Alzheimer, cancer : Il ne faut pas plus d’argent mais beaucoup plus d’idées pour la recherche
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La maladie d’Alzheimer, le cancer, Parkinson, ces mots font peur, réveillant la crainte d’un mal incurable. Par-delà les souffrances endurées par les malades et leurs proches, ces pathologies interpellent la société dans un contexte idéologique moderne où par principe, la médecine doit progresser, comme le reste des techniques, et finir par solutionner les problèmes contemporains. Ce progressisme a fini par livrer son cortège d’illusions. L’époque où la science devait tout résoudre est révolue. Le plan Nixon diligenté contre le cancer n’a pas donné de résultats significatifs sur le plan thérapeutique. Des laboratoires se sont enrichis alors que les patients ont été mieux pris en charge mais l’issue est fatale pour la plupart des cancers. Telle est la loi du marché qui ne regarde pas la morale. Alzheimer entre dans le même schéma avec des profits réalisés sur le dos des patients. Après tout, on ne peut pas trop contester. Les gens sont en souffrance, il faut bien les prendre en charge et cela à un coût. Comme dans tous services ou industries, les cadres, les techniciens et les capitaux nécessaires au fonctionnement du système reçoivent des revenus. Comme dans toute activité, il existe des excès, des petits arrangements et autres escroqueries mais il faut bien s’en accommoder sinon, rien ne se ferait.
La prise en charge des malades représente un des deux volets indispensables au système de santé. L’autre étant la recherche scientifique, activité sans laquelle aucun traitement efficace ne sera trouvé, hormis les méthodes alternatives qui bien que décriées et boudées par les cliniciens peuvent avoir quelque intérêt et se prévaloir de réussites personnelles mais qu’on ne peut généraliser. La recherche clinique nécessite des protocoles rigoureux pour tester l’efficacité d’éventuels traitements. Il faut donc des moyens. Aussi pour la recherche de laboratoire avec un double objectif. Trouver les mécanismes et les facteurs impliqués dans ces pathologies incurables. Et ensuite deux options pratiques, la prévention et le traitement. Mais la recherche stagne malgré des tonnes de publications sur ces sujets. Le cancer et Alzheimer échappent à la compréhension des causes profondes.
Le monde de la recherche demande des moyens supplémentaires. On doit s’interroger néanmoins sur l’importance des financements dans la réussite des chercheurs et dans la production de découvertes majeures. Cette idée étant employée à dessein, en opposition aux découvertes que je désigne comme mineures : résultats conventionnels sur les mécanismes moléculaires, analyses génétiques, corrélations statistiques… Bref, la science qui avance à petits pas et qui pour les plus exigeants, fait carrément du surplace. La compréhension des pathologies, que ce soit Alzheimer ou le cancer, ne dépend pas d’une accumulation de données mécanistiques. Ce qu’il faut maintenant, ce sont des sauts conceptuels, des innovations théoriques et non plus des tonnes de résultats expérimentaux. Dans les médias, on peut lire que la recherche sur la maladie d’Alzheimer n’avance pas assez rapidement. C’est exact. En plus, l’utilisation des souris transgéniques comme modèle pose des problèmes, y compris dans les études sur le cancer. On a le sentiment que l’usage des souris constitue un modèle par défaut. A l’instar du marteau qu’un type utilise pour casser les noix en ignorant que dans la cave se trouve un casse-noix. Sur les sites dédiés à la recherche sur Alzheimer ou le cancer, on peut lire que la recherche est dynamique. Ce qui se comprend car les financements sont substantiels et les chercheurs sont affairés. Ce à quoi on peut répondre que l’important n’est pas de chercher mais de trouver.
Dans les années 2000, un vaccin contre Alzheimer a été testé, sans efficacité avec en plus pour quelques patients de graves complications. On peut penser que dans un processus de dégénérescence, l’effet d’une substance exogène et surtout d’un vaccin (agissant sur l’information immunitaire) risque d’aggraver le mal. Les traitements pharmacologiques sont efficaces surtout quand le fond physiologique du patient est solide. La correction thérapeutique étant secondée par la dynamique de santé du patient. C’est pour cette raison que dans le cas du cancer également, la chimiothérapie s’avère souvent inefficace car l’état physiologique est dégradé et que les molécules utilisées sont agressives pour l’organisme.
