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Accueil du site > Actualités > Technologies > La science se morfond dans les carrières de spécialistes, la recherche (...)

La science se morfond dans les carrières de spécialistes, la recherche désintéressée n’a plus de place.

La recherche scientifique a sans doute perdu le sens de sa vocation originelle qui était de produire des savoirs fondamentaux sur les choses étudiées. Si ça se trouve, la recherche s’est pervertie progressivement en instaurant des règles et des pratiques étrangères à sa vocation première. Le grand public ignore comment fonctionne la science. Quant aux chercheurs, ils ne savent pas forcément dans quel système perverti ils évoluent, étant éduqués, formatés depuis les études universitaires pour baigner dans un environnement aux pratiques déviés et viciés dont ils ignorent les limites et les tares. Ils obéissent à ce qu’on leur demande, sans aucun recul critique. Ce sont de simples travailleurs, d’ordinaires exécutants obéissant aux hiérarchies, accomplissant des tâches techniques pour recevoir un salaire et si possible, avancer dans leur carrière. Bref, quoi de plus culturel en somme. L’homme est devenu un fonctionnaire sur terre, un opérateur, un joueur qui cherche à obtenir un revenu. Le métier de chercheur est un travail comme un autre, enfin, disons qu’il est devenu une profession rémunérée ordinaire après avoir été une activité conçue comme l’artisanat, motivée par des intentions humanistes, pratiquée comme un art de l’esprit et la matière, alliant l’invention expérimentale et l’idée théorique.

La science s’est spécialisée depuis la fin du 19ème siècle. Heidegger s’était intéressé à l’apparition des sciences particulières, lesquelles ne seraient pas la conséquence mais la raison du progrès de toute recherche. Et donc, ce n’est parce que le chercheur avance dans ses connaissances qu’il se spécialise. Bien au contraire, c’est en se spécialisant, en travaillant sur des objets de plus en plus circonscrits, avec des techniques de plus en plus fines et particulières, qu’il progresse en ajoutant des éléments de savoir au champ spécialisé qu’il explore. La recherche n’est pas un processus organisé parce qu’elle se développe dans différents instituts. C’est l’inverse, la recherche comme processus indéfini qui avance à grand pas dans l’exploitation de la « nature connaissable » et qui pour aller plus vite et plus loin dans les détail, se scinde en disciplines spécialisées menées dans des laboratoire dédiés, avec leurs publications attenantes et leur congrès réguliers. Un véhicule de course qui veut aller plus vite doit bénéficier d’avancées techniques dans la transmission, la direction, le freinage, la motorisation, la suspension. Une recherche qui veut aller plus loin dans la complexité doit progresser dans des instituts spécialisés. Elle utilise les progrès technologiques utilisables dans le domaine où elle avance. Mais contrairement au véhicule qui nécessite le montage de ses éléments, la science spécialisée se suffit à elle-même si bien que les chercheurs peuvent faire progresser leur discipline en ignorant pratiquement tout ce qui se fait dans des spécialités connexes.

Le processus de spécialisation est arrivé à un point tel que les gestionnaires de la recherche ont fini par constater les impasses disciplinaires, tout en concevant des options différentes. Ainsi ont été lancées les recherches inter ou transdisciplinaires censées palier à l’autisme de chaque spécialité et des pratiques qui finissent par passer à côté de découvertes importantes subordonnées à la coopération de scientifiques issus de plusieurs disciplines. Des mesures ont été prises dans les années 1980 mais elles se sont heurtées très tôt à cette question fondamentale qui anime les autorités de la recherche. Si les recherches sont transdisciplinaires, comment évaluer le travail des chercheurs alors que les revues les plus prestigieuses sont organisées autours de pôles de spécialité et que les travaux combinant plusieurs disciplines, voire systémiques, peinent à trouver une destination dans les meilleures revues et n’ont pas de lieu de publication qui leur est dédié ? Ces interrogations furent posées par les instances dirigeantes du CNRS alors que les sciences cognitives, spécialité transdisciplinaire par excellence, figuraient dans la cible des disciplines à développer, ne serait-ce que pour suivre les avancées produites aux Etats-Unis.

