Une rentrée scolaire sans professeurs qualifiés
Ce sacré Charlemagne ne doit pas être le seul à se retourner dans sa tombe ; les Hussards noirs de la République d’antan et leurs rivaux d’alors de la Sainte Église Apostolique et Romaine, du fin fond de l’au-delà, doivent assister, atterrés, à la mascarade de cette rentrée scolaire, soit l’ubérisation effective de ce qu’on nommait à leur époque glorieuse Instruction publique et dénommée depuis sous l’appellation d’« Éducation nationale ». Eduquer au vivre-ensemble, à la diversité, aux règles de vie que nombre de parents immatures ont oublié depuis des lustres. Eduquer, intégrer (dans quoi au juste ?), inclure plutôt que d'instruire : le choix des mots ne trompe pas. Quant au "national", il y a belle lurette que ce concept est mis de côté au profit du "mondialisme", plus en phase avec les intérêts des marchés financiers. Former des consommateurs sans identité ni morale, au service de l'enrichissement de quelques uns, plutôt que des citoyens éveillés et cultivés fatalement plus dangereux. Les philosophes chinois de l'antiquité ne déconseillaient-ils pas aux princes de ne pas trop instruire leurs sujets, qui risqueraient du coup d'être désobeissants ?
De quoi sidérer toutes ces générations de Français, qu’ils soient laïcards ou curaillons et qui, certes, s’affrontaient de leurs vivants avec une rare détermination, mais se rejoignaient néanmoins dans un but commun : tirer chaque enfant qui leur était confié vers le haut, vers l’excellence, vers le maximum que chacun d’eux pouvait atteindre. Et ce, de quelque origine sociale que soit l’élève. Enfants de pauvre ou enfants de riche, la discipline et l’enseignement étaient, pour l’immense majorité d’entre eux, appliqués et prodiguées de la même manière pour tous.
Et en classe, instituteurs et professeurs n’avaient de compte à rendre qu’à leur Institution ; ils n’avaient à craindre ni les parents, ni les grands frères, ni les élus locaux… et encore moins leurs élèves que l’idée de proférer à voix haute une insulte et encore moins d’esquisser un quelconque geste d’agressivité à leur encontre n’aurait effleurés. D'ailleurs la réponse aurait été immédiate et expéditive.
En l’an 2022, insultes, agressivité, violences sont devenues courantes dans la quasi-totalité désormais des établissements scolaires publics, parfois filmées, jusqu’à l’assassinat : celui de Samuel Paty, décapité peu après être sorti de son collège de Conflans-Sainte-Honorine, qui est encore un cas unique, mais pour combien de temps ? L’exemple ayant été donné, qui peut croire qu’ânonner « Plus jamais ça ! » empêchera la récidive des Fous d’Allah, tout comme l’eau bénite est sensée écarter le Malin ? Les témoignages édifiants de jeunes profs de banlieue sur l'endoctrinement de leurs élèves ne rassurent pas. Haineux en plus d'être violents, nourris autant par l'islamisme radical et le rap débile que certains cours d'Histoire-géo instrumentalisés sur le colonialisme, le racisme (à sens unique), le maréchal Pétain et autres passages douloureux de notre (longue) histoire, ils ont une image négative de la France qui conduit à la sédition et la délinquance. Coincés entre un public difficile, une hiérarchie rigide et peu courageuse, ainsi que des permanents syndicaux d'ultra-gauche qui ne les défendront pas, comment des diplômés pourraient-ils postuler pour devenir profs à moins d'être masochistes ?
Et donc crise des vocations et… pénurie d’enseignants : près de 4 000 postes sont à pourvoir pour qu’un « professeur (soit) devant chaque classe dans toutes les écoles de France », comme l’a promis le nouveau ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye. C'est pour le second degré (collège et lycée), et ce chiffre parait bien bas pour rapport au manque d'enseignants constaté sur le terrain. Dans le premier degré, 17% des postes (1 sur 6 environ) seraient vacants (!) Du jamais vu en France.
D’où, pour tenir une promesse faisandée, le recrutement de 3 000 enseignants contractuels, « titulaires a minima d’une licence (bac + 3), et (d’) un casier judiciaire vierge » qui recevront une « formation express de quelques jours » afin d’être en mesure (ou non !) de donner leurs premiers cours à la rentrée, jeudi 1er septembre, dans les collèges et les lycées. En quoi consistera cette formation ? Des cours de yoga, de self-défense ?
Cela rappelle fâcheusement ces bataillons de soldats à peine ou pas encore formés qu’on sacrifiait jadis en les envoyant précipitamment sur la ligne de Front faire rempart de leurs corps dans la seule perspective de ralentir une offensive ennemie. Au moins, l’État-major préparait-il alors une contre-offensive afin de ne pas rendre leur sacrifice totalement inutile.
Certes, nul esprit de « sacrifice » dans ce recrutement bas de gamme… et si l’on peut à juste titre penser que la plupart de ces contractuels, confrontés à la réalité de ces écuries scolaires d’Augias, baisseront rapidement les bras et prendront la poudre d’escampette à la première injure, la première menace, le premier symptôme de burn-out, qu’importe au sieur Pap Ndiaye qui aura tenu sa promesse faisandée, officialisé le gardiennage scolaire et institutionnalisé l’ubérisation du corps professoral.
Quant aux « enseignants contractuels » défaillants qui déserteront en cours ou en fin d’année scolaire, ils n’auront, que l’embarras du choix pour se reconvertir : chauffeurs de particuliers ou livreurs de fast-food ; l’esprit et les compétences sont les mêmes. A Paris, plutôt que d'opter pour un contrat de professeur d'école à 1500 euros bruts, ils pourront choisir de rejoindre le contingents des balayeurs et éboueurs, mieux payés, aux missions moins stressantes. On risque moins pour sa santé à passer la lance à eau sur les trottoirs de Belleville qu'à prendre en charge une classe de garnements hostiles et violents.
Les « soldats », aussi bas de gamme soient-ils, de Pap Ndiaye ne seront nullement les sacrifiés de cette rentrée scolaire ; ce seront les élèves qu’il est désormais plus juste de nommer les « gardés » de l’école publique. Instruction publique antan, Education nationale il y a peu et Garderie inclusive à présent. Jules Ferry, Charlemagne et les autres avaient pourtant d'autres ambitions pour notre jeunesse ; celles des hommes d'état. Un concept étranger à Pap Ndiaye et à ses mentors.
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