Le livre suit la voie de la vidéo et la musique et se dématérialise de plus en plus. Un cap a été franchi cette semaine avec les annonces de Google et d’Amazon. Retour sur ce qui est déjà une révolution sur Internet.
Depuis 1999 et l’apparition de la certitude qu’Internet allait devenir un outil incontournable, la planète web n’a cessé de dématérialiser ce qui se faisait de mieux dans le réel. Ebay ou Priceminister ont les premiers entraînes une révolution dans la façon de faire ses courses.
En 2005, YouTube lançait son service de partage de vidéos. La possibilité de mettre en ligne des vidéos de toutes sortes et de les partager avec la planète entière était née. L’utilisateur a soudainement eu accès, en toute légalité, à de nombreux clips musicaux, à des extraits de films, des moments d’anthologie du petit écran. Le site connaît aujourd’hui la 5ème audience mondiale. Ce mouvement fut une autre révolution.
En 2007, Deezer fut créé, et remplaça BlogMusik, pour proposer à tout internaute d’écouter en streaming (sur internet, sans téléchargement) de la musique, légalement. Le concept de jukebox numérique était né. Ainsi, tout internaute put écouter la musique de son choix, à partir d’internet. La naissance de ce site fut une 2ème révolution dans le monde de l’accès numérique à l’information et la culture. Spotify, un de ses concurrents, vient d’annoncer la possibilité prochaine d’écouter ces morceaux hors ligne, sous couvert d’un abonnement. Une nouvelle voie dans la facilite d’accès à la musique.
Or, aujourd’hui, nous sommes à l’aube d’une 3eme révolution, du même ordre. Le livre suit la route de ses cousins de la vidéo et de la musique.
En effet, le livre numérique est en plein essor. Il n’est plus de l’ordre de la science fiction d’imaginer les usagers du métro lire Proust sur un petit écran.
D’un côté, les readers (livres numériques dans lesquels on peut transporter des centaines de livres), se sont considérablement améliorés. Par exemple, Le Kindle, livre numérique produit par Amazon, jusqu’ici vendu seulement aux Etats-Unis, sera disponible dans le monde à compter du 19 octobre, pour un prix de 279 dollars (190 euros). La qualité de lecture est devenue très bonne et l’écran ne fatigue pas les yeux. Les livres sont légers et moins fragiles, leur prix a considérablement baissé. Le cabinet Forrester Research a estimé que trois millions d’appareils seraient vendus en 2009 aux Etats-Unis, prévision relevée par rapport aux deux millions envisagés auparavant. Les ventes pourraient doubler en 2010, pour atteindre 10 millions d’euros.
D’un autre côté, l’offre de livres et documents à mettre dans ces livres numériques va grandissante. Prenons deux exemples, parmi d’autres, chacun dans leurs domaines :
Google, d’abord. La firme californienne a l’ambition, avec son service Google Books (
http://books.google.com) de numériser l’immense majorité des livres reposants dans les bibliothèques de la planète entière. Les livres seraient alors vendus sur internet, et téléchargeables facilement sur les readers. De véritables trésors vont alors être découverts par chacun. Les lettres manuscrites de Louis XIV ou des extraits de la première version de l’Encyclopédie seront facilement disponibles en ligne puis en lecture sur son reader. Une fois de plus, Google ouvre le champ des possibles, et offre un nouveau service à l’internaute.
Evadoc, ensuite. La start-up française vise à regrouper sur son site (
www.evadoc.com) des documents et livres numériques de tous types. Des annales de concours aux thèses, en passant par les rapports juridiques, les publications scientifiques et les présentations d’entreprises, tout document a vocation à être partagé sur la bibliothèque participative, surnommée le YouTube du document. Ces deux acteurs ne sont pas concurrents. L’un vend des livres protégés, l’autre propose le partage de documents et d’oeuvres libres de droits ou bien dont les auteurs ont accepté la publication en ligne (mais pas forcement le téléchargement). A titre d’exemple, un roman publié il y a plus de 70 ans tombe dans le domaine public, c’est ce qui permet à Evadoc de proposer des livres en libre consultation puis téléchargement, tandis que Google doit vendre ses livres les plus récents, mais générateurs d’une plus forte audience.
Ces deux exemples montrent en quoi le livre suit la voie de ses ainés, la vidéo et la musique. Pourtant, le livre numérique n’est pas tout jeune. On en a parlé pour la première fois en 1971 lorsque Michael Hart créa en 1971 le projet Gutenberg, dont le but était de numériser des livres. Mais son développement n’a encore jamais été une priorité pour les entreprises de haute technologie. Aujourd’hui, la marche est bien lancée.
Une des dernières barrière au développement exponentiel du livre numérique reste l’Homme lui-même. Souvent rétif au changement, il est encore difficile de convaincre. Mais les acteurs du secteur sont optimistes : "Notre conception de Kindle, c’est que tout livre paru, publié ou épuisé, soit disponible en 60 secondes", a déclaré le directeur général d’Amazon (
www.amazon.com), Jeff Bezos. Amazon, numéro un mondial de la vente au détail sur internet, considère le marché du livre numérique comme un moteur de croissance très important. Bezos s’est dit "très confiant" pour le quatrième trimestre de l’année 2009, les lecteurs numériques devraient en effet être parmi les produits phares de la fin de l’année.
Cependant, au delà des bonnes performances commerciales que vont réaliser les vendeurs de readers (amazon, sony…) et les sites internet hébergeurs de contenus (Amazon, Google Books, Barnes & Nobles, Evadoc.com), c’est bien un changement de mentalité qui est à l’oeuvre et qui n’a pas fini de révolutionner notre rapport à l’écrit.