Les Gilets jaunes ne sont que l’expression de ces dysfonctionnements dans
une démocratie où le politique a failli à les représenter. D’ailleurs ils ne
revendiquent rien de particulier d’où les difficultés que rencontre le
gouvernement à éteindre le feu avec des mesures qui resteront sans effet
puisqu’il s’est lui-même enfermé dans une lecture de revendications
catégorielles, ce que relais les médias sur leur plateau : "mais alors
vous voulez quoi pour arrêter le mouvement ?". Les Gilets jaunes ne
veulent rien ou bien veulent tout selon comment on voit les choses (tout rien
d’un point de vue logique). Ils sont une forme de représentation de la
population qui dénonce les dysfonctionnements injustes de notre société et qui
demande légitimement à ce que le système fonctionne normalement pour qu’il soit
soutenable : que le travail permette aux gens de vivre dignement, que le
pouvoir législatif représente réellement le peuple dans toute sa diversité, que
l’exécutif propose et applique des politiques justes (au lieu de ne bénéficier
toujours qu’aux mêmes), que l’école, l’éducation nationale, l’enseignement
supérieur, recommence à former tout en assurant l’égalité des chances (et la je
suis en désaccord avec ceux qui disent que les lycéens ou étudiants ne sont pas
concernés par le mouvement, bien au contraire), qu’on arrête de manipuler
l’opinion en instrumentalisant les causes (écologie, transition énergétique,
sécurité routière, immigration, etc.) pour des intérêts qui n’ont rien à voir,
qu’on mette un terme aux exactions envers les plus modestes ou les gens qui
n’ont pas d’autres choix (exemple le scandale des frais bancaire, le chantage à
l’emploi, la taxe écologique sur le diesel), qu’on cesse de privatiser la chose
publique - qui représente le bien commun des français - pour permettre aux
copains de se faire toujours plus de fric (française des jeux, aéroports,
autoroutes, etc.). Rappelons à ce propos que les services publics sont la seule
richesse de ceux qui n’ont rien, au delà de ça c’est le patrimoine et la vertu
du modèle français. Tous les français qui ne le voient pas encore le
comprendront malheureusement trop tard, quand par exemple l’hôpital sera mort,
que la santé sera privatisée et qu’on vous demandera de sortir votre carte
bleue avant de vous accepter aux urgences ; quand l’Université ne sera plus
gratuite et qu’on demandera aux parents de payer les études supérieures de
leurs enfants, que ça leur coutera 15.000E ou 20.000E l’année par enfant au
début avant de finir comme aux Etats-Unis où vous mettez 10, 15 ou 20 ans à
rembourser vos études... si on laisse faire, le capitalisme se débrouillera
pour que vous passiez votre vie à rembourser ! J’invite chaque français à
regardez comment fonctionnent les choses dans les autres pays pour voir ce qui
nous attends si on ne mets pas un terme à ce processus et qu’on ne sauve pas
notre modèle.
Évidemment tous ces dysfonctionnements ne sont pas là par hasard, il joue le
jeu d’une partie minoritaire de la population (la classe dominante) qui s’est
entendu (sans forcément se concerter, juste par le jeu des intérêts bien
compris) pour mettre en place un un système de captation de la richesse
produite par le peuple, qui se l’accapare et qui n’a bien évidemment aucune
envie d’assumer ses responsabilités en rendant d’une façon ou d’une autre ce
qui reviens aux gens : elle ne veut pas payer sa juste part de impôt donc fait
de l’évasion fiscale, elle ne veut pas contribuer à la redistribution donc
cherche à détruire les mécanismes redistributif (en critiquant par exemple le
chômeur, sale profiteur) ; elle a les moyens de se payer une retraite par
capitalisation donc aimerait remplacer le modèle par répartition, elle voudrait
une sécurité sociale privée pour faire de l’argent sur le dos des gens plutôt
qu’un modèle assurantiel comme on a actuellement qui permet de soigner
l’ensemble des français (et donc vous et moi) à moindre frais sur lequel elle
ne gagne rien du tout ; elle voudrait que ce soit le peuple qui paye la facture
de la transition énergétique alors que c’est elle qui profite de la mondialisation
et de l’économie capitaliste productiviste qui a produit les dégâts
écologiques. La liste serait très longue à faire. Ce qu’il faut avoir
conscience, ces que toutes ces choses dont je parle, ne se mettent pas en place
par de grande réforme suite à une décision politique, je veux dire ça n’arrive
pas d’un coup et boom car l’opinion ne l’accepterait pas bien évidemment.
