Le Nobel 2013 de physique attribué à Dieu, son fils le boson, et le saint-esprit Higgs Englert

Mardi 8 octobre 2013, il est midi. Le nom du lauréat récompensé par le Nobel de physique aurait dû être connu puisque l’annonce était prévue pour 11 heures 45 et qu’en général, le comité respecte le timing prévu. Mais cette année, les choses ne se passent pas comme prévu et les sites d’information annoncent un report d’une heure au moins pour l’annonce, laissant entendre que ça discute serré parmi les membres du jury (the Academy is still in session ! a tweeté l’Académie depuis Stockholm). Alors je vais faire comme tout le monde et décaler d’une heure la rédaction du billet. Si celle-ci doit avoir lieu. Car je me refuse à parler de travaux que je ne trouve guère passionnants ou alors que je ne comprends pas. Quoi qu’il en soit, ce retard imprévu ajoute du piment à l’événement. J’attendrlrrrééé… une voix chantante imite Dalida dans mon oreille. J’essaie d’imaginer ce qui se passe. Une bataille de dernière minute pour choisir les lauréats ? Ou pour rédiger le communiqué ? Un indice indiquant qu’il y a du boson de Higgs dans l’air ? Ou alors que le grand favori du Nobel n’a pas été récompensé. Suspense.
Et puis l’annonce et pas de surprise. Le Nobel 2013 récompense deux des trois scientifiques inventeurs de la fameuse particule de Dieu, le boson de Higgs qui en fait a été introduit en 1964 dans la théorie physique par les belges François Englert, Robert Brout et le britannique Peter Higgs (l’histoire est plus compliquée car il y a trois physiciens en plus mais je ne gloserai par sur ce qui ressemble à une affaire Gallo dans le monde de la physique théorique). Pas de chance pour Brout, qui aurait dû être de la fête mais qui est décédé l’année dernière. Ce boson fut pendant longtemps une particule hypothétique qui aurait été découverte, d’après des résultats plutôt controversés, dans le grand accélérateur du CERN. Finalement, à travers cette récompense, le Nobel consacre la grande physique européenne. Découvrir le boson de Higgs dans un accélérateur, c’est pour la physique des hautes énergies un peu comme atterrir sur la lune et cette fois, la prouesse a été réalisée par l’Europe et non pas les Etats-Unis. L’hymne à la joie peut retentir. Et célébrer cette « big science » qui a tout de même coûté des milliards d’euros. Les contribuables européens peuvent être satisfait.
Quelques mots quand même sur cette découverte. Le boson de Higgs désigne en fait un processus permettant de rendre cohérente l’unification de deux interactions, l’électromagnétique et la faible. L’interaction EM est très connue. Son médiateur est le photon, particule sans masse se déplaçant à la vitesse de la lumière. L’interaction faible intervient dans les processus de désintégration qu’on appelle radioactivité et qui permettent entre autre de fabriquer des bombes ou de l’énergie nucléaire. Mais le boson de Higgs n’a aucun intérêt du point de vue pratique. Il s’agit de comprendre les interactions fondamentales de la nature. Qui dit interaction dit médiateur. Les physiciens des années 1950 étaient en quête de compréhension et d’unification. Le modèle standard est vieux de plus de 50 ans. Il a été théorisé en 1960 par des physiciens qui se sont partagés en 1979 le Nobel (Glashow, Salam, Weinberg). Le modèle a été couronné d’un succès expérimental avec la découverte des courants faibles. Mais il restait un mystère.
Dans le modèle électrofaible, il y a quatre médiateurs responsables de l’interaction. Le photon et puis trois bosons (de jauge) impliqués dans la force faible, le W+, le W- et le Z. Les deux premiers sont chargés. Ce qui est essentiel pour réaliser la conservation de la charge dans certaines interactions. Un exemple, le tritium est un isotope d’hydrogène composé d’un électron et de deux neutrons. Il se désintègre pour donner un isotope d’hélium 3 qui possède deux protons et un seul neutron. Un neutron est donc transformé en proton alors qu’un électron est produit pour constituer l’hélium. C’est dans ce type de processus qu’interviennent les bosons faibles du modèle standard. Or, le modèle « coince » car les W et le Z n’ont pas de masse alors qu’ils devraient, notamment parce que la portée de la force est infime ! Et c’est ici qu’intervient un processus complexe dit de brisure de symétrie avec l’intervention d’un champ scalaire, le champ de Higgs, dont l’interaction avec les bosons faibles leur permet d’acquérir une masse. En reprenant une image courante, c’est comme si le boson sans masse pouvait « manger » un peu du champ de Higgs pour acquérir la masse qui lui convient.
Le Nobel a couronné une sorte de mythe que les médias se plaisent à nommer particule de dieu parce qu’elle était aussi insaisissable que les voies du Seigneur. Maintenant, on dit qu’elle a été saisie par le CERN. Mais dès que Dieu est de la partie, il se trouve toujours des mécréants pour troubler la grande messe. Alors je vais m’y coller en émettant une critique sur ce Nobel a retardement qui couronne des recherches assez théoriques inscrites dans une physique maintenant un peu datée du milieu du 20ème siècle. Ce qui fait défaut, ce n’est pas le manque d’application, car la science n’en est que plus belle si elle est inutile du point de vue pratique mais éclairante pour comprendre l’univers. Hélas, le boson de Higgs n’apporte rien de plus à nos connaissances. Il a été détecté comme une trace dont les paramètres coïncident avec ce qui était attendu, en analysant des milliards de collisions. On n’est pas loin de la fluctuation ou de l’artefact. Et plus, le modèle standard n’explique pas la nature. Il est maintenant dépassé par les développements axiomatiques de la théorie quantique des champs qui ouvrent de nouvelles voies ontologiques.
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