Votre analyse n’est pas sans pertinence, même si je ne souscris pas, dans une certaine mesure, à votre jugement (évitons, par exemple, de moraliser l’art, même si je vous donne raison quant aux attitudes "clichés" que vous dénoncez dans 300). Toutefois, permettez moi de me soustraire aux débats en cours, pour apporter une rectification qui me semble tout à fait nécessaire, en tout cas suffisament pour m’inciter à prendre mon clavier.
Vous écrivez ceci : "les Spartiates, bodybuildés à souhait et au look de Chippendales arborant fièrement leurs tablettes de chocolat, font sérieusement penser au mythe du surhomme de Nietzsche récupéré sommairement par les nazis et autres fachos" (c’est moi qui souligne). Concernant votre référence à Nietzsche, quelques remarques d’importance :
1° Détail lexical en apparence, mais qui, puisque l’on parle de Nietzsche et de philosophie, relève plus de la catégorie de pensée, et se doit par conséquent d’être corrigé : vous parlez du "mythe" du surhomme. Mais si, effectivement, l’idéologie nazie a "mythifié" le surhomme tel que l’a pensé Nietzsche, Nietzsche lui-même n’en faisait pas un mythe, pas même au sens platonicien du terme. Il en résulte des différences non négligeables entre les deux.
2° Si, effectivement, le corps acquiert une dimension fondamentale dans la pensée de Nietzsche, qui y voit "une grande raison", écrivant par exemple, quelques lignes plus haut dans le même passage ("Des contempteurs du corps" dans Ainsi Parlait Zarathoustra) "l’homme éveillé à la conscience et à la connaissance dit "je suis tout entier corps, et rien d’autre ; l’âme est un mot qui désigne une partie du corps", ce corps dont il est question n’est en aucun cas de manière spécifique des corps de chippendales bodybuildés que vous décrivez. Il s’agit du corps pris de manière générale, quel qu’il soit.
3° Enfin, prennant en compte les deux premières remarques : vous parlez du "mythe du surhomme de Nietzsche récupéré sommairement par les nazis". Remplacez, de grâce, "sommairement" par "à tort" "faussement", et "honteusement". La récupération de Nietzsche par les nazis est avant tout le résultat de contresens flagrants dûs à une mauvaise foi et une malhonnêteté intellectuelles certaines. Parmi lesquels, relevons :
- le coup du mythe : le mythe est une récupération proprement nazie, au service d’une propagande idéaliste (à laquelle se rattache ce culte de l’athlétisme ...)
- et plus précisément le coup du mythe du surhomme : et il s’agit d’autant plus d’un mythe dans l’idéologie nazie, que le surhomme nietzschéen ne renvoie pas à une sorte de "superman" accompli, atteignable, état stable et indépassable, comme semble vouloir le faire croire le nazisme en le situant dans l’idéal aryen. Nietzsche ne cherche pas des surhommes, mais plus exactement des "pont[s] vers le surhumain" (avec toute la richesse de pensée qu’introduit la nuance).
Inutile de développer plus outre ces quelques considérations, déjà bien assez longues relativement à la simple allusion que vous faites à Nietzsche. Mais cet auteur à été suffisament insulté par le nazisme pour que de tels préjugés demeurent dans les esprits.