« dans un ordre économique internationalisé, où les petites entreprises tiennent une place importante, une fois les monopoles financiers et capitalistiques réduits en bouillie par les forces du marché »
largement illusoire, car dans la réalité vraie, les multinationales ayant atteint une certaine masse critique amasse suffisamment de pouvoir et d’influence pour favoriser de mille et une façon leur entreprise, notamment en phagocytant rapidement les entreprises innovantes et en s’opposant avec succès aux lois anti-trust ou concurrentielles (au mieux, quand elles sont prises la main au sac, elles paieront des amendes apparemment gigantesques, mais qui ne seront que pures vétilles pour elles). La seule façon qu’ont ces monstres de disparaître est de se faire dévorer par un autre monstre.
On aura ainsi, in fine, troqué des monopoles d’Etat contre des monopoles (ou, à la limite des cartels d’oligopoles) privés beaucoup plus puissants (pour lesquels les fameuses « petites entreprises » n’ont qu’un rôle de sous-traitant extrêmement dépendant) .Il n’est pas sûr que l’on y gagne, même du point de vue étriqué de la concurrence.
Je remarque qu’au sein des libéraux, on n’ose plus évoquer plus la légende dorée qui veut que le libéralisme économique apporte forcément la démocratie : le contre-exemple le plus flagrant est bien sûr la Russie, dont le développement inconsidéré du capitalisme sauvage a rapidement accompagné l’arrêt de la démocratisation initiée après la chute de l’URSS. Quant à la Chine, on fournit au régime de Pékin (communisme purement nominal, mais authentique dictature) des munitions pour survivre... Enfin, Pinochet avait mis en place un système très libéral, et la démocratisation du Chili ne doit rien à cette libéralisation, mais au mouvement de fond qui a agité toute l’Amérique du Sud. En tout cas, le découplage entre démocratie et libéralisme est manifeste, sauf à prétendre que ce manque de démocratie est du à un libéralisme ENCORE insuffisant (qui le sera toujours car il est visé un stade théorique de toute façon inatteignable) C’et un argument de la même nature que celui prisé de certains marxistes qui prétendent que le communisme a échoué parce qu’il n’aurait pas été vraiment marxiste jusqu ‘au bout.
Ainsi, sans rentrer dans des questions de morale relative à l’égalité, la théorie du libéralisme économique ainsi prôné est tout aussi idéologique (découplé des réalités) et dangereuse que ne le fut le communisme en son temps.
De manière encore plus fondamentale, tout en partageant l’essentiel de votre réflexion quant à l’Islam (et sa différence de fond notamment avec le christianisme), je n’absous pas la mondialisation actuelle. En lisant René Girard, on s’aperçoit que celle-ci favorise de manière exponentielle le mimétisme, la non-différenciation, le recours à une médiation de plus en plus interne (« modèle » envié de plus en plus proche, via la starisation de pacotille et la publicité), ce qui accroît considérablement les possibilités de violence (dans une visée éventuellement apocalyptique). Les moyens de recours seraient
• une société fondée sur l’inégalité (qui devient alors une fin en soi pour éviter l’explosion), ce que vous semblez prôner.
• le retour aux temps du religieux archaïque sacrificiel (difficile car le christianisme a révélé le christianisme l’innocence du bouc émissaire)
• le christianisme (retour à une délicate médiation externe)