Les chercheurs continuent à chercher dans la même direction, se prévalant de quelques succès mais du côté des patients, on ne voit rien de tangible. Est-ce possible que les scientifiques puissent tromper l’opinion ? Pas vraiment, mais disons que les moyens justifient les fins et que la cause de la recherche se défend. Depuis des années, la thérapie génique ne progresse pas, les avancées sont pratiquement absentes en dépit des publications nombreuses et le Téléthon continue à lever des fonds grâce aux prestations médiatiques de quelques chercheurs venus présenter des bricolages expérimentaux très sophistiqués mais dont on sait par la suite qu’ils n’ont pas d’incidence sur la maladie. Ou très peu. Ainsi va le monde de la recherche qui cherche autant des choses scientifiques que des fonds financiers pour payer les techniciens et entretenir la machine technologique du laboratoire. Il est nécessaire à la société de faire fonctionner cette machine qui entretient les espérances, même si les esprits les plus lucides savent que cette recherche expérimentale intempestive ne permettra pas de tomber sur des innovations radicales et des ruptures thérapeutiques, sauf miracle du hasard. Cela arrive parfois. Mais le temps de Flemming et la pénicilline est révolu.
Mon avis sur la question n’engage que moi. Je suis certain que la recherche sur ces maladies incurables ne produira pas d’avancée thérapeutique ni théorique, à moins que des chercheurs atypiques et hors norme ne relèvent le défi. Il manque en effet des options théoriques pour avancer et ce n’est plus une question de moyens car pour financer les éventuels visionnaires de la biologie, il suffit d’un salaire et d’un modeste bureau avec quelques heures de secrétariat ainsi qu’une participation intelligente de chercheurs open ayant décidé de rompre avec les canons de la recherche conventionnelle. Ce ne sont que des propositions émanant d’un esprit qui a rompu avec les normes canoniques de la recherche médicale qui, il faut le reconnaître, est plus dans l’impasse que dans la réussite. Ce qu’on ne peut lui reprocher car les maladies incurables sont pour l’instant hors de portée des approches conventionnelles. A l’instar des phénomènes climatiques que l’humanité ne peut maîtriser et se doit de subir. Accepter les maladies incurables, c’est une option ancrée dans le stoïcisme et il n’y en a pas d’autres actuellement. Espérer un miracle fait vivre et c’est un pari pascalien qui mérite d’être considéré avec respect.
La certitude qui m’anime, c’est que sans une avancée théorique radicale les maladies incurables le resteront. En l’état actuel des recherches, il n’y a aucune espérance rationnement défendable dans le traitement des maladies incurables ce qui devrait inciter les chercheurs à oser toutes les voies théoriques possibles, sans qu’un succès ne soit nécessairement au bout de l’effort. Hélas, il n’y a pas de champ institué permettant à ces chercheurs de faire fonctionner leur imaginaire théorique. D’ailleurs, les meilleures revues scientifiques publient souvent des résultats sans intérêt. Il faudrait un élan dans le champ théorique avec des revues disposées à publier les hypothèses et les modèles alternatifs. Dans doute quelques revues existent mais elles ne sont pas appréciées si bien que les chercheurs préfèrent pour leur carrière s’en remettre aux revues prestigieuses et on ne va pas leur jeter la pierre. Chercher est un métier et sans un intéressement, personne ne l’exercerait sauf quelques puristes considérant la science comme un enjeu de civilisation.
