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Commentaire de BAERTJC

sur Les recettes du père Bayrou


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BAERTJC 18 avril 2007 15:57

Votre inclinaison pour les mesures FB sont vraiment consternantes. Voir l’étude rendue par vos concurrents spécialistes de l’économie

Zoom sur la mesure fétiche de Bayrou

La mesure Bayrou, 2 emplois sans charges :

un gâchis d’argent public sans grand effet sur l’emploi.

François Bayrou a frappé le public par une mesure à grand spectacle : permettre à chaque entreprise d’embaucher 2 emplois nouveaux sans charges sociales. Sous-entendu, compris par presque tous les auditeurs : 2,5 millions d’entreprises françaises à 2 emplois, cela fait 5 millions ; le chômage est résorbé. En fait, un chiffrage de cette proposition, confirmé par l’UDF, montre qu’elle générerait au maximum 900.000 emplois supplémentaires en 5 ans mais au prix d’un gâchis d’argent public formidable : pendant le même temps, deux millions d’emplois, qui auraient été créés de toutes façons (1), bénéficieront en effet de la mesure. D’après l’UDF, environ 18.000 € d’argent public perdu par emploi créé alors qu’il est possible de créer des emplois sans dépenser d’argent et au contraire en en faisant rentrer dans les caisses du Trésor. Mais la mesure Bayrou souffre d’une autre malformation : elle ne crée pas d’entreprises, elle utilise seulement le réservoir d’emplois non pourvus par les entreprises par crainte de ne pouvoir licencier. Une fois ce réservoir épuisé, la pompe à créer des emplois s’arrête. Et elle n’utilise même pas complètement ce réservoir : d’après nos enquêtes statistiques, moins de la moitié. Nous avons besoin d’une autre politique. Il nous faut d’abord remplir le réservoir des emplois non pourvus, mais 2 millions et pas 900.000, et sans dépenser un sou d’argent public. Il nous faut simultanément créer les entreprises qui nous manquent et qui se traduisent par un retard de 5 millions d’emplois non créés dans les 20 dernières années sur les Anglais. Cette mesure Bayrou est un attrape-mouche ; espérons que les Français n’y viendront pas s’y coller.

Analyse

La réduction d’une partie des charges sociales associées à l’embauche de 2 nouveaux salariés est une façon habile de contourner les obstacles aux licenciements du Code du Travail qui sont la raison pour laquelle les entreprises françaises se retiennent d’embaucher environ 2 millions de salariés. Le calcul d’un employeur sera en effet le suivant : "si j’embauche et suis obligé de licencier mon salarié au bout de 2 ans, cela me coûtera au moins 6 mois de salaire ; plus au fur et à mesure que le temps passe. Mais si j’ai économisé sur les charges sociales (tous calculs faits, environ 20% du salaire total), en 2 ans, cela me paie à peu près le coût du licenciement. Et si le marché me le permet, je garde un salarié formé. Je ne risque donc rien à embaucher".

Les limites du nombre de création d’emplois par ce mécanisme sont assez faciles à évaluer. Les expériences étrangères, notamment danoises, et deux enquêtes statistiques menées en France par l’iFRAP ont montré que les emplois bloqués par la crainte des employeurs de ne pouvoir licencier en cas de retournement de conjoncture sont de 12% des 18 millions d’emplois marchands existants, soit environ 2 millions. Les mêmes enquêtes montrent que la mesure Bayrou toucherait seulement 45% de ce total, les autres 1,1 millions étant dans les entreprises qui seraient disposées à embaucher plus de 2 personnes si les restrictions aux licenciements du code du Travail étaient supprimées. Ce chiffre maximum de 900.000 est d’ailleurs en harmonie avec les évaluations de l’UDF qui situent l’effet de la mesure entre 87.500 et 140.000 emplois créés par an pendant 5 ans, soit au total de 437.000 à 875.000 emplois maximum.

Un énorme gâchis d’argent public.

La mesure Bayrou est un double gâchis : Il est possible de récupérer non pas 875.000 ou 900.000 emplois mais 2 millions en ayant le courage politique de faire ce que les Danois ont fait : permettre à de nouveaux embauchés de choisir entre les contrats CDD et CDI existants et ce que nous avons appelé le contrat CAPE (Contrat d’Accès au Plein Emploi), l’acceptation optionnelle par le nouvel embauché de ne pas s’opposer à un licenciement sauf pour des motifs dont la liste est à définir (harcèlement sexuel, etc. (2)). En contrepartie, le signataire du CAPE bénéficierait en cas de licenciements d’allocations chômage et de durée de couverture chômage fortement augmentées, le produit des deux étant approximativement doublé. La réduction du chômage a permis à la fois de payer ce doublement au Danemark et de renflouer les caisses chômage.

Deuxième gâchis : pour récupérer seulement au maximum 140.000 emplois par an, il faut arroser du bénéfice de la mesure chaque année environ 3 fois plus d’emplois : 400.000 emplois qui se seraient créés de toutes manières mais qui vont sauter sur l’aubaine. L’Institut de l’Entreprise a calculé et l’UDF confirme que cette mesure coûterait au total 3,3 à 4,3 milliards d’euros en année pleine, une fois déduits les rentrées de TVA, d’IS, etc. issus de ces créations d’emplois. C’est aussi mauvais comme rendement de l’argent public que la plupart des mesures prises depuis 20 ans et qui nous ont laissé avec le chômage que l’on connaît. Alors qu’il est possible de faire beaucoup mieux et ne rien coûter à l’Etat en créant des emplois. C’est ce qu’ont fait les Américains avec les sociétés dites Suchapter S. nous pouvons le faire en France avec des mesures de même inspiration comme l’ISF-emploi.

(1) : Il se crée en France tous les ans environ 500.000 emplois nouveaux, dont 350.000 dans des créations d’entreprises. En se limitant à deux emplois par entreprise et aux entreprises de moins de 50 personnes, ce sont 400.000 emplois qui se seraient de toutes façon créées qui bénéficieront de la mesure soit un effet d’aubaine touchant 2 millions de personnes en 5 ans. (2) : Ni la législation ni la jurisprudence ne sont parvenues à définir le « motif réel et sérieux » visé par les articles 122-14-3 et suivants du Code du Travail et la Cour de Cassation se perdait encore récemment en conjectures sur le sens à lui donner ; ce serait l’occasion d’en dresser une liste.


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