La recherche ne se résume pas à l’activité de chercher. Elle suppose qu’on réfléchisse, pense, et détermine le chemin que doit parcourir le savant en quête de connaissance. Le chercheur doit chercher ce qu’il veut savoir de la chose. Il doit aussi se demander dans quelle recherche transdisciplinaire il peut apporter sa contribution. Justement, ce qui semble un détail anodin vient d’être souligné dans un article de Science où sont évoqués des travaux mettant en commun un même système de traitement de l’information conçu pour analyser les images de galaxies et qui s’est révélé utile dans un autre domaine, celui de la cancérologie et l’imagerie médicale. Nicolas Walton qui a mis au point le logiciel pour les études astronomique a collaboré avec les cancérologues mais il souligne que son agenda étant extrêmement chargé, il peine à trouver assez de temps pour s’investir dans les collaborations interdisciplinaires. Il faut rappeler en effet que le chercheur passe une bonne partie de son temps à remplir des formulaires pour obtenir des crédits lui permettant de faire fonctionner son laboratoire et de l’équiper avec les appareils les plus récents, car la technologie est déterminante dans la production des données, lesquelles constituent la matière pour publier et engranger ainsi une notoriété qui permettra de justifier de nouveaux crédits. Et aussi de motiver l’avancement des chercheurs. Ainsi, on a assisté à une inversion de finalité au cours des dernières décennies. La quête scientifique n’est plus la finalité première. L’ensemble que constitue la « chose naturelle scientifique » est devenue un moyen pour être analysée par le dispositif technologique que l’équipe de scientifique utilise pour avancer dans la croissance du laboratoire et des revenus. La recherche scientifique a perdu de vue son objectif initial. Elle est devenue un processus de transformation et de croissance des laboratoires et instituts. Le chercheur tend à se recentrer sur un domaine de plus en plus réduit du savoir. Il devient peu à peu inculte et d’ailleurs, le système éducatif encourage la formation de jeunes chercheurs incultes, très doués pour manipuler les instruments, comprendre la mécanique de croissance des publications et du laboratoire, mais complètement ignorant de ce qui se fait en dehors de son champ, privé de surcroît des savoirs de l’honnête homme qu’on appelait les humanités il y a un demi-siècle. En caricaturant, on dira que le futur scientifique doit se préparer à amputer son esprit et à atrophier sa pensée. On comprend que dans un tel contexte évolutif, le président Sarkozy avait l’intention de transformer les grands organismes de recherche, CNRS en tête, en agence de moyens pour se mettre au service de projets qu’on peut penser pilotés pour servir non plus les savoirs fondamentaux mais les impératifs pragmatiques, liés notamment à l’innovation technologique, pour renforcer la compétitivité à l’époque des nouveaux pays industrialisés.

 La recherche semble se concevoir comme une utilisation de moyens, accordant une place plus importante aux travaux qui, à défaut d’être authentiquement pluridisciplinaires dans la l’esprit, sont pluritechnologiques, c’est-à-dire organisés comme une combinaison d’activité émanant de plusieurs laboratoires. Par exemple, un institut de biologie fournira des souches cellulaires particulières, un laboratoire de génétique exécutera une cartographie des gènes et un centre de calcul pourra le cas échéant apporter ses compétences en traitement des données. On peut imaginer le processus sans fin de la recherche de nouveaux résultats dans les sciences du vivant. Tous les indices, tous les critères sont valides, pour peu qu’ils apportent des résultats chiffrés inédits. Par exemple des corrélations. La médecine industrielle en arrive même à traiter non plus des malades mais des statistiques. Une réduction de 50% d’un risque de pathologie pourra faire l’objet d’un traitement préventif. Signe des obsessions contemporaines. Maîtriser l’avenir, tendre au risque zéro, prévention du terrorisme, du réchauffement climatique, des insurrections, des pathologies, surtout celles générées dans des sociétés à haute solvabilité, là où les systèmes de santé et les patients peuvent payer. La recherche biologique produit de moins en moins de connaissances sur la nature mais de plus en plus de données techniques pouvant être utilisées à des fins de maîtrise de l’intégrité physiologique. Le chercheur navigue dans un champ de données réduit, connaissant ce qu’il faut faire et les règles permettant de décréter qu’un résultat est inédit et donc, susceptible d’être publié, ce qui suppose qu’on sache parfaitement ce que les laboratoires concurrents ont livrés dans les journaux spécialisés et les congrès dont l’objectif est autant de favoriser les échanges entre chercheurs que de servir de tribune pour placer des résultats le premier et se réclamer de l’antériorité d’une découverte. Le jeu des publications s’est substitué à la quête des savoirs. Et comme ces publications sont les seuls critères permettant de financer le laboratoire, recruter des chercheurs, acheter des appareils, offrir des promotions aux patrons, eh bien la recherche est devenue une course à la publication, certains n’hésitant pas à scinder les résultats en deux ou trois pour augmenter le nombre de publications.

