Un ballon dirigeable pour le haut débit ?
Les dirigeables remplaceront-ils bientôt les satellites ? Le projet X-Station consiste à construire un dirigeable capable de déployer le haut débit depuis une altitude de 21 000 m dans une région peu accidentée. Les concepteurs parviendront-ils à résoudre les défis techniques importants qui se présentent à eux ? Est-ce une solution pour les pays en voie de développement qui ne peuvent investir dans des réseaux classiques ? Où en est-on de ce projet et des autres expériences voisines ?
Un projet de distribution de haut débit internet à l’aide d’un dirigeable est assez inhabituel, mais cela est prometteur sur bien des points.
Depuis plus d’un an, des équipes de chercheurs suisses et anglais travaillent à la mise au point d’un projet X-Station (nom de code). Non... ce n’est pas un projet sorti d’un James Bond !
C’est un ballon dirigeable de 100 m de long qui, comme un satellite, permettrait de transmettre les services haut débit (voix sur IP, internet, voire la télévision sur internet) dans un rayon de 1 000 km, avec un relief assez faible. Sa taille est comparable à un édifice couché de 25 étages et il pèse 2 000 tonnes. En relief accidenté, sa couverture serait trois fois moindre. Il serait utilisé comme un relais-émetteur, pourvu de l’électronique nécessaire. Ne possédant aucune structure rigide à l’intérieur, il peut demeurer immobile grâce à des moteurs reliés à un GPS. La puissance nécessaire pour faire fonctionner les appareils est relativement faible, elle est fournie par des panneaux solaires qui sont installés au-dessus du dirigeable.
La X-Station ressemble à un gros cigare de plastique avec une double enveloppe (du litium au centre et de l’air autour). Au-dessous, est attaché un petit avion sans pilote, en fibre de carbone, avec un air de mini-navette spatiale. Celui-ci contient les antennes, les modems et éventuellement des caméras... Il sert surtout à maintenir la position de la station contre les vents d’altitude. Il peut se détacher et rentre seul sur Terre, lorsque le dirigeable arrive en fin de vie, probablement après cinq ans.
Ce projet doit faire face à de nombreux défis :
- l’isolation du ballon rempli d’hélium et du matériel embarqué ;
- ou encore la puissance des moteurs contre les vents qui peuvent atteindre des vitesses élevées en altitude ;
- la nécessité de garder la température de l’hélium relativement constante (les températures pouvant varier de 0 à 100° à cette altitude).
Le dirigeable présente un avantage par rapport aux satellites en ce qui concerne notamment le coût. Ces derniers sont jugés trop chers pour les satellites ! Leurs antennes ont, en plus, l’inconvénient de poser des problèmes aux populations qui en sont proches en raison des rayonnements qu’elles génèrent.
Par ailleurs, se pose la question de « comment relayer les signaux internet haute vitesse ou les communications sans fil sur les territoires comme les pays émergents qui sont dépourvus d’une infrastructure terrestres fiables ou dont la topographie pose des problèmes ? Le dirigeable serait bien utile dans leur cas. D’autant que cette solution serait « peu onéreuse, abordable et rapide », souligne Kamal Alair (autre responsable important du projet). Certains se demandent même « si l’avenir d’internet dans les pays en voie de développement passe par une flotte de ballons dirigeables ».
On imagine également que les militaires pourraient être intéressés par cette solution, notamment en raison du coût pour surveiller des territoires...
Où en est ce projet ?
L’été dernier, a été testé un prototype de 10 m de long par le Laboratoire de traitement des signaux de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne dont le Pr Jean-Philippe Thiran est le responsable du projet X-Station.
La prochaine étape devrait avoir lieu mi-décembre 2007 avec le vol d’un dirigeable de 30 m de long.
En 2008, on fera voler la version finale en principe au-dessus de la Suisse et de l’Afrique.
Le projet pourrait être commercialisé deux ou trois ans plus tard.
On estime qu’il faudrait trois X-Stations pour couvrir la Suisse et une quarantaine pour l’ensemble de l’Afrique. Le Sénégal et l’Algérie se sont montrés intéressés par ce système.
Est-ce le seul projet de dirigeable ?
Ce n’est pas un projet entièrement nouveau. Il y a eu des expériences de ce type dans le passé. La Nasa et le Japon ont été impliqués dans des projets similaires, mais ils les ont abandonnés, probablement pour des raisons de priorités (ou politiques ?). Les responsables du projet X-Station soulignent que leur projet prend en compte le progrès réalisés par les technologies ces dernières années, notamment dans le domaine des matériaux et des batteries solaires.
D’autres projets de moindre envergure existent actuellement notamment aux Etats-Unis et en Europe.
Aux Etats-Unis, la société Sanswire a mis au point un dirigeable (projet Stratellite) plus petit qui serait destiné à couvrir les grandes villes américaines, mais elle n’a pas reçu le feu vert de l’organisme fédéral en charge du trafic aérien aux Etats-Unis.
En Europe, il existe un autre projet : « le projet Capanina », financé par la Communauté européenne, avec treize partenaires européens et le Japon ; présenté comme une alternative des réseaux classiques de haut débit. Il s’agit d’un projet de distribution du haut débit à l’aide d’un ballon qui peut servir à fournir du haut débit aux régions isolées et rurales de toute l’Europe. Le débit entre le sol et les plates-formes aériennes pourrait atteindre 120 Mb/s. Fonctionnant grâce à des piles à combustible emmagasinant l’énergie solaire, les aéronefs décriraient des cercles autour d’un point fixe et couvriraient au sol une zone de 60 km de diamètre. Le service pourrait être rendu à des utilisateurs fixes, ou à des voyageurs assis dans un train. Le coût de l’infrastructure représente 1/10e de celui nécessaire à l’installation d’un satellite. La fin de l’expérimentation et la commercialisation sont prévues d’ici trois à cinq ans.
Ferdinand Zeppelin (dont il n’est pas nécessaire de rappeler le lien avec les dirigeables), mort il y a quatre-vingt-dix ans avait une profession de foi « il suffit d’y croire et cela réussira ».
NDLR voir également sur ce sujet les projets :
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