Rendez-vous dans une dizaine d’années. Sauf miracle scientifique inattendu, le traitement des pathologies incurables n’aura que très peu progressé. Alzheimer et le cancer frappent au plus près de la vie conçue comme équilibre énergétique et informationnel. Si l’une est une pathologie de dégénérescence (neuronale) l’autre serait une pathologie de « sur-générescence », avec une prolifération intempestive de cellules qu’on peut considérer comme résultant d’un processus analogue à une spéciation ; des cellules cancérigènes qui échappent au contrôle systémique de l’information et du milieu physiologique organisé. Tandis que dans Alzheimer, les cellules se mettent à dysfonctionner. Deux mécanismes sont pressentis dans ce processus dégénératif. Les plaques amyloïdes qui s’accumulent à l’extérieur pour former des plaques pouvant induire la mort cellulaire (apoptose) du neurone. L’autre mécanisme fait intervenir la protéine tau qui participe à cet édifice macromoléculaire essentiel à la transmission par les axones, le microtubule. Cette protéine se détache lentement de la structure, elle est remplacée et l’autre est dégradée chez un sujet sain mais chez un patient Alzheimer, le processus s’emballe et les protéines tau s’accumulent dans le cytoplasme, ce qui entraîne l’apoptose. Ce qui pose problème, c’est que ce genre d’analyse ne paraît pas remonter aux causes profondes de la dégénérescence. Ce sont plutôt des effets, des conséquences moléculaires mesurables qui sont observées. Les quelques spécialités pharmaceutiques utilisées pour améliorer (et non pas guérir) la vie des patients ont été évaluées comme étant d’une efficacité faible. Quant au cancer, j’ai déjà donné mon avis sur l’usage inutile de la plupart des chimiothérapies. Impasse depuis vingt à quarante ans signifie impasse dans dix ans si la stratégie ne change pas.
Ces réflexions permettent de tracer la conjecture des stratégies en matière de recherche sur les maladies incurables. L’hypothèse d’une impasse actuelle étant plausible, je suggère d’aborder la question en contournant le « tout expérimental » pour une réflexion théorique sans direction préconçue, avec comme objectif une explication par des voies nouvelles des processus conduisant à ces maladies incurables. Pour qu’il n’y ait pas de confusion, je précise que l’idée est de pratiquer des voies théoriques alternatives sans abandonner les recherches expérimentales qui sont évidemment un instrument indispensable pour tester des hypothèses et trouver des mécanismes afin de nourrir la recherche théorique. Ce qui demande peu de moyens. Quelques scientifiques open, un bureau pour chacun, un accès à Internet, un peu de secrétariat et de quoi imprimer et écrire des documents… et si possible, quelques collaborations avec des informaticiens si l’outil est nécessaire. Il en faut peu pour développer des pistes théoriques originales. Ce qui fait défaut, c’est l’audace.
Mais l’audace ne peut contrecarrer les déterminismes biologiques si ils sont imparables. Seule la théorie et l’expérimentation peut savoir si c’est imparable ou s’il y a des options thérapeutiques. Peut-être un miracle, avec les nouvelles techniques utilisant les cellules souches et autres innovations contemporaines mécanistes. Un miracle est bien improbable mais l’essentiel est d’y croire. Les voies de traverse théorique que je n’ai fait qu’évoquer relèvent aussi du miracle. Pas facile à coincer, le mal physiologique, quand il s’empare des mécanismes naturels présidant à la santé. Que penser de ces processus ? Le cancer semble être du type entropie énergétique, autrement dit l’énergie qui devient intempestive et offensive en échappant à l’entropie organisation. Alzheimer semble relever d’un autre principe, celui du manque d’énergie qui fait défaut à l’expression des contenus mentaux (lien avec les phosphorylations des protéines taux). Ces suggestions n’apportent pas de solution mais si elles sont développées avec des modèles, elles peuvent améliorer la compréhension. Juste un pas en avant. En attendant d’autres pas. Comprendre c’est aller plus loin dans la vérité. Sans idées, modèles, théories, la science ne peut pas viser la vérité.
Une chose est certaine, si un miracle est possible, il faut le provoquer. C’est l’objectif imparti aux chercheurs, quelle que soit la voie choisie. En attendant, bon courage aux Alzheimer, au cancéreux et à leurs proches.
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