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Mais sur quel pied danse Google ?

Du Bon Gros Géant (relisez Roald Dahl !) au Père Fouettard, il n y a qu’un pas. Un fil ténu, dont la solidité ne tient qu’à quelques dossiers sensibles : la censure, la pornographie, la protection des données personnelles ou... le cours de la Bourse. Jusqu’à son introduction en Bourse, la question de savoir si Google était bon ou mauvais ne se posait pas : le moteur n’était perçu que comme une fontaine de jouvence de l’Internet, de laquelle jaillissaient, à intervalles réguliers, de bonnes trouvailles, parfois pas vraiment neuves, mais toujours gratuites et souvent sympathiques.

En décembre dernier, à l’heure du bilan, on s’aperçoit que l’image de Google a changé. La start-up fascinante des débuts a peu à peu laissé place à un ogre technologique aux ambitions presque hégémoniques. Google, touche-à-tout de l’Internet désireux d’ "organiser l’information mondiale", capable d’investir le marché de la vidéo (Google Video Store) ou de la voix (Google Talk) comme de prendre pied dans la presse écrite comme dans la radio, ne fait plus que fasciner. Désormais, il inquiète.

Google St Valentin

Qui ? Les investisseurs, tout d’abord, qui se tiennent prêts à sanctionner le moindre faux pas, comme la Bourse l’a montré lors de la publication des derniers résultats. Puis, plus récemment, les internautes, le fonds de commerce de la société, ceux à destination de qui les fondateurs de Google se fixaient comme mot d’ordre : "Don’t be evil" (Ne sois pas mauvais).


En acceptant de censurer son moteur de recherche pour lui offrir le prometteur marché chinois, Google commet un impair. Lui qui, fin janvier, défiait le gouvernement américain en refusant de lui livrer les mots-clés permettant aux internautes d’accéder à des contenus pornographiques, au nom de la vie privée de ses internautes, se compromet auprès de Pékin. Google fait fi de sa neutralité, et baisse dans l’estime de ses internautes.

Google s’efforce pourtant de conserver son image d’entreprise jeune et dynamique, plus soucieuse du bien-être de ses clients que de son cours en Bourse (les Américains sont d’ailleurs toujours plus nombreux à recourir à ses services de recherche).

En témoigne cette anecdote, extraite d’un dossier consacré aux fondateurs de Google dans le prestigieux Time Magazine. Une équipe d’ingénieurs vient fièrement soumettre son idée à Sergey Brin et Larry Page : apposer de mini-liens sponsorisés sur les pages de la recherche d’images. Bénéfice escompté : 80 millions de dollars par an, ce qui, même pour un Google, n’est pas négligeable. Sergey étudie la question, et balaie l’idée d’un geste : le procédé n’apporterait rien à l’internaute, il ne vaut donc rien. 80 millions et les espoirs d’une équipe partent en fumée...

google 2006En parallèle, Google sort la version 3.0 de son logiciel de recherche locale : Google Desktop Search, dont la principale innovation est qu’il permet d’indexer plusieurs ordinateurs et de consulter les contenus de ces derniers même lorsqu’ils ne sont pas connectés. La raison : les contenus sont dupliqués sur les serveurs de Google, qui malmène encore une fois sa politique de respect de l’utilisateur. Immédiatement, la fronde gronde, emmenée par l’EFF (Electronic Frontier Foundation). Et dire que pour le moment, 77 % des internautes ne savent pas ce que Google sait sur eux...

Déjà, le fait que les courriers reçus via Gmail soient scannés pour adapter la publicité contextuelle à leurs contenus n’enchantait pas. Le Google Chat associé à la messagerie permet même maintenant de stocker en ligne ses conversations ! Si, en plus, nos dossiers personnels se retrouvent sur des serveurs dont on ne sait rien... Et que dire de l’éventualité d’un GBuy, moyen de paiement en ligne de type Paypal, qui signifierait qu’on stocke ses coordonnées bancaires sur son compte Google !

L’impudence de la société énerve. La presse française s’y est mise d’ailleurs, et proteste contre l’indexation automatique des contenus dans Google news. Ce dernier devrait bientôt accueillir des encarts publicitaires, sur lesquels les médias ne toucheront rien...

Par ailleurs, Google a récemment dérogé à l’une de ses règles d’or : laisser le buzz se faire. Associer sa barre d’outils à Firefox et Mozilla, parangons du logiciel libre entourés d’une aura plus que positive, soit. L’affaire est bonne... mais dealer avec HP, Apple ou d’autres constructeurs, pour s’imposer sur tous les fronts, n’est pas une aussi brillante idée en termes de retombées. Et la mobilité ? Google a conclu des accords avec près de la moitié des constructeurs de téléphone pour qu’ils installent ses services mobiles. Ne risque-t-il pas de s’attirer leurs foudres, ou celles de Microsoft, qui mise énormément sur ce secteur, comme le montrent les dernières annonces en provenance du 3GSM ?

