Pendant que la Grèce sert de prétexte à l’affolement sur l’euro et que les faits divers sordides sont érigés en messe médiatique compassionnelle, les chercheurs continuent leurs travaux et parfois, trouvent des choses intéressantes. La revue Nature Communications vient de publier les résultats d’une petite équipe de chercheurs américains ayant montré que la rétine humaine secrète une protéine douée de sensibilité à la lumière et au magnétisme. Selon ces chercheurs, cette découverte devrait inciter à développer les recherches sur la sensibilité humaine au magnétisme. On savait en effet que certains individus, par exemple des navigateurs polynésiens, peuvent parcourir des centaines de kilomètres dans un ciel aux astres cachés par les nuages en percevant, semble-t-il, le champ magnétique terrestre. Néanmoins, ces résultats ne sont pas probants. Plus généralement, la sensibilité humaine au magnétisme est un sujet peu pratiqué, très controversé et peut-être délaissé pour son côté aventureux rappelant les vieilles lunes et autres polémiques du temps de Messmer. C’est donc le moment de rouvrir le dossier, conclut Stephen Pepper avec ses deux collaborateurs.
La sensibilité au magnétisme, qu’on peut nommer « magnétropisme » car elle sert à l’orientation, est un phénomène très répandu, chez les végétaux mais aussi certaines espèces parcourant de longue distances, comme les oiseaux migrateurs ou cet étrange papillon baptisé monarque et qui peut parcourir des milliers de kilomètres en s’aidant du champ magnétique quand le ciel est voilé. Les biologistes attribuent cette faculté à une flavoprotéine, le cryptochrome, responsable également du phototropisme chez les plantes ainsi que chez nombre d’espèce dont la drosophile, fameuse mouche qui par la taille de ses chromosomes, se prête à des expériences diverses et notamment, des études transgéniques. Cette molécule, dont il existe deux types, rend compte à la fois de la sensibilité à la lumière mais aussi au géomagnétisme. Chez l’homme, le type 2 est dix fois plus exprimé que le type 1, dans les cellules rétiniennes. L’expérience a donc consisté à introduire dans une drosophile le gène humain hCRY2. Les résultats montrent que la mouche génétiquement modifiée possède alors la faculté de répondre à la présence d’un champ magnétique et que cette réponse dépend également de la lumière.
La prudence doit être de circonstance lorsqu’on interprète ce type de résultats. On est sûr d’une chose, c’est de la fonctionnalité du cryptochrome humain qui réagit au magnétisme mais dont la réaction fait l’objet d’une transduction que dans le contexte où cette protéine est assemblée dans l’architecture moléculaire et cellulaire de la mouche, tel une caméra qui ne livrera des images du métro que si elle est connectée au dispositif de surveillance avec des câbles adéquats. Car tout est question d’assemblage. Des papillons, des oiseaux, des mammifères comme le renard, ont cette sensibilité au magnétisme. On peut se demander alors si l’homme ou ses ancêtres possédaient cette sensibilité et dans l’affirmative, quand et pourquoi l’ont-ils perdue. Les darwiniens sauront répondre que cette propriété magnétosensible ne confère aucun avantage adaptatif. Pourquoi alors la rétine humaine secrète-t-elle encore deux types de cryptochrome ? Sans doute pour répondre à un ensemble de fonctions bien précises. Peut-être la relation avec le monde sensible et le sens de l’orientation ou tout simplement l’horloge circadienne. C’est certain, il y a encore de grandes inconnues en matière de connaissance du vivant. Seuls, ceux qui savent s’interroger obtiendront des réponses. Ensuite, d’autres investigations plus aventureuses pourraient être tentées et pourquoi pas un réexamen des idées sulfureuses de Messmer, avec l’étude des propriétés thérapeutiques du magnétisme dans des contextes à définir.
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a l’auteur j’hésite entre bien et beurk bien parce que sortir ces sujets du placard est une bonne chose beurk parce que franchement étudier la sensibilité humaine des mouches en bricolant de la génétique c’est n’importe quoi ..... la question importante a se poser n’est pas : a quoi nous sommes sensibles ? mais : comment accéder aux informations auquelles nous sommes sensibles ? bien sur on pourrait commencer par demander aux gens qui sont sensibles a des trucs comment ils font ....... mais c’est trop simple pour des scientifiques
Jean Mallaurie le fondateur des éditions « Terres humaines », racontait que les Inuits voyaient les lignes magnétiques sur le sol pour se diriger sur la banquise sans repères visibles, même avec du brouillard ou du blizzard .La géobiologie vous connaissez ?! Tout cas , je vous recommande de lire « Eglise romane , lieu d’énergie » de J Bonvin, et P Trilloux, aux éditions Dervy, Ainsi que le langage secret de la pierre et de l’eau de B Corentin aux mêmes éditions . Il est vrai qu’on ne peut pas tout prouver, mais la science ne découvre rien ! L’électricité et ses merveilles et la pollution éléctromagnétique ont endormis nos facultés. Cordialement
Synpa, mais les éditions Dervy ne se sont jamais signalées par leur rigueur scientifique... Je suis sûr qu’en cherchant bien (je n’en ai pas le temps ici) on peut trouver des publications de travaux plus crédibles. Le sujet vaut la peine qu’on s’y penche avec sérieux.
« Les darwiniens sauront répondre que cette propriété magnétosensible ne confère aucun avantage adaptatif. »
Sur ce sujet, un phénotype n’apportant aucun avantage sélectif peut très bien se développer (environ 50% de chance de subsister). C’est d’ailleurs le cas d’un grand nombre de caractères génétiques. Le Darwinisme est une ancienne théorie. La plupart des biologistes sont d’accord avec celle-ci mais des modèles mathématiques complètent la chose.
Je voudrais également faire remarquer qu’on parle ici de champs magnétique (champ terrestre) et non de champ électromagnétique (ondes radio). Cette découverte est très intéressante mais il ne faut pas la mélanger avec les autres études concernant les ondes de téléphones portables.
ceci me rappelle un sujet tel que celui-ci : peut-on voir sans voir ? Mais dans le traitement de ce sujet, il s’agissait plutôt de la perception du mouvement. La façon de traiter le sujet n’était évidemment pas close (sinon, ça se saurait..)
Vous nous ouvrez un nouvel éclairage (le terme est bien choisi) avec la magnétoception.
Je suis tombée sur un article sympa et facile à lire sur la magnétoréception directe et indirecte. La magnétoréception indirecte me semble assez bien étudiée et de nature à expliquer les intangibles parcours migratoires (des magnétorécepteurs distribués sur le corps). l’article ici
Les cryptochromes transducteurs de la magnétoréception, informant également l’horloge interne de la photopériode montre le lien étroit qui existe entre la perception du champ magnétique (à noter qu’il s’agit de très faibles champs - ceci pour ne pas refermer trop vite l’histoire des mobiles...une idée saugrenue mais il en faut pour inventer un futur : à utiliser peut-être sous une cagoule) et la mesure (le calcul interne) de la longueur d’onde de la lumière - la lumière étant de nature électromagnétique - créant une sorte de différentiel obligatoire pour percevoir le champ magnétique.
Ainsi pour poursuivre le sujet inachevé, on pourrait voir sans voir, pourvu que le nerf optique soit capable de transmettre ces signaux.