René Jam inspecteur d'académie - inspecteur pédagogique régional à la retraite membre fondateur avec Francis José-Maria du projet Eau partagée et co-rédacteur de l'ouvrage - L'eau partagée, une démarche ouverte d'EEDD
votre commentaire réagit à l’émotion exprimée par Roland Gérard, sans connaissance de son objet, puisqu’aucun lien valide ne permettait d’avoir accès au projet de l’eau partagée. Cet objet fantasmé vous a conduit à une critique générale de l’institution scolaire et je partage cette analyse s’agissant de certaines dérives des pratiques qu’il faut malgré tout relativiser. Par contre je ne souscris pas du tout à votre proposition d’un retour crispé sur les « fondamentaux » - lire, écrire, compter - qui ne seront efficacement construits que si la curiosité et la joie d’apprendre accompagnent la relation éducative. Ayant eu en responsabilité, pendant dix années, l’adaptation et l’intégration scolaire des enfants handicapés et/ou en échec scolaire du Var, je retiens de cette belle aventure humaine qu’il ne sert à rien de proposer, pour maitriser ces fameux fondamentaux « toujours plus du même », - difficultés en mathématique, davantage d’exercices de mathématiques et cela pou l’orthographe, la lecture - car cela aggrave les difficultés d’apprentissages. Par contre faire le détour par des « situations de vie » qui donnent sens aux apprentissages permet de remobiliser le désir d’apprendre et l’estime de soi.
Dans le contexte de l’eau partagée et s’agissant de la situation de blocage que ce projet rencontre au niveau de la circonscription qui couvre son territoire, je porte à votre connaissance, pour information, la LETTRE OUVERTE que j’ai adressée à monsieur le directeur académique du Var. Peut-être aurez-vous la patience de la lire :
"Monsieur le directeur académique,
Sous le titre, Eau partagée : « un projet injustement censuré », le quotidien Var matin, dans son édition du 13 février 2013, se fait l’écho d’un événement contemporain de l’arrivée de l’inspecteur de l’éducation nationale Bernard Revest sur la circonscription de Ste maxime, événement qui altère l’offre éducative de l’institution scolaire et participe de la souffrance d’un certain nombre d’enseignants et de parents d’élèves. Pourtant ce projet de l’eau partagée qui depuis 1996 s’est construit et enrichi sous la responsabilité pédagogique de l’éducation nationale, en témoigne le coffret multimédia : l’eau partagée, une démarche ouverte d’éducation à l’environnement pour un développement durable que nous avons co-écrit avec monsieur Francis José-Maria, directeur du SIDECM, fait l’objet, au plus haut niveau de la hiérarchie de l’éducation nationale, d’un intérêt plusieurs fois renouvelé, y compris par vous-même. Le rappel que vous faites au journaliste de VAR matin, des procédures administratives qui s’appliquent à toute collaboration avec l’institution ont toujours été et sont toujours scrupuleusement respectées par le projet de l’eau partagée. Mais cela vous ne pouvez pas l’évaluer puisque votre collaborateur, en responsabilité sur la circonscription, n’a jamais pris le temps d’aller sur le terrain à l’occasion des sorties des enseignants, ni a daigné prendre connaissance de l’important travail de mise en conformité avec les exigences de l’institution scolaire, du SIDECM, de ses animateurs et de l’ensemble des partenaires associés à cette belle entreprise éducative. Le projet de l’eau partagée s’inscrit prioritairement dans le champ éducatif, partagé entre de nombreux acteurs : les parents, l’école, les collectivités locales et le monde associatif... qui ont en charge le développement personnel de l’enfant et la conquête de son autonomie pour une future responsabilisation éco citoyenne. Ce champ est remarquablement défini par la circulaire de l’éducation nationale parue au BO n°41 du 10 novembre 2011. Il suffit pour s’en convaincre de prendre connaissance, entr’autres, des magnifiques travaux des enseignantes de l’école de La Croix Valmer, mesdames Josiane Gineste et Marie Curiat dans Le Jeu de la porteuse d’eau, du CE2 de madame Roseline Baret de Malaspina avec le Loto des senteurs, et du projet des CM2 de l’école Plein soleil, élèves de Madame Yvonne Gély : sauvons les tortues d’Herman, projets qui ont tous accompagné et prolongé les sorties de terrain...