Toutes ces choses se concrétisent tout doucement, insidieusement : c’est les
quelques pourcentage qu’on va augmenter ci, c’est la désindexation qu’on va
mettre par là, c’est la petite pénalité que va vous mettre votre opérateur si
vous ne régler pas votre facture à temps, c’est la petite augmentation sur les
péages chaque année... par exemple ça commence pour l’Université avec faire
payer les étudiants étrangers : stratégiquement ils se disent que ça ne
concerne pas les français, personne ne descendra dans la rue pour ça... sauf
que dans 3 ou 5 ans on va nous expliquer que c’est injuste, pourquoi on fait
payer les inscriptions aux étudiants étrangers et pas aux français ? Et hop, on
commencera à faire payer aux étudiants français, au début ça sera symbolique et
à la fin, ça finira par devenir insupportable. Voilà ce que nous disent les
Gilet jaunes : c’est devenu insupportable pour nous, français réveillez-vous
avant que ça ne le devienne pour vous aussi, pensez à vos enfants !
Bon enfin, je ne sais pas si j’ai été très clair mais mais les Gilets jaunes
ne sont pas un groupe de gens défendant des intérêts particuliers, les Gilets jaunes
sont les porte parole du peuple, ou plutôt on pourrait dire la conscience du
peuple, si on conçoit le peuple comme entité abstraite qui ne représente pas
chacun mais qui comprend tout le monde. Ça commence par eux parce que ce sont
ceux, parmi les français, qui souffrent le plus et qui souffre les premiers de
la dominance progressive de cette super classe mondiale de gens qui possèdent
tout et veulent diriger le monde en fonction de leur propres intérêts égoïstes
sans se préoccuper de l’ensemble. Pour dire les choses autrement, il y a
derrière chaque français, derrière chaque citoyen, derrière chaque peuple du
monde un Gilet jaune. Tant que chacun aura encore les moyens de vivre avec le
fonctionnement inique des choses qui a commencé à se mettre en place depuis 30
ans, il aura de sympathie pour le mouvement ; quand il n’aura plus les moyens
parce que la classe dominante aura poussé trop loin les curseurs de l’injustice
ou de la soutenabilité, il se mettra à le soutenir le mouvement et deviendra
Gilet jaune.
En tout état de cause, il faut raisonner avec une approche systémique pour
bien comprendre. Je pense que les Gilet jaunes ne sont que le début d’un
mouvement de masse qui devrait en toute logique se généraliser progressivement
à l’échelle du monde entier, peu importe les formes qu’il prendra et les noms
qui seront donnés. Ce type de mouvement n’est que le miroir de la rupture
démocratique que met en oeuvre la classe dominante.
Je pense qu’on ne peut pas comprendre les Gilets jaunes si on cherche à les voir comme un groupe de gens qui défendent un intérêt catégoriel et envers qui il faudrait céder à des revendications. C’est un peu ce que vous faite en prenant comme postulat qu’il s’agit par exemple d’un groupe de personnes qui refuseraient l’augmentation du prix des carburants parce que ça leur coûte trop cher. C’est une grosse erreur que commet le gouvernement - volontairement s’agissant de lui - ainsi que la grande majorité des commentateurs dont beaucoup ne comprennent toujours pas. Ils ne comprennent pas parce qu’en premier lieu ils ne vivent pas du tout les mêmes réalités puis d’autre part - et il faut bien le dire -, parce qu’il y a une convergence d’intérêts entre le gouvernement, les médias et tout ceux à qui profite le fonctionnement actuel des choses, pour offrir aux français une grille de lecture du mouvement... ils font du « prêt à penser » pour dire les choses trivialement.
