Hum, ça me revient à l’esprit. Il y a à peu près cinq ans à Bruxelles, j’ai été étonné de retrouver le concept de la fusion nucléaire, notion que je connaissais via les bandes dessinés de Jean-Pierre Petit.
J’étais alors fier de connaître les rudiments, sans devoir avoir recours aux panneaux explicatifs, du procédé de la fusion des atomes.
Il fut un temps, un immortel taoïste nous aurait apprit à percevoir le sans-forme par l’humour, le bon sens, et un peu de
science.
Un grand merci à Jean-Pierre Petit. L’aventure ineffable de
son passage sur notre planète bleue sera transmise, à n’en pas douter, à mes enfants ;
avant même qu’ils aient appris le théorème de Pythagore !
Je ne suis pas une lumière, loin de là, mais je ne suis pas non plus
dupe.
Je n’avais, à l’époque, pas connaissance des
travaux de Jean-Pierre Petit. Si ma mémoire ne me dit pas de bêtise, il n’avait
pas encore mené d’offensive sérieuse contre le projet à ce moment là.
Mais si Jean-Pierre Petit n’avait
pas été là, qui l’aurait fait ?
Imaginons le futur dans quelques dizaines de
décennies. Non, ce n’est pas une dystopie, mais peut-être une utopie. La
planète est décimée, dans le meilleur des cas, non pas par le nucléaire, mais
par la pauvreté, la rareté des ressources, la soif. Notre planète bleue
pourrait aussi, éventuellement, avoir été incendiée par nos bombes « vertes ».Les
uns auront réussi à asservir complètement les autres. Cherchant un modèle à
suivre, un ancêtre illustre, un mythe dans lequel s’identifier pour se
reconstruire, le bas peuple cherchera alors l’histoire d’un homme
extra-ordinaire, afin de rendre plus doux leur passage sur cette terre.
Dans les décombres, quelqu’un trouvera le
serveur du site internet de Jean-Pierre Petit. Et dans le coin chauffé des
maisons troglodytes, on narrera en chanson les fabuleuses histoires de Petit,
l’homme-poisson qui a réussi à toucher les étoiles.( En aparté, cette fable
ressemble étrangement à celle du légendaire Zhuangzi... ) Seul contre tous,
Petit s’est dressé contre une société lobotomisée par les armes, qui ne savait
plus réfléchir, alors qu’il avait les clefs, ou du moins le cerveau pour les
produire. À quelle porte était destinée ces clefs ? Ces clefs ouvraient la
salle du Temps, du vol interstellaire, et donnaient accès aux steppes infinies
de notre coquillage inter-galactique...
Alors, les gens invoqueront le spiritus de
Petit, comme nos ancêtres les Celtes et les Chinois le faisaient jadis, en
donnant des offrandes et en faisant des libations. Par sa Vertu devenue divine,
on lui demandera de pacifier les relations entre les puissances naturelles,
capricieuses, et le monde des hommes, si fragile. On cherchera à imiter le mode
d’action de Petit, ses singeries, sa curiosité illimitée, sa vision artistique
de la science. On lira assidument les artéfacts papiers de Anselme Lanturlu, le
disciple préféré de Petit.
Retournons près de cinq années en arrière. Dans la fleur de l’âge,
je m’invite à Bruxelles, en charmante compagnie, découvrir cette bourgade ; il
faut le dire, bien plus respirable que Paris. Après avoir admiré les trésors
alchimiques de la Grand-Place, nous sommes allés nous soûlé, casque sur les
oreilles, dans le musée des instruments de musique. Puis, flirtant dans un parc
ombragé de la capitale, on est tombé sur un quartier d’exposition sur I.T.E.R.
Entrée gratuite, installation digne d’une attraction
du Futuroscope : larges panneaux stylisés explicatifs, maquettes, consoles
ludiques expérimentales, vulgarisation du projet dans un court métrage de 20
minutes en 3D etc. Il y avait une chambre secrète dans un coin où il y avait
une boule en verre d’un mètre de diamètre, incrusté dans une console, qui
produisait des filets électriques au contact des doigts, comme sur les lampes
de madame Irma. Le coin photo ? L’énorme panneau qui reproduisait la chambre en
forme de donuts servant à faire circuler le plasma. Je me souviens aussi avoir
fait du vélo d’appartement, avec un tableau d’une dizaine d’ampoule électriques
comme guidon ; quand je pédalais les ampoules s’allumaient. Magique ! Et
pourtant.
J’étais encore jeune, mais pas encore tout à
fait con. Les propos des intervenants « experts » sur place, pour nous
vanter les mérites de leur machine révolutionnaire, sonnait terriblement faux.
Le film en 3D était tout simplement ahurissant. Il s’agissait d’une bande de
personnages héroïques inspirés des plus mauvais dessins animés qui m’expliquait
le monde. Je me suis retrouvé comme un gamin de 6 ans d’âge mental devant son
cartoon en trois dimensions. Ce court-métrage nous a expliqué que les problèmes
de la terre entière ont été résolus par les scientifiques, qui ont enfin réussi
à « mettre le soleil en bouteille ». S’en suivait une explication
technique de la machine, mentionnée de façon ludique, qu’un enfant de 8 ans
pouvait comprendre. Je me souviens encore clairement quand la séance s’est
terminée, et qu’on rendait nos lunettes, d’avoir vraiment eut le rire jaune. Cela
ne tenait tout simplement pas debout.
Je voudrais commencer par tirer mon chapeau à Jean-Pierre Petit.
Et de rappeler qu’il est de la civilité la plus élémentaire d’être respectueux ; surtout à l’égard de nos aînés.
L’implication et le sérieux dont fait preuve Mr Petit à l’égard de son rôle de citoyen est exemplaire. Mener une telle activité bienveillante à l’attention de tous, et ce depuis tant d’années, au dépend de son propre confort, tient vraiment à ce qu’on peut appeler de la virtus. La « force virile » dont Mr Petit fait preuve, notamment dans la pertinence de ses analyses scientifiques, n’a hélas rien d’ordinaire.
J’ai bien peur que la longévité de Mr Petit — cela risque d’en agacer certains — ne fait que commencer. L’âme de Mr Petit est, à 78 printemps, encore fraîche comme la rosée du matin.
Mais avant d’expliquer pourquoi, laissez-moi vous raconter une histoire.