Après avoir lu ces constats, le lecteur pourra penser à une science dévoyée. En fait, la science est devenue une organisation technicienne et surtout un immense dispositif de moyens dont les finalités sont triples. Offrir des salaires et des carrières à des chercheurs. Offrir des instruments de pouvoir aux dirigeants publics et des Etats au sein duquel ils oeuvrent pour sa puissance et aussi pour leurs carrières. Enfin, et ce n’est pas un secret, la recherche sert les intérêts privés quand elle est un instrument permettant de créer des produits innovants écoulés sur le marché par les industriels. Dire alors que la science est dévoyée, c’est émettre un jugement de valeur tout en assignant à la science une tâche noble, celle de produire des « savoirs de la nature » pour la « culture des sociétés ». Produire des disques durs ou des médicaments est tout aussi utile que connaître les ressorts de l’évolution. Par contre, il est assez clair que les règles de fonctionnement de la recherche « intéressée » et d’une recherche plus fondamentale (désintéressée) doivent être établies distinctement. Le temps accéléré des publications est incompatible avec la durée d’une recherche parsemée d’aléas et nécessitant un travail de réflexion soutenu. Darwin a mis 20 ans pour publier une version aboutie de son livre sur l’évolution. De plus, la recherche désintéressé ne peut entrer dans la grille d’évaluation conventionnelle, étant donné qu’elle ne produira pas forcément des travaux cadrés pour entrer dans le schéma rigide des revues scientifiques prestigieuses ou de bon niveau. La recherche désintéressée s’appuie sur la science mais elle produit un ensemble de savoirs qu’on peut espérer inédit. En ce sens, elle s’inscrit dans un autre univers, nécessitant des institutions spécifiques et des financements publics accordés sur la base d’une relation de confiance entre les autorités de tutelle et les chercheurs s’impliquant dans des aventures scientifiques inédites dont on ne peut piloter les résultats, ni les évaluations, ni n’assigner aucun objectif excepté celui d’avancer dans les méandres de la connaissance.

On l’aura compris, à l’ère de l’hyper intéressement, la recherche désintéressée n’a aucune place ni aucune chance. L’homme est un prédateur. Les mécènes et les honnêtes hommes ont disparu. 


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12 réactions à cet article    


  • L'enfoiré L’enfoiré 14 juin 2011 12:45

    En fait, ce qui manque, ce sont les généralistes qui font le lien et des autodidactes qui apportent leurs connaissances pratiques du terrain de la recherche.


    • easy easy 14 juin 2011 13:20


      Voilà un papier, de votre part cher Dugué, qui tranche avec les autres. Celui-ci est à mes yeux bourré de raison.


      Au fond, vous abordez le question de la transcendance de la science ou ce qui reste de sa transcendance.

