L’ennui ennemi de l’école et des apprentissages et de la réussite des élèves ? Sans doute et cet ennui ne date pas d’aujourd’hui et ce qui se passe à l’extérieur de la classe a souvent semblé plus attirant et sujet à rêverie (cf le poème de Prévert « La page d’écriture »). Ce n’est pas en ajoutant des après-midis de sports divers et variés qu’on s’ennuiera moins le matin dans les cours et que le niveau scolaire va s’élever. Si une activité sportive est équilibrante pour tout être humain, elle ne promet pas de transformer l’ignorant ou le crétin en puits de science ou en être intelligent : on connaît le fameux « no sport » de Churchill ; le jogging permet-il de gouverner mieux ? les sportifs de très haut niveau sont-ils tous régénérés au plan intellectuel par l’intensité de leurs entraînements ? La démonstration n’est pas évidente.... et la critique contre le sport existait déjà dans la haute Antiquité (grecque !!!) Je suis devenue professeur en 1972 (retraite en 2008) : j’ai vu se succéder les réformes dont certaines vraiment calamiteuses, avec de façon systématique une érosion des heures consacrées aux apprentissages fondamentaux : on ne fait pas du français pour devenir un littéraire ; on apprend sa langue pour pouvoir devenir un être autonome et non pas une « zézette » qui ne sait pas remplir sa feuille de sécu ! C’est le minimum. Et sur cet apprentissage là, le niveau a terriblement baissé. Les enquêtes les plus récentes sont formelles là-dessus. Les élèves ne sont pas moins intelligents. Ils ont d’autres compétences qui n’étaient pas celles de leurs aînés il y a 40 ans. Par ailleurs, l’enseignement et son contenu sont devenus prétentieux. Beaucoup d’ouvrages, très riches en illustrations (les enfants sont sensibles aux images dit-on.... mais beaucoup n’arrivent pas à les décrire faute de vocabulaire !), sont boursouflés de pédantisme et de vanité à force de vouloir faire de la pseudo-pédagogie. Ouvrages de Trissotin assurément ! D’ailleurs, ces manuels écrits, puis choisis par des enseignants, sont très souvent dédaignés, dans les cours, par les maîtres eux-mêmes qui leur opposent les sacro-saints polycopiés ! Ah ces moutardiers qui se prennent pour le pape.
J’ai été une enseignante (Hist-Géo) heureuse, jamais déçue par ses élèves qu’ils aient été bons ou moyens, mauvais ou géniaux, pitres ou sérieux. Un adolescent assis toute une journée devant des profs..... bons ou moyens, mauvais ou géniaux, pitres ou sérieux accomplit un tour de force certain alors que la société les attend dehors avec des tentations plus captivantes. « Vous vous ennuyez en classe ? » « Ça dépend des cours et ça dépend des profs ! » N’en est-il pas de même pour nous tous ? Jeune prof, j’ai cru que j’allais tout révolutionner et que mes élèves seraient les meilleurs (« MES » élèves !). J’ai très vite deviner la fausse route. Enseigner exige donc rigueur, détermination et humilité surtout. Par contre j’ai su tout de suite ce que je ne voulais pas : qu’ils s’ennuient.... ce que j’avais si mal vécu, moi-même. Par ailleurs, est-il bien raisonnable de penser qu’il suffit d’inventer UN moule et que celui-ci va formater chacun des sujets scolarisés selon un « idéal ». Quel idéal ? Chacun a en soi des compétences, voire même des trésors. L’école n’est pas toujours le lieu le plus adapté pour que la fleur s’épanouisse en totalité. S’il y a réforme à faire, c’est au niveau du primaire qu’elle est à entreprendre. Les errements pédagogiques dans le primaire sont la racine de bien des échecs en tout genre (ce n’est pas nouveau : une littérature abondante, d’hier et d’aujourd’hui, existe sur le sujet. Si l’on veut soigner l’arbre, pulvériser quelques produits « magiques » sur les feuilles du second degré, ne suffira certainement pas.