L’exigence éducative de notre projet, même si elle contribue à le rendre plus efficace, ne se confond pas avec le champ de l’enseignement disciplinaire des sciences qui relève des seules compétences et missions de l’éducation nationale. Le projet de l’eau partagée, par sa structure globale et transdisciplinaire et la cohérence de sens qu’il instaure entre le cadre formel de l’école, le cadre non formel des sorties de terrain et le cadre informel de l’engagement solidaire associatif, favorise sans aucun doute, en contextualisant les apprentissages, la transmission des savoirs scientifiques. Mais il ne se limite pas à cela et sa finalisation est autre. Ces moments éducatifs privilégiés sont d’une rare richesse parce qu’ils ouvrent l’école sur la vie du territoire et offrent ainsi aux enfants et à leurs enseignants des situations de vie donnant sens aux attitudes éco citoyennes qui sont sollicitées. Aujourd’hui ils apparaissent comme un antidote au marketing effréné d’un monde technique et virtuel qui conditionne et aliène les consciences citoyennes, solidaires et responsables de nos enfants, consciences en construction et lieu prioritaire d’investissement de l’Education.
Apprendre à penser plutôt que quoi penser, n’est-ce pas là une magnifique opportunité de collaboration éducative au service exclusif de nos enfants et d’une société respectueuse du vivant, solidaire et responsable qu’il nous reste à construire ?
Je conclurai cette lettre ouverte par un extrait de l’homme révolté de Camus, cité par Roland Gori dans son dernier ouvrage : La fabrique des imposteurs :
« Tel est le message de La Boétie : c’est l’amitié qui vient faire objection à la pensée conformiste des « tyranneaux ». Ce qui est aussi bien l’autre nom de l’amour. C’est par l’amitié et l’amour, éprouvés dans la « fraternité mélancolique » des humains, que nous sommes conduits à l’inservitude volontaire ; ainsi, le « mal qui éprouvait un seul homme devient peste collective. Dans l’épreuve quotidienne qui est la nôtre, la révolte joue le même rôle que le »cogito« dans l’ordre de la pensée : elle est la première évidence. Mais cette évidence tire l’individu de sa solitude. Elle est un lieu commun qui fonde sur tous les hommes la première valeur. Je me révolte, donc nous sommes ».
En vous remerciant pour l’attention que vous voudrez bien porter à cette lettre ouverte je vous assure monsieur le directeur académique de ma sincère considération.
« Les nombreuses réactions à l’article de Roland Gérard montrent à l’évidence que nous touchons là à une question sensible : L’éducation nationale, comme son nom l’indique, a-t-elle vocation, avec d’autres - les parents, les collectivités locales, les associations, la société civile - à participer à l’action éducative des enfants qui lui sont confiés ou doit-elle se contenter d’assumer exclusivement et le plus efficacement possible, sa mission d’enseignement ? Vieux débat…
Avant d’exprimer mon point de vue sur cette question et préciser certains éléments du projet de l’eau partagée dont il est question dans cet article, je voudrais rappeler deux préalables à toute communication authentique :
- Le premier relève de la sémantique générale et nous apprend, avec Korzysbski, que »le mot n’est pas la chose, la carte n’est pas le territoire".
- Le second, corollaire du premier, rappelle l’exigence d’une éthique du dialogue fondée sur une écoute attentive et respectueuse, qui nous invite à éviter les jugements à l’emporte-pièce, sur toute action, en l’occurrence, ici, un projet d’éducation à l’environnement de plus de vingt ans de pratique coopérative, sans le connaitre - En effet Gérard Roland a proposé un lien internet obsolète.
Etant, avec Francis José-Maria, co-fondateur de ce projet et co-auteur de l’ouvrage multimédia : L’eau partagée, une démarche ouverte d’éducation à l’environnement pour un développement durable, je vous propose les liens valides qui vous permettront de prendre connaissance de ce témoignage vivant, de sa généalogie et de ses ancrages théoriques et vous permettra ainsi, en connaissance de cause, de construire votre commentaire contextualisé pour enrichir ce débat essentiel. A titre d’exemple vous pourrez consulter le compte-rendu des journées du Rayol du 5 et 6 juin 2013, qui venaient conclure, pour le réseau des écoles associées de l’UNESCO et celui des écoles des réserves de biosphère, une année de projets centrés sur la coopération dans le domaine de l’eau.