      Est-ce l’individu, le scientifique en l’occurrence, qui fait la transcendance ou est-ce elle qui fait l’individu, son attitude ? Sans doute sont-ce les deux à la fois mais toute transcendance ne commence ou ne jaillit que par le comportement d’un individu. Si la royauté était régulièrement bourrée de transcendances, c’est aussi la personnalité de certains rois, Henri III, Henri IV, Louis XIV, qui les ont amplifiées et rendues plus sublimes encore. 

      Concernant les personnes qui ont incarné ou représenté des transcendances, je remarque des évolutions au fil des siècles. 

      Les personnes incarnant des transcendances ont donc longtemps été des personnes physiques, des individus ressortant comme des miracles, avec donc un côté irremplaçable ou très difficilement remplaçable de leur personne. Et, sans doute à la faveur de l’égalitarisme à la Jules Ferry en même temps que de l’industrialisation puis de la mondialisation de tout et de toute chose, on serait passé d’incarnations sous forme de personnes physiques à des incarnations sous forme de personnes morales ou de disciplines (là se situent les grandes heures de la science), puis à des incarnations sous forme de masses humaines (je parle de Facebook ; de Wikipédia, d’Internet) et du coup au bête argent.

      L’argent aurait pu trôner, depuis la nuit des temps, au sommet de tout. Mais non. Pendant les grandes heures de Venise, l’argent, qui était pourtant très important, était placé en dessous du principe du Doge, en dessous du principe du commerce maritime, clef ou source de tous les miracles. Et en dessous encore de la religion. Puisque les navires étaient sous la protection de Dieu, se fâcher avec lui valait ruine. L’argent était également placé en dessous du dieu Mer ou de l’art de naviguer (ce point était très net chez les Portugais des grandes heures). Un génie de la navigation avait la clef de tous les miracles.

      Ensuite, il y a eu l’époque scientifique ou des Buffon, des Newton, des Darwin, des Pasteurs, Edison, Nobel et Einstein ont semblé en mesure de livrer (à tous) l’accès à des miracles.

      Mais concernant la science, nous avons assez rapidement vu son revers. C’est d’ailleurs le seul cas de divinité qui nous ait fait autant souffrir de l’avoir tant adorée. A peine commencions-nous à rêver lors de l’apparition des premiers avions que déjà, ils nous napalmaient comme Robur le conquérant l’avait annoncé.


      Le fait de la démocratisation du savoir et du pouvoir (Quoi qu’on en dise, un gueux a tout de même plus de chances de devenir prince de nos jours qu’il y a deux siècles, ne serait-ce qu’en vertu du Loto) ce fait là conduisait forcément à ce que nos prochains dieux soient plus tournants. Un jour l’un, le lendemain un autre.

      De tous les miracles que nous attendons, l’immortalité est le plus grand.
      Et bien si autrefois la longévité dun roi était essentielle, cruciale pour son peuple, elle ne n’est plus aujourd’hui pour la plupart des Terriens. C’est la nôtre, celle de tout quidam qui devient essentielle.
      Depuis un siècle, nous sommes informés de manière planétaire et nous apprenons que les individus les plus vieux sont des gueux et nous étudions leur cas afin de les copier. La source de jouvence s’est déplacée de la religion à la médecine pour se trouver aujourd’hui davantage dans le mode de vie, ce qui renvoie à une gueuserie, à du « n’importe qui ».

      N’importe qui président, n’importe qui millionnaire, n’importe qui star, n’importe qui centenaire, ça conduit forcément à une défocalisation sur un individu particulier.

      Dans le même temps, ce n’est plus un Pasteur qui découvre un vaccin mais un laboratoire, une entreprise, donc une entité à la fois immortelle et banale de principe. L’entreprise Pasteur ou Steinway est aussi immortelle et dépersonnalisée que Ketchup qui ne produit que de la sauce tomate. Il suffit que des scientifiques (n’importe qui pouvant l’être) se regroupent dans un labo (là on voit tout de suite qu’il faut de l’argent) pour que des études soient menées et qu’il soit éventuellement découvert un remède contre la mort. Et malgré le très grand nombre de l’Oréal, d’Aventis et de Servier dans le Monde, malgré la montagne de bêtes sacrifiées, il n’en sort pas grand chose de miraculeux mais bien des dioxines et trop de Tchernobyl. 
      Solar Impulse ? Un jour il nous bombardera.



