Je vous prie de signaler à vos lecteurs le récent livre de Michel Corday, les Hauts Fourneaux, qu’il importe de connaître.
On y trouvera sur les origines et la conduite de la guerre des idées que
vous partagerez et qu’on connaît encore trop mal en France ; on y
verra, notamment (ce dont nous avions déjà tous deux quelque soupçon)
que la guerre mondiale fut essentiellement l’oeuvre des hommes d’argent ;
que ce sont les hauts industriels des différents Etats de l’Europe qui,
tout d’abord, la voulurent, la rendirent nécessaire, la firent, la
prolongèrent. Ils en firent leur état, mirent en vie leur fortune, en
tirèrent d’immenses bénéfices et s’y livrèrent avec tant d’ardeur,
qu’ils ruinèrent l’Europe, se ruinèrent eux-mêmes et disloquèrent le
monde.
Ecoutez Corday sur le sujet qu’il traite avec toute la force de sa
conviction et toute la puissance de son talent. — » Ces hommes-là, ils
ressemblent à leurs hauts fourneaux, à ces tours féodales dressées face à
face le long des frontières, et dont il faut sans cesse, le jour, la
nuit, emplir les entrailles dévorantes de minerai, de charbon, afin que
ruisselle au bas la coulée de métal. Eux aussi, leur insatiable appétit
exige qu’on jette au feu, sans relâche, dans la paix, dans la guerre, et
toutes les richesses du sol, et tous les fruits du travail, et les
hommes, oui, les hommes même, par troupeaux, par armées, tous précipités
pèle-mêle dans la fournaise béante, afin que s’amassent à leurs pieds
les lingots, encore plus de lingots, toujours plus de lingots. Oui,
voilà bien leur emblème, leurs armes parlantes, à leur image. Ce sont
eux les vrais hauts fourneaux ! (page 163).
Ainsi, ceux qui moururent dans cette guerre ne surent pas pourquoi ils
moururent. Il en est de même dans toutes les guerres. Mais non pas au
même degré. Ceux qui tombèrent à Jemmapes ne se trompaient pas à ce
point sur la cause à laquelle ils se dévouaient. Cette fois, l’ignorance
des victimes est tragique. On croit mourir pour la patrie ; on meurt
pour des industriels.
Ces maîtres de l’heure possédaient les trois choses nécessaires aux
grandes entreprises modernes : des usines, des banques, des journaux.
Michel Corday nous montre comment ils usèrent de ces trois machines à
broyer le monde. Il me donna, notamment, l’explication d’un phénomène
qui m’avait surpris non par lui-même, mais par son excessive intensité,
et dont l’histoire ne m’avait pas fourni un semblable exemple : c’est
comment la haine d’un peuple, de tout un peuple, s’étendit en France
avec une violence inouïe et hors de toute proportion avec les haines
soulevées dans ce même pays par les guerres de la Révolution et de
l’Empire. Je ne parle pas des guerres de l’ancien régime qui ne
faisaient pas haïr aux Français les peuples ennemis. Ce fut cette fois,
chez nous, une haine qui ne s’éteignit pas avec la paix, nous fit
oublier nos propres intérêts et perdre tout sens des réalités, sans même
que nous sentions cette passion qui nous possédait, sinon parfois pour
la trouver trop faible.
Michel Corday montre très bien que cette haine a été forgée par les
grands journaux, qui restent coupables, encore à cette heure, d’un état
d’esprit qui conduit la France, avec l’Europe entière, à sa ruine
totale. » L’esprit de vengeance et de haine, dit Michel Corday, est
entretenu par les journaux. Et cette orthodoxie farouche ne tolère pas
la dissidence ni même la tiédeur. Hors d’elle, tout est défaillance ou
félonie. Ne pas la servir, c’est la trahir. »
Vers la fin de la guerre, je m’étonnais devant quelques personnes de
cette haine d’un peuple entier comme d’une nouveauté qu’on trouvait
naturelle et à laquelle je ne m’habituais pas. Une dame de beaucoup
d’intelligence et dont les mœurs étaient droites, assura que si c’était
une nouveauté, cette nouveauté était fort heureuse. » C’est, dit-elle,
un signe de progrès, et la preuve que notre morale s’est perfectionnée
avec les siècles. La haine est une vertu, c’est peut-être la plus noble
des vertus. »
Je lui demandai timidement comment il est possible de haïr tout un peuple :
— Pensez, madame, un peuple entier, c’est grand… Quoi ? Un peuple
composé de tant de millions d’individus, différents les uns des autres,
dont aucun ne ressemble aux autres, dont un nombre infiniment petit a
seul voulu la guerre, dont un nombre moindre encore en est responsable,
et dont la masse ignorante en a souffert mort et passion. Haïr un
peuple, mais c’est haïr les contraires, le bien et le mal, la beauté et
la laideur. »
Quelle étrange manie ! Je ne sais pas trop si nous commençons à en
guérir. Je l’espère. Il le faut. Le livre de Michel Corday vient à temps
pour nous inspirer des idées salutaires. Puisse-t-il être entendu !
L’Europe n’est pas faite d’Etats isolés, indépendants les uns des
autres. Elle forme un tout harmonieux. En détruire une partie, c’est
offenser les autres.
Notre salut, c’est d’être bons Européens. Hors de là tout est ruine et misère.
Salut et fraternité,
Les oignons, c’est surtout super pour la cuisine. Je cuisine tout avec des oignons
Pour ce qui concerne les piqûres d’insectes, je suis un peu dubitatif. J’ai été piqué par une guêpe vers 16h, je n’ai pas l’impression que l’oignon ait changé quoi que soit à la douleur que je ressent encore maintenant (elles sont méchantes, les guêpes qu’on réveille en plein hiver)