Sans parler de Dell ! D’après le Wall Street Journal, Google serait prêt à verser jusqu’à 10 dollars par PC dans lequel Dell intègrerait par défaut ses logiciels et paramètrerait la page personnalisable du moteur comme page d’accueil. Le marché porterait sur 100 millions de PC, soit un milliard de dollars. L’objectif de cette manœuvre est clair : lutter contre la suprématie de Microsoft, montrer aux primo-accédants que des alternatives existent, et faire entrer ces derniers tout droit dans la "Googlesphère".

Des plans de Google, on ne sait finalement rien, si ce n’est que le moteur veut être partout et toucher tout le monde : numérisation de livres, fournisseurs d’accès gratuit à Internet, marchand de vidéos, publicités sur tous les types de médias. Et puise pour cela sans parcimonie dans son trésor de guerre, comme le montre l’accord d’un milliard de dollars passé avec AOL.

Maître de la publicité en ligne, le géant Google pourrait finalement n’être qu’un colosse aux pieds d’argile. La fraude au clic représenterait jusqu’à 30 % de ses bénéfices, estiment certains. Et la faramineuse capitalisation boursière - plus de 100 milliards de dollars à l’heure actuelle - ne tient finalement qu’à peu de choses. Des résultats moins bons que prévu, un projet dont les retombées financières à court terme ne sont pas évidentes (Dell) et la courbe redescend, entraînant avec elle l’ensemble des valeurs de l’Internet américain (Yahoo !, Amazon, eBay...), alors que les rivaux n’ont pas dit leur dernier mot. Microsoft, Yahoo ! et d’autres affûtent leurs armes. Selon l’hebdomadaire financier Barron’s, le cours Google pourrait encore perdre 50 % cette année. Nous voilà loin des prévisions à 600 dollars.

Sa position devient désormais difficile à tenir. D’un côté, Google ne doit pas cesser d’apparaître comme une société innovante, fourmilière dans laquelle naissent de lucratives idées. De l’autre, le moteur ne doit pas se disperser, et ne doit pas risquer, à trop vouloir s’étendre, de perdre l’équilibre. Google a toujours un peu du Google des débuts, mais dans le même temps, il fait partie de l’establishment. Auriez-vous imaginé, il y a quelques années, Google se lier avec une société aussi peu sexy que BearingPoint ?


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4 réactions à cet article    


  • brch90 (---.---.244.30) 15 février 2006 18:58

    Il faut arrêter de dire que Google sait des tas de choses sur je ne sais quoi - ce que personne ne dit jamais d’ailleurs, puisque personne ne sait ! Il est probable que personne ne sait quoique que ce soit mais il faut bien faire peur au gens ... cherchez à qui profite le crime ? Et en plus que voulez vous que Google sache ? Votre OS ? ou autre chose ? Google peut savoir si vous vous grattez le nez ou bien si vous buvez une bière ? pour le reste ils ont les fichiers qu’ils veulent, et les moyens pour les acheter. Votre numéro MAC ? et alors, votre FAI les connait également et doit même conserver (selon la loi) les traces de vos consultations sur Internet, alors l’anonymat, cela me fait bien rire ! Cela fait depuis le début du développement de l’Internet, il y a environ 10 ans pour sa plus grande vulgarisation, que tout le monde sait que le réseau n’est pas anonyme alors où est la nouvelle ?

    De plus Google est une entreprise, vous ne saviez pas ? et comme tout chef d’entreprise, celui qui détient les capitaux gère et donc dirige, vous comprenez ce que cela veut dire ? Si vous êtes patron de votre boutique, ce n’est pas au voisin de vous dicter ses volontés, vous êtes maître de votre argent - ou alors le régime politique a changé en occident et la technocratie étatique dirige tout : ça me rapelle l’URSS, bizarre ....

    Enfin comment voulez vous que le moteur de recherche vous donne les liens que vous souhaitez visiter si le Google ne peut pas lire le minimum de renseignements ? Votre langue, si vous utilisez Windows ou non etc ... Vous avez déjà vu un moteur de recherche qui lit dans les pensées ? Lorque vous interrogez un vendeur au magasin il doit quand même se renseigner un minimum pour savoir, par exemple, pour l’achat d’un vêtement, si c’est pour le travail, sortir, l’hiver, la couleur etc ... Non ?

    Que reproche t-on à Google, de chercher à connaître ses Clients et de les satisfaire ?