      Tout de même, c’est dans le secteur de la santé que les plus purs et importants miracles ont été accomplis. Mais comme la guérison d’une leucémie par greffe de sang de cordon n’épargne pas d’être broyé par un camion (autre miracle) le lendemain, nous ressentons constamment notre vieille angoisse fondamentale.

      Et puis il y a le mur de l’écologie ou de la démographie qui nous explose à la figure et qui nous montre l’absurdité ou la folie de notre course à la fois individuelle et collective.

      De sorte que le vrai miracle réside désormais dans la masse humaine entière et par le biais de son attitude, non de sa production, non de ses découvertes. La Solution semble désormais se cacher quelque part dans Internet et ce qui lui est associé. Nous passons donc notre temps à creuser dans la Mine internet à la recherche de la Pépite.

      Il n’est qu’à observer ce que dit le Net. Ca forme deux classes. Une classe de dires qui exprime des critiques de la situation portant sur tous les domaines. Et l’autre classe de dires qui consiste en des exhortations à freiner, à économiser. (la pub continuant, pour sa part, à proposer de consommer et ressortant alors comme déconnectée du Doute qui gagne les esprits)

      La seule solution nous apparaît désormais dans notre attitude qui doit devenir plus frugale.
      Quel choc culturel !
       
      Alors que la Solution avait si longtemps semblé être dans un Graal à trouver, à conquérir, il s’agirait aujourd’hui de ne plus rien chercher, de ne plus rien conquérir, sinon en manière de « Après moi le déluge »

      Et la façon que nous avons de régler ce choc consiste soit à entamer personnellement, discrètement, sans surseoir, notre propre chemin de Damas du consumérisme, soit à rompre avec la vision égalitariste, humaniste, pour accaparer le plus possible de biens, pour notre seul compte, tel un écureuil déréglé, en excluant les visions en Arche de Noé collective et en allant au contraire vers ça

      Dans cette décadence, il n’y a quasiment aucune place pour les scientifiques ou les chercheurs (décadence selon l’ancienne vision. Ce n’est pas forcément une décadence absolue). Ils savent qu’ils ne sont plus espérés comme des Curie. Ils gèrent les affaires courantes et toute transcendance est éteinte d’un bout à l’autre de tous les Jussieu.


      Et quand je parle de lumière sur Jussieu : Il y avait, 30 ans plus tôt, à un des 4 coins de la faculté, tout en haut du bâtiment en grille, une sorte de serre rontonde constamment éclairée de quelque lampe à UV qui donnait donc une lumière violacée sur fond vert.
      Peu de gens de la fac se rendaient dans cet endroit mais sans rien savoir de ce qui s’y passait, ce machin donnait l’impression qu’il y avait bel et bien un endroit où des génies recherchaient la pierre philosophale.
      (Dans le genre, il y avait aussi son gros calculateur)

      De cette serre, il sera sans doute sorti des applications pour la reproduction des plantes ou pour la cuture des tomates hors sol, mais bon, quand on voit le goût qu’elles n’ont pas ces tomates...

      Toujours sur ce plan des transcendances incarnées par quelque endroit ou objet et toujours sur Jussieu. Il y avait le vieil amphi de la rue Cuvier où les Curie avaient maraudé, il y avait la côte de baleine au jardin des plantes voisin, il y avait une foultitude de choses dans le genre qui nous reliaient les chercheurs et étudiants à des transcendances. Le fait d’avoir éliminé toutes ces choses aura contribué à la perte de ces auras sans qu’aucune nouvelle ne vienne s’y substituer, sinon celle de l’argent puisque pour rénover, pour monderniser, pour casser l’ancien, il faut de l’argent, rien que de l’argent.


