Peut-être qu’une dose de manipulation est effectivement nécessaire à toute élection : il s’agit bien évidemment de séduire les électeurs.
Ce qui me gène dans le cas de Nicolas Sarkozy, c’est qu’il va plus loin que la simple séduction. d’abord, il utilise des notions ou des registres à des fins de bons mots : « nous n’avons pas inventé la sloution finale », « le travail, c’est la liberté », « on n’égorge pas le mouton dans la baignoire », etc... Et ce goût pour l’image douteuse, on n’a pas hésité précédemment à la reprocher à d’autres. Pourquoi ? Parce qu’elle drague le fond de la mémoire collective, elle séduit en invoquant les vieux démons, alors que la politique, au contraire, doit être faite de distance et d’apaisement des passions !
C’est bien là, la force médiatique de Nicolas Sarkozy. En se posant en victime depuis le soir du premier tour, en grand pourfendeur de toutes les injustices, en porte-parole des « ce que je pense tout bas... » et surtout sans plus avancer d’un pouce sur ses propositions, il a rendu impossible toute attaque contre lui ! Toutes les critiques sont renvoyées comme des attaques personnelles et au-delà comme des attaques à ses électeurs, puisqu’il les a si bien compris, lui, le tout petit que personne ne voulait écouter.
Quelle formidable tour de passe-passe ! Réussir à faire croire que l’on est humble et modeste, avec des goûts simples, voire que l’on a enduré toutes les difficultés de la vie, quand on a passé son enfance dans un immeuble chic du XVIIe, qu’on est maire de Neuilly et que ses grands amis sont parmi les personnes les plus riches de France.
Une stratégie marketing aussi forte que celle de Bush !
Je vous renvoie à un excellent article à ce sujet.
Allez, juste pour rire (amer), prenons ses mots pour nos idées : « Mais enfin qu’y a-t-il de mal à dire que l’on n’est pas d’accord ou que l’on est choqué des dérives du discours d’un autre candidat ? C’est quand même incroyable que dans ce pays on ne puisse plus critiquer la politique de ses adversaires sans être taxé d’intolérance. Moi, je veux être celui qui rétablit la vérité ! » etc...
Vous voyez sa rhétorique est adaptable à tous les discours. Elle marche pour tout. Elle est interchangeable. Le tout est de mettre dans ce beau paquet les humeurs du moment, ce que le public est prêt à entendre ou veut entendre !
Délégué de parents dans un quartier chic de Paris (on ne peut pas dire que les problèmes financiers y soient criants...), je veux témoigner de l’impossibilité de faire intégrer des enfants handicapés dans l’école de ma fille, par « manque de moyens » et ce en dépit de la loi !
Franchement, je crois que dans cette affaire du handicap, la manipulation n’est pas là où on le pense...
On s’interroge sur l’oportunité ou l’oportunisme de la colère de Ségolène Royal, mais personne ne s’interroge sur qui a mis le feu, mis le sujet sur la table. Qui est en fait le pyromane ? Nicolas sarkozy avait certainement parfaitement anticipé et calculé la réaction de la dame. Et c’est pour cela que l’analyse de Miller m’intéresse : Sarkozy possède l’art d’amener les sujets pour les détourner à son avantage, sans vergogne.
Dans ce cas précis, il est resté étonnamment humble et calme... après avoir attiré la sympathie par l’évocation des enfants handicapés, il s’est uniquement posé en victime. Il n’a même pas opposé l’argument de la loi de 2005. Il a fallu que ses collègues le fassent à sa place, le lendemain.
Franchement, quel cynisme dans la manipulation !
Voilà donc de quoi occuper l’espace médiatique en cette fin de campagne. Voilà comment occulter, par un sujet grave et sensible que l’on a détourné à son profit, l’ensemble des autres questions !
Et les déclarations des Associations expliquant que la loi , n’est rien sans les conditions de son application demeurent à peine audibles... comme par hasard.
Bien évidemment qu’ils sont manipulateurs !
Ce qui m’agace, c’est que l’on s’acharne sur cette colère, alors que bien pire a été dit ou fait, sans que personne (ou presque) ne lève le petit doigt...