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Débats sur la neutralité du net

Mardi avait lieu le colloque sur la neutralité du net organisé par l’Arcep. Ce sujet a déjà été abordé dans ces pages lors de la cassation par la justice aux Etats Unis d’une sanction portée par l’équivalent de l’Arcep (FCC) envers le FAI Comcast au nom de la neutralité du net. Le principe de neutralité est simple : il s’agit de garantir une liberté d’accès à l’information en dépit du contenu. Idéalement les acteurs du réseau doivent rester neutre face au contenu, c’est le principe de base de ce concept.

Ce colloque se déroulait donc avec en toile de fond cette décision de justice, mais aussi les diverses ébauches d’outils de filtrage mis en place dans le cadre d’HADOPI. Nous allons essayer de dégager les principaux axes évoqués lors de ce colloque le plus simplement possible. Dans un premier temps, nous aborderons l’aspect technique du colloque avec l’évolution probable de la forme du contenu des abonnements internet fixe et mobile puis dans un second temps, jusqu’où le respect des droits commerciaux peut repousser l’article 11 des droits de l’Homme concernant la libre circulation des idées.

Techniquement, il se dégage deux problématiques concernant à la fois l’internet fixe et l’internet mobile. Avec la multiplication des offres 3G et le surf sur mobile, le réseau est au bord de la saturation. Les opérateurs ont déjà mis en place les fameuses limites de l’illimité (vitesse de surf réduite après une certaine quantité de données échangées) et sont désormais tentés de limiter l’accès aux services gourmands en bande passante comme les vidéos en ligne de Youtube ou Dailymotion, pour ne citer qu’eux. Filant la métaphore de "l’autoroute" de Tim Wu reprise par Nathalie Kosciusko-MoricetNicolas Curien, de l’Arcep, déclare à ce sujet que "comme sur l’autoroute, il faut réguler le trafic sur Internet pour empêcher les bouchons [...] Mais on ne comprendrait pas qu’une société d’autoroute bloque les voitures bleues ou les voitures d’une certaine marque." C’est cependant déjà le cas quand on sait que la voix sur IP est pour l’instant bloquée sur les réseaux mobiles ainsi que les logiciels de peer-to-peer. Il conviendrait alors de ne plus parler d’un Internet pour les réseaux mobiles mais plus d’accepter le concept du minitel 2.0, modèle rassurant et permettant un meilleur contrôle commercial.

L’internet fixe n’est pas non plus exempt de sujets d’achoppement. Sous couvert de la pression fiscale subie par les opérateurs, des offres Premium sont sur le point de voir le jour, tirant vers le haut le prix des abonnements. Si aujourd’hui tout le monde semble d’accord pour ne pas prioriser dans le trafic de l’information un partenaire commercial des FAI, l’idée fait cependant son chemin notamment chez Free avec l’annonce de Maxime Lombardini, président de Free, souhaitant facturer certains des services les plus utilisés "se comptant sur les doigts des deux mains"... Voit-on poindre un accès premium "streaming", ou alors un accès "hébergement", ou "téléchargement" l’avenir seul nous le dira. Loin de ce "danger citoyen", on s’oriente plus vers la sélection des protocoles ou type de service dans la veine de ce qui se passe entre Apple et Adobe.

Pour finir, avec les enseignements de ce colloque, nous allons aborder le sujet déchaînant les foules, j’ai nommé Hadopi. Entre Jean Musitelli qui annonce qu’Hadopi va enrichir la neutralité et les fameux ACTA etLOPPSI, il s’agit d’humblement démêler les notions. "L’intervention de la loi Hadopi devrait garantir l’exercice d’une neutralité ni laxiste ni intrusive et va donc concourir à enrichir le contenu de cette notion", cette déclaration du conseiller d’état membre de l’Hadopi peut laisser perplexe quand on essaie de s’imaginer une neutralité qui pourrait être laxiste ou intrusive... La contorsion va bon train quand celui-ci ajoute que "passer d’une culture du laisser-aller, à une culture de la régulation avec des opérateurs qui appliquent de bonne foi les obligations qu’ils ont prises". L’appel à la collaboration des FAI est à peine voilée et le grand écart entre la neutralité et la régulation de belle facture.

Ce colloque aura donc permis de mettre en avant l’aspect technique de la neutralité déjà mis à mal, par ailleurs il se pourrait que l’assemblée puisse légiférer sur le sujet. Le problème reste finalement dans le grand écart entre le droit d’accès aux idées assuré par les droits de l’Homme et en même temps satisfaire les intérêts économiques des ayant-droits et des opérateurs. 
 

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6 réactions à cet article    


  • FRIDA FRIDA 16 avril 2010 10:44

    neutralité du net ou neutraliser le net ??


    • Hijack Hijack 16 avril 2010 11:55

      Très bonne question Frida ...


    • Jean Valles Jean Valles 16 avril 2010 13:31

      Mouais, très bonne question...hips


    • Talion Talion 16 avril 2010 18:54

      Bonne question, mais ceci dit on connait déjà hélas la réponse...


    • fb 16 avril 2010 17:30

      « Le principe de neutralité est simple : il s’agit de garantir une liberté d’accès à l’information en dépit du contenu. Idéalement les acteurs du réseau doivent rester neutre face au contenu, c’est le principe de base de ce concept. »

      Non. La neutralité d’un réseau est caractérisée par la non discrimination en fonction de la source, de la destination et de la nature potentielle(*) du contenu. Pour Internet cela se traduit par le principe de « Best effort ».

      Ensuite vous évoquez la saturation du réseau, c’est un peu risible. En 40 ans Internet (pas le Web) est passé de 2 nœuds à environ 1,5 milliards de nœuds, démontrant par là que saturer un réseau mondial et maillé est quelque peu difficile.
      Cette fameuse saturation du réseau est simplement l’argument fragile des opérateurs mobiles qui veulent jouer sur l’économie de la rareté en arguant que le spectre radio est limité mais qui dans le même temps n’hésitent pas à pousser des stupidités techniques comme la télévision mobile personnelle (TMP) qui consomment une largeur de bande hallucinante.

      Comme le résume fort pertinemment et avec concision Frida, il s’agit plus de neutraliser le Net en usant d’arguments techniques fallacieux pour revenir à un modèle de type Minitel ou client / serveur via des réseaux privés s’appuyant sur Internet et... des accords commerciaux de « neutralité » ou plutôt de non agression.

      Dommage d’avoir passé sous silence le fameux « Internet doit être neutre vis-à-vis des contenus licites » qui est un monument d’atteinte aux droits fondamentaux et aux libertés essentielles...

      (*) Sous réserve que cela puisse avoir un sens.


      • Guild Guild 16 avril 2010 20:53

        Très intéressant ! Je suis loin de posséder vos connaissances en ce qui concerne les réseaux et je trouve que votre intervention judicieuse, notamment en ce qui concerne la télévision mobile personnelle. Cette notion de minitel a été reprise récemment par un chercheur du CNRS, Marin Dacos, qui voit dans ce système une reprise en main du modèle économique lié au net.


        Quand d’un côté on a Internet qui s’étend horizontalement, et ne donne aucune assurance quant à la viabilité du contenu, et d’un autre côté un système vertical qui passe à travers des micropaiements et/ou des limitation techniques le choix est vite fait.

        Je suis aussi un fan de la façon dont Frida présente la chose !

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