      Dans les débuts de l’industrialisation, ce sont les choses et les procédés qui ont été industrialisés. Les pilotes de ces machines étaient encore des personnalités construites à la Champolion, à la Lavoisier. Puis, à force d’avoir industrialisé tout, l’enseignement comme la guerre, la bouffe comme la justice, le logement comme la culture, les esprits sont devenus inéluctablement industrialisés. Même l’amour, même ce qu’on en dit, même le sexage, s’est formaté. Tu sors de la norme t’en prends pour 274 ans de tôle.

      La seule solution à l’immortalité semble donc passer par la case prison.



      Nous nous serions mis au bouddhisme il y a 2500 ans, nous ne serions probablement pas devant un tel désanchantement ni devant un tel Mur, mais bon, on ne va pas refaire l’Histoire.


      • Martin Lucas Martin Lucas 14 juin 2011 16:48

        C’était mieux avant, blablabla...
        De toute façon, quoi qu’on y fasse, les grandes découvertes scientifiques sont toujours l’oeuvre de chercheurs à la marge, ayant une grande érudition, qui passaient leur temps à se battre pour obtenir un minimum de subsides et d’attention, quand ce n’était pas l’excommunication qui les guettait.

         Je ne pense pas qu’un changement de politique y fasse quoi que ce soit. De deux choses l’une : soit nous ne sommes pas assez au courant des recherches et des progrès en cours, soit nous sommes dans une période de stagnation comme il y en a souvent eu au cours de notre histoire. Je penche plutôt pour la première.


        • Kalki Kalki 14 juin 2011 18:26

          La recherche scientifique, sans humain, rien de plus simple et de plus éfficace

          est ce que tu veux regarder dans le trou noir :) accepter le futur ? non tant pis :)


        • Voltaire Voltaire 15 juin 2011 09:17

          Cher auteur,

          Fort heureusement, la réalité n’est pas aussi noire que votre article la décrit.

          Tout d’abord, il faut souligner l’explosion du nombre de chercheurs dans le monde (et en France) en 50 ans, et des budgets alloués à la recherche. La prise de conscience après la seconde guerre mondiale du role majeur de la recherche dans l’évolution de la société , que ce soit effectivement en termes de compétitivité économique mais aussi de bien être pour l’individu a entrainé des investissements toujours plus importants dans les multiples domaines de la science.

          Certes, cette vision « finaliste », c’est à dire destinée à atteindre un objectif sociétal ou économique, plutôt que celui de la simple recherche de connaissances nouvelles, a largement motivé cet engouement, mais non sans entrainer aussi un développement sans précédent de la recherche dite « fondamentale ». En effet, même si ses effets sont complexe à mesurer, l’investissement dans cette recherche dite « blanche » a toujours été reconnu comme ayant à moyen ou long termes des retombées pratiques aussi imprévisibles que nombreuses. Ainsi, même si vous avez raison de souligner que, pour de nombreux politiques et mêmes de nombreus citoyens, c’est bien cet objectif finalisé qui compte, un effet indirect mais incontestable des moyens mis en oeuvre a été une explosion de la recherche fondamentale, dans tous les domaines (il suffit de constater les moyens sans précédent alloués à la physique des particules par exemple). De plus, des disciplines parfois oubliées (comme la biologie systématique par exemple) ont été ravivées par nécessité (ici, par notre prise de conscience de l’importance de la biodiversité). 

          Alors certes, le « système » de recherche n’est pas, comme auparavant, axé sur cette recherche de connaissances pures. Il comporte de nombreux défauts et de nombreux obstacles pour ceux qui souhaitent sortir des sentiers battus. Mais la taille même des investissements, la multiplicité des mécanismes de financements, la pugnacité des chercheurs et de la communauté scientifique, a permis un développement continu de cette recherche de base, avec de nouveaux instruments comme l’ERC (European Research Council) au niveau Européen par exemple. A côté de cette notion « utilitariste » de la recherche qui prédomine, la vocation de « curiosité » et de découverte de la recherche perdure et perdurera, car il s’agit, quoique l’on en pense, d’une caractéristique fondamentale de l’espèce humaine : comprendre ce qu’il ne connait pas, découvrir, chercher, explorer... notre quête du savoir est sans fin, et nul réforme ne saurait en venir à bout.


