D’autres univers en collision avec le nôtre ?
Selon le modèle cosmologique le plus répandu, l'univers tel que nous le connaissons et dans lequel nous vivons a émergé en quelques fractions de seconde (seconde de notre temps actuel) sous la forme d'une structure presque infiniment petite, dense et chaude. Ce phénomène a été qualifié de Big Bang.
Jean-Paul Baquiast 15/12/2015
An image of the distribution of GRBs on the sky at a distance of 7 billion light years, centred on the newly discovered ring. The positions of the GRBs are marked by blue dots and the Milky Way is indicated for reference, running from left to right across the image. Credit : L. Balazs.
Très rapidement, après sa naissance c'est-à-dire après ce Big Bang, l'univers a subi un processus dit d'inflation qui l'a conduit aux dimensions telles que celles observées aujourd'hui. L'inflation pourrait se poursuivre durant de très longues durées jusqu'à la dissolution complète des structures matérielles de l'univers. Dans les phases finales, le temps se ralentirait sans cesse et l'espace perdrait toutes dimensions mesurables.
Le milieu original dont serait issu notre univers, composé de particules et de photons, serait ce que l'on nomme le vide quantique. Il s'agirait de particules virtuelles dites quantiques car, selon les hypothèses de la physique quantique, elles n'obéiraient pas aux lois de la physique einstenienne, autrement dit elles ne seraient pas caractérisées par des dimensions d'espace et de temps déterminées. Faute d'une échelle de temps et d'espace au sein de l'univers quantique, celui-ci ne pourrait pas être décrit en termes d'infini ou de fini, ni concernant l'espace ni concernant le temps.
Du vide quantique émergerait en permanence (si le terme peut s'appliquer à un univers dépourvu de temps), des particules matérielles, c'est-à-dire dotées, comme celles de notre univers, de propriétés d'espace et de temps. La plupart s'effondreraient ensuite pour retourner dans le vide quantique. Certaines pourraient rester matérielles, et subir des inflations qui les conduiraient à devenir des univers analogues au nôtre.
Concernant l'origine et l'histoire de notre univers, c'est l'observation du rayonnement dit fonds diffus cosmologique ou rayonnement fossile cosmologique (dit aussi CMB ou Cosmic Micro-ondes Background) par les satellites successifs dédiés à cette tâche, dont le dernier en date est le satellite européen Planck, qui en fournit des éléments permettant la modélisation des évènements. On trouve sur le site Planck 1) les principales conclusions aujourd'hui disponibles, formulées dans un langage accessible au grand public.
Selon un principe proposé par Copernic, dit principe cosmologique, et généralement admis depuis, l'univers devrait être homogène à grande échelle. Certes le rayonnement observé par Planck montre une grande variété de formes matérielles, amas de galaxies, galaxies, étoiles, filaments de poussière, sans mentionner l'hypothétique matière noire non observable directement. Mais à l'échelle suffisante, tout ceci devient homogène, du moins pour un regard superficiel. De même, une soupe composée de grumeaux de légumes se présente comme un liquide homogène vue à une distance suffisante.
Selon le principe cosmologique, observé à une échelle suffisante, l'univers ne devrait pas présenter de structures spéciales. La théorie de la relativité générale présentée par Einstein ne peut d'ailleurs convenablement s'appliquer que dans un univers homogène.
Le principe cosmologique en échec ?
Cependant des observations faites très récemment semblent faire apparaître des structures spécifiques dans le réseau de galaxies constituant le cosmos. Elles se présentent aujourd'hui sous forme de trois phénomènes différents.
Le premier phénomène est un espace géant vide de galaxies, ou ne comportant qu'un très petit nombre de celles-ci. Il s'agit du supervide géant découvert dans la constellation Eridanus par le cosmologiste András Kovács de l'Institut de la physique des hautes énergies à Barcelone. Il s'étendrait sur 2 milliards d'années-lumière. Il s'agit de distances considérables.Il faudrait 2 milliards d'années avant qu'un rayon lumineux le parcourre dans son entier, soit à peu près la moitié du temps de la vie sur Terre. 2)
Le second phénomène est constitué d'ensemble de quasars s'étendant sur la distance de plusieurs milliards d'années lumière. Le quasar (source de rayonnement quasi-stellaire ou presqu'étoile) est une galaxie très lumineuse du fait d'un noyau galactique fortement énergétique en termes de rayonnement. Ainsi le quasar SDSS J0100+2802 est considéré comme un trou noir supermassif, ayant absorbé l’équivalent de 12 milliards de masses solaires. 3) Or récemment, ce fut le Huge Large Quasar Group observé par Roger Clowes de l'University of Central Lancashire, UK qui a retenu l'attention. Il s'étend sur 4 milliards d'années-lumière. 4)
Le troisième phénomène consiste en une explosion de radiations très énergétiques s'étendant sur 6% de l'univers visible et dont la cause reste inconnue. Il s'agit du Gamma Ray Burst étudié par Lajos Balázs de l'observatoire de Konkoly à Budapest 5)
Comme les modèles cosmologiques actuels ne permettent pas d'expliquer de telles anomalies, présentant de telles dimensions, l'explication la plus simple serait que ces phénomènes ne seraient qu'apparents, résultant d'erreurs dans l'interprétation des observations. Mais aujourd'hui rien ne permet d'affirmer l'existence de telles erreurs.
Une seconde explication, beaucoup plus exotique, suggère que ces structures massives n'appartiennent pas à notre univers. Elles proviendrait d'autres dimensions, autrement dit d'autres univers, ou d'autres formes d'univers. Ainsi le principe cosmologique pourrait être sauvegardé. Mais ceci aux dépends d'un autre principe bien ancré depuis deux siècles, celui de l'unicité de notre univers.
Dans ce sens Rainer Dick, physicien théoricien à l'université de Saskatchewan, Canada, estime qu'il faut faire appel à des théories jusqu'ici restées spéculatives, celles de la Gravitation Quantique et plus précisément de la Théorie des Cordes, notamment la Théorie M. Celle-ci suggère que nous vivons dans un espace de 11 dimensions dont 7 sont trop petites pour être observables. Elle ne peuvent encore être observées expérimentalement, mais l'une des variantes de la Théorie M, lla Théorie des Branes, pourrait proposer des domaines vérifiables expérimentalement. 6)
Cet ensemble de théories permettrait de justifier l'hypothèse des multivers, très largement admise aujourd'hui (Voir nos articles précédents sur ce sujet). On pourrait alors admettre que les phénomènes évoqués ci-dessus et difficilement explicables dans la cadre de la cosmologie actuelle, pourraient résulter d'intrusions passées (ou même actuelles) d'autres univers dans le nôtre. Un article du NewScientist donne des précisions à cet égard. Nous ne pouvons pas le reprendre ici mais y renvoyons le lecteur intéressé 7) .
Références
1) Planck http://public.planck.fr/
2) CMB https://en.wikipedia.org/wiki/CMB_cold_spot
3) Quasar SDSS J0100+2802 https://fr.wikipedia.org/wiki/SDSS_J0100%2B2802
4) Huge Large Quasar Group https://fr.wikipedia.org/wiki/Huge-LQG
5) Gamma Ray Burst https://www.ras.org.uk/news-and-press/2693-5-billion-light-years-across-the-largest-feature-in-the-universe
6) Brane Theory https ://fr.wikipedia.org/wiki/Brane
7) NewScientist, octobre 2015. When worlds collide
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