Offrir une grille de lecture c’est une façon de faire diversion pour qu’on ne voit pas où se situe le vrai problème et que les choses puissent continuer ainsi : « business as usual » comme on dit. Tous ces gens d’en haut ont tellement peur que le peuple se réveille, qu’une conscience collective apparaisse et qu’il mette un terme à leurs avantages injustes que chacun fait ce qu’il peut à son niveau pour endiguer le phénomène : les médias désinforment volontairement ou par omission (comme ne cesser de parler d’essoufflement puisque s’insurger contre les violences n’a pas marché), le gouvernement exploite les évènements (comme utiliser la menace terroriste suite à Strasbourg pour dire qu’il ne faut pas aller manifester), certaines figures critiques ouvertement (comme Bernard Henri Levy) mais surtout la grande majorité fait profil bas : vous entendez beaucoup de gens d’en haut se plaindre ? Vous les voyez les organisations patronales se plaindre contre les dégâts économiques des manifestations ? Les artistes qui sont si d’habitude si prompt à s’exprimer pour tout et n’importe quoi, vous en voyez beaucoup sur les plateaux télé ? Tout ceux d’en haut qui ont parfaitement compris qu’ils ont beaucoup à perdre préfèrent se taire, c’est leur intérêt... Bref, pour véritable comprendre il faut s’extraire de cette grille de lecture qui nous est imposée, sortir de ses « à priori » et chercher à voir les choses sous un autre angle comme vous le dites si bien, en prenant de la hauteur, en recoupant les propos et les comportements des uns et des autres....c’est ce que vous faite au travers de votre intervention et c’est très bien, à titre personnel je vous en remercie.
Sur le plan formel donc, les Gilets jaunes sont les personnes qui n’en pouvant tout simplement plus - parce que les choses de leur vie ne sont plus soutenables -, viennent dire stop aux dysfonctionnements de notre système, dysfonctionnements dont ils sont les premières victimes, mais pas les seules... Un dysfonctionnement de notre système, c’est par exemple le fait que Monsieur Macron ait remporté la présidentiel alors qu’objectivement, une majorité de français ne le souhaitait pas : il s’agit d’un dysfonctionnement démocratique majeur et grave dans la mesure où dans sa recherche d’efficacité (« Je vais faire ce que j’ai dit », « Droit dans mes bottes », « Garder le cap », ...), le gouvernement développe et applique des politiques réellement contraignantes dont la majorité des français ne voulait pas. Ce dysfonctionnement se démontre aussi par le fait que l’exécutif n’a pas écouté les remontés de terrain de sa majorité, qu’il a disqualifié les corps intermédiaires, qu’il est resté sourd aux appel des maires ou encore qu’il n’a pas voulu comprendre les démissions de ses ministres (Hulot, Collomb). Un autre exemple de dysfonctionnement, c’est le fait que de plus en plus d’efforts fiscaux soient demandés aux français d’en bas (classe moyenne incluse), soit directement par une hausse des impôts et des taxes, soit indirectement par les PV sur la route, les parcmètres, l’alibi de la transition énergétique, etc. alors qu’on fait toujours plus d’allégement pour les classes supérieures qui soit ne sont pas concernées par lesdites taxes, soit sont les premières à faire ce pour quoi on demande aux autres de payer. Regardez ce que représente symboliquement et économiquement, quand ils sont mis bout à bout, la suppression partielle de l’ISF, l’allègement de l’Exit taxe, l’absence continue de taxation des GAFA, l’évasion fiscale contre laquelle on ne lutte guère, le maintien du CICE pour les grandes entreprises alors ferme les établissements après avoir empoché l’argent public ou qu’elles fraudent
massivement par le biais de l’optimisation fiscale... S’agissant des individus, regardez le patrimoine de Johnny Hallyday + les manoeuvres pour échapper honteusement au droit français que sa succession houleuse a révélé - et pourtant il était loin de gérer efficacement ses affaires -. Tous font pareil voir pire aussi vous comprendrez pourquoi le peuple ne supporte plus ses élites qui a titre privé se gavent littéralement pendant que 1) ils sont complètement incompétents à gérer correctement notre pays, ils ne sont pas à la hauteur de leur rôle sociétal (vous pourrez lire mon intervention sur « Gillets jaunes : pourquoi il va falloir comprendre et agir » et 2) ils conduisent des politiques qui asservissent et paupérisent littéralement le peuple - « les classes laborieuses » comme le dit honteusement Monsieur Macron lui-même - ou bien leur permettent de se comporter de façon anti-patriotique et anti-sociale : les banques qui saignent les foyers modestes, les société d’autoroute qui s’engraissent sur le dos des français, etc.