          • Kalki Kalki 15 juin 2011 10:14

            Petit voltaire faites vous humble : vous êtes inutiles, incompétent et dangereux dans votre vision du monde qui n’est QUE FOLIE

            La recherche scientifique, sans humain, rien de plus simple et de plus éfficace


          • Kalki Kalki 15 juin 2011 10:18

            Le mur que tu n’as jamais voulu regardé de ta vie insignifiante et puèrile et absurde

            se referme aussi sur toi


          • Kalki Kalki 15 juin 2011 10:19

            Changez de discours ou prenez un ticket en avance le camp de concentration que vous aidez a construire, tacitement ou consciemment


          • L'enfoiré L’enfoiré 15 juin 2011 17:08

            Kalki,
             Vous vous répétez, mon cher, avec le lien que vous citez.
             Justement c’est ce que le scientifique ne peut pas se permettre.
             Il doit tester, comparer avec d’autres idées et puis conclure et produire.
             Plus tard, s’il a commis une méprise, corriger le tir et recommencer.
             Il y a un esprit scientifique qui ne correspond nullement à ce qui est décrit.
             Le véritable scientifique du fondamental ne pense pas à l’argent.
             Il s’en fout, tout simplement.
             
             


          • L'enfoiré L’enfoiré 15 juin 2011 17:10

            Au fait, Bernard, quand allez-vous réagir et défendre votre article que je trouvais bon ?
            Ecrire un article n’est pas la fin du monde, sinon écrivez des livres et priez qu’il n’y ait pas trop de droits de réponses embarrassants.


            • ubotugy ubotugy 24 juin 2011 04:13


              Un très bon article je trouve, merci.

              Vu de l’extérieur votre constat me paraît très pertinent, vu de l’extérieur smiley

              N’était-ce pas prévisible, d’une certaine façon... c’était écrit avant que l’Histoire ne le prouve.

              “ Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. ”
              François Rabelais


              • IcyBlue 28 juillet 2011 20:45

                Étant Chercheur et ayant travaillé en France et à l’étranger, je peux dire que oui tout ce qui est décrit dans votre article est vrai. Mais est ce bien nouveau ? et est ce un mal ?


                 L’archi spécialisation ne va t elle pas de paire avec l’augmentation des connaissances et du nombre de chercheurs ? La Recherche est une industrie comme les autres et les chercheurs ne sont que des ouvriers spécialisés. c’est le b.a-ba de toute organisation qui a vecu une croissance formidable. 

                Je pense que le coté « humaniste » où le Scientifique est un bienfaiteur de l’humanité, n’a jamais disparu mais n’a jamais vraiment existé non plus. C’est un fantasme généré par des scientifiques en mal de reconnaissance.

                 Peut etre venez vous de réaliser que vous n’etes qu’un pion dans cette industrie et vous insinuez une déchéance de la profession, une perte de valeurs morales et éthiques, plutot qu’une remise en question de votre propre place dans le systeme. (et cette dénonciation vous place au dessus des autres par consequent...c’est bien pratique pour son ego).

                mais voila, la science est passée de l’artisanat à l’usine. ca n’empeche que les gens qui y consacrent leur vie, ou une bonne partie, n’aient moins de vertu ou de cervelle ou de connaissances que le Scientifique sur lequel vous fantasmez. Celui la meme qui decrivait son predecesseur comme des gens ayant une marotte, un hobby ou meme une lubie...

                si l’on mettait en place le systeme que vous insinuez dans votre article, il ne devrait y avoir que des « martyrs » de la science. donc gardez vos lamentations et arretez de vous croire superieur.
                il n’y a pas moins de decouvertes maintenant qu’avant...bien au contraire. et qu’importe le format d’evaluation (nombre de papiers et contraintes administratives ou technologiques), les avancées sont là et continuent à etre là....

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