A mon avis cet exploit est à placer au même niveau que ceux de pionniers de l’aviation :
- la maîtrise du vol : le premier vol plané par Otto Lilienthal. Il aurait effectué entre 1891 et 1896 deux mille vols planés depuis une colline artificielle à proximité de Berlin.
- la maîtrise la motorisation : bien que Clément Ader ait réalisé le premier vol motorisé en 1890 aux commandes de l"Eole, le premier vol motorisé réellement contrôlé d’un aérodyne plus lourd que l’air est attribué aux frères Wright avec le « Flyer », en décembre 1903. A cette époque le record d’Orville est de 284 mètres pendant 59 secondes !
- la maîtrise du décollage autonome : jusqu’à cette date les décollages se faisaient aidés d’un rail. En mars 1906, le premier vol autopropulsé est effectué par Traian Vuia sur 12 m et à 1 m d’altitude.
- le premier vol de plus de 24 heures a été réalisé le 28 octobre 1926, par Costes et Rignot à bord d’un Breguet 19, volant 5 396 km en 32 heures.
Et voilà où nous en sommes aujourd’hui : rééditer l’exploit en s’affranchissant des sources d’énergie terrestres pour la propulsion, grâce au soleil.
Il aura fallu sept ans à 50 ingénieurs et techniciens, soutenus par une centaine de scientifiques.
pour que le projet de Bertrand Piccard se concrétise. Le projet est dévoilé au grand public en 2007 sous le nom "Solar Impulse". L’objectif présenté est de traverser l’Atlantique dans le sillage de Charles Lindbergh avant de tenter un tour du monde.
En juin 2009 le prototype HB-SIA de Solar Impulse est inauguré à l’aérodrome militaire de Zurich.
L’avion, qui ressemble à un planeur, possède une envergure de 63,4 mètres (équivalente à celle d’un gros porteur ! ) pour un poids de seulement 1.6t ! Cet prouesse technique est rendue possible par l’utilisation d’un squelette ultra-léger en matériaux composites : des fibres de carbone tressées en nid d’abeille en plusieurs couches dont chacune ne pèse que 93 grammes au mètre carré. 12’000 cellules solaires de 130 microns d’épaisseur en silicium monocristallin recouvrent les 200 m2 des ailes comme une seconde peau. Les progrès dans la technologie des cellules et des batteries solaires ont été décisifs : comparées avec celles de 2003, les cellules actuelles ont un rendement qui est passé de 16 à 22% et elles sont deux fois plus minces. A quand la même chose sur tous les toits des maisons !
Le stockage d’énergie se fait par batteries au lithium ayant une capacité de 240 watt-heures par kilo. Les 70 accumulateurs pèse 400 kg. L’isolation thermique de l’appareil a été conçue pour conserver la chaleur émise par les batteries et garantir leur fonctionnement à -40 °C à 8 500 m.
Chaque moteur ultra-léger a une puissance maximale de 10 ch. Ils actionnent des hélices bipales de 3,5 m tournant entre 200 à 400 tr/min.
En avril 2010 le premier vol d’essai dure 87 min. De par sa faible vitesse, entre 43 et 70 kilomètres à l’heure, l’avion se révèle très sensible aux turbulences et aux rafales de vent, et vole souvent à la limite de décrochage, ce qui en rend le pilotage particulièrement délicat. Les commandes étant entièrement manuelles et transmises par câble, l’avion réagit donc très lentement. Un système d’alerte averti le pilote au cas où l’avion s’inclinerait de plus de 5%.
Le 7 juillet 2010, le prototype HB-SIA Solar Impulse est prêt pour le premier vol de 24h sans interruption, et uniquement mû à l’énergie solaire. Le pilote suisse André Borschberg décolle au petit matin à Payerne avec des conditions météorologiques idéales : le soleil au beau fixe lui permet de s’élever jusqu’à 8700 mètres d’altitude et d’accumuler suffisamment d’énergie solaire pour continuer son vol de nuit. Durant l’obscurité, l’avion redescend à 1500 m, en effectuant des rondes entre l’aérodrome de Payerne et le lac de Morat, à une vitesse d’environ 50 km/h, afin de préserver le maximum d’énergie.
Le 8 juillet 2010 au matin, le pari est réussi ! L’appareil est resté en l’air environ 26 heures et 9 minutes réalisant son vol de nuit sans problèmes.
La prochaine étape à suivre est un vol de 36 heures, pour prouver qu’il est virtuellement possible de rester perpétuellement en l’air avec pour seule énergie la puissance des rayons solaires. A terme, l’objectif est d’accomplir, avec une seconde version biplace un tour du monde en 20 à 25 jours et cinq étapes (soit 5 fois 5 jours et 5 nuits). Rendez-vous à partir de 2013 !