    • Neuromancer (---.---.44.5) 15 février 2006 19:05

      Au vu des récentes décisions de Google, il est clair que le moteur de recherche ne peut que baisser dans l’estime des internautes. Comment dire « Don’t be evil » et accepter la censure en Chine ?

      Google est devenu une entreprise de gros calibre, c’est elle qui mène le bal sur le net, et pas Microsoft. Mais la taille de plus en plus gigantesque de l’entreprise, et la pression de ses actionnaires vont les amener à revoir leur morale. Et les internautes vont revoir leur opinion. Quitte à aller sur de nouveaux moteurs de recherche, pourquoi pas emmené par la vague du logiciel libre.


      • Onesque Onesque 17 février 2006 12:11

        brch90, j’ai un peu de mal à suivre votre diatribe... On sait depuis longtemps que l’on n’est pas anonyme sur internet, les adresses IP (cf. ici, pour les commentaires), systèmes d’exploitation, navigateurs, etc, sont facilement connus des exploitants de sites Internet.

        Et donc selon vous Google serait une entreprise ? Suis-je bête, moi qui pensais qu’ils n’étaient que des philantropes...

        Les internautes ont de plus en plus peur de ce que Google sait sur eux, et il se trouve qu’analyser le contenu des emails que j’échange avec mes proches pour déterminer mes goûts ou mes centres d’intérêt n’est pas la même chose que de stocker quelque part l’information selon laquelle j’utilise tel ou tel navigateur. Ces systèmes sont automatiques, soit, mais si quelqu’un y pénètre, c’est une manifeste violation de la vie privée. Et pour répondre de façon pertinente à mes requêtes sur son moteur, Google n’a pas besoin de savoir quelle marque de vêtements je porte ou quel plat j’ai mangé ce midi.

        L’image de Google est en train de changer, c’est un fait, que cela vous plaise ou non :) Et si Wired titre là-dessus ou si l’envie me prend de rédiger un article à ce sujet, c’est pour réfléchir à ce fait, pas pour aborder le thème ô combien trollesque des « technocraties étatiques » :p


        • brch90 (---.---.183.231) 18 février 2006 14:02

          Hélas, oui si vous saviez le nombre de gens qui peuvent lire ce que vous faîtes sur Internet ... Envoyez une carte postale, c’est plus discret ! 8-)

          Etes vous certain que la personne qui vous a vendu un pantalon, par exemple, ou un livre ne va pas en parler à autrui ? (Cf les récentes tentatives pour Mr Bush d’avoir l’accès aux lectures bibliothécaires de ses compatiotes)

          Pour revenir à Google, une petite publicité à la télé, un peu plus d’ouverture, et il pourra réhausser son image pour les actionnaires et les utilisateurs. Google manque assurément de communication, mais hélas ils ne sont pas les seuls...

          Pour les - technocraties étatiques - qui vous ont choquées et vous ont semblés incompréhensibles, sachez que lorsqu’une entreprise atteint une certaine taille, il y a souvent interactions, hélas, c’est une vérité. Voyez Ms avec le gouvernement US etc ... Vous en savez autant que moi et l’énumération est inutile. Pourquoi les gens préfèrent-ils les logiciels type Linux ? Pensez-vous que l’on puisse cloisonner un problème de vie privée tel que celui-ci sans prendre en compte son environnement légal ? Vous soulevez une bonne question mais, pour ma part, je ne le pense pas. Voyez la Chine et Google.

          Au passage : on ne va pas être parano, n’est-ce pas ?, mais savez vous vraiment qui est derrière Linux, avez vous lu et compris toutes les lignes du code source ? Aucune ligne suspecte ? Voyez la dernière position de M. Linus - fondateur noyau Linux - pour la gestion des DRM pour le prochain noyau le Linux... Lorsque Linux ou un autre OS est utilisé par les gouvernement et/ou l’armée êtes vous certain qu’il s’agit du même qui est installé sur votre PC ? Aussi sécurisé ? Fin de parenthèse.

          Si Google est en position dominante c’est tout d’abord que ce moteur est simple d’utilisation, de plus d’autres se sont pas très clairs ni très pertinents. En outre les programmes type Copernic, qui interrogent plusieurs moteurs, ont été je crois - d’après mes souvenirs - plus ou moins jugé comme spyware, mais je n’en suis pas certain. Google n’en a pas l’exclusivité ! Il y surtout manque d’alternatives mais arrêtez de tirer sur la locomotive ! Pourquoi ne pas faire son propre moteur de recherche ?

          En bref l’image d’une entreprise se soigne et surtout dans une guerre commerciale avec les autres moteurs de recherche concurents. La communication a son importance surtout à l’aire de la bourse.

          PS :
          - Je précise tout de même que je travaille pas chez Google 8-)
          - Vous avez le droit,comme moi, de vous exprimer et de -faire un article -

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