Bernays, a écrit tout un livre (« Propaganda ») sur les techniques qu’il a utilisé pour amener bien des gens là où il voulait... d’amener les femmes (américaines, puis les autres) à fumer...ou vendre des pianos, jusqu’à inciter à participer à la guerre (entre-autres) !

            La rumeur est l’un des leviers de la manipulation de masse !

            Alors...


            • Soi même Soi même 7 septembre 2012 09:18

              Un article bien ambigus sur une pratique bien détestable.
              Une arme méconnus ? si vous vous adressez à des enfants certes c’est une armes méconnus mais par pour les adultes qui le pratique à outrance ce n’est pas le cas même si il y en ignore son mon !
              Étrange mise en perspective entre la rumeur positive et la rumeur négative, pour justifier l’idée qu’il y a pas de fumée sans feux, pour justifié son bien fondé qu’elle est juste car elle contient une parcelle de vérité !
              En réalité la rumeur est l’arme absolue de celui qui n’existe pas à utilisé la faiblesse humaine pour arrivé à ses fins !
              C’est n’est rien d’autre qu’une calamité social et rare ceux qui en sorte entier !
              Car celui qui lance une rumeur, se garde bien d’apporté la preuve de ses dires et fait tous pour rester anonymes montre bien que en réalité le pendant de la médisance n’est pas un acte qui apporte une vérité, même si cela peut être vrai !

              < Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien, tandis que les autres croient savoir ce qu’ils ne savent pas.

              Citations de Socrate >


              • Denzo75018 7 septembre 2012 10:12

                La Rumeur : Une Arme de déstabilisation « Méconnue » !!!!

                Vous rigolez : Méconnue UNIQUEMENT de Vous !

                Parce qu’elle est bien connue et utilisée des Politiques, de Entreprises, etc. et depuis longtemps ....

                Sortez-donc de votre « grotte » !


                • ricoxy ricoxy 7 septembre 2012 11:33

                  Et vous connaissez l’ « Air de la calomnie » ? (Le Barbier de Séville)

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