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Commentaire de Courouve

sur Le drame Desproges


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Senatus populusque (Courouve) Courouve 26 août 2006 12:41

L’artiste, comme le philosophe, devrait cultiver plutôt le dégagement que l’engagement, plutôt l’aracisme que l’antiracisme.

Voir ci-dessous la cinglante répartie à Mme Strauss-Kahn.

Pierre Desproges vu par Philippe Meyer : Pierre Desproges n’aimait pas les enfants. Ni les femmes. Ni les hommes. Ni les Auvergnats. Comment aurait-il pu ? Il savait d’expérience qu’il existe des enfants avares, des femmes lâches, des hommes garces et des Auvergnats capricieux. Pierre Desproges était un être singulier. Je ne veux pas seulement dire qu’il ne ressemblait à personne, mais aussi qu’il pensait, sentait, aimait, rejetait au cas par cas. Il n’était pas antiraciste. Il était a-raciste. (Pour ceux et celles qui auraient fait leurs études sous Jack Lang, le a- de a-raciste vient de l’alpha privatif grec et signifie l’absence).« Le pluriel ne vaut rien à l’homme », chantait son cher Brassens. C’est l’une des rares choses dont Pierre était sûr, lui qui cultivait le doute et qui abominait ceux qui moulinaient des certitudes. On regrettera vivement que sa veuve et ses orphelines n’aient pas pensé, lors de l’autopsie, à faire vérifier que l’incapacité congénitale de leur seigneur et maître à penser par catégories ne venait pas d’une particularité physiologique rare, d’un gène peu répandu ou de l’excroissance de telle ou telle glande. On aurait pu tenter une greffe, réaliser une transplantation d’organe,entreprendre une manipulation génétique. L’incapacité congénitale à penser par catégories dont était atteint Desproges est, en effet, d’une rareté proportionnelle à son utilité et même à sa nécessité. Surtout ces temps-ci. Pierre Desproges particularisait. Ceux qui généralisent lui foutaient les jetons. C’est pourquoi il leur envoyait des flèches. Il en envoya une bordée à Anne Sinclair [Mme Strauss-Kahn] lorsqu’elle déclara qu’elle n’aurait pas pu aimer Ivan Levaï s’il n’avait pas été juif. Il entendait qu’Ivan Levaï puisse être ou devenir arabe, peau-rouge ou costarmoricain sans avoir à renoncer à l’amour d’Anne Sinclair. La pensée d’un monde où l’on se promènerait en fonction de son étiquette lui mettait la rate au court-bouillon. Et, comme il avait gardé de la culture limougeaude dont il était issu (la culture, pas la race) un réflexe de méfiance, il soupçonnait que, derrière la pensée par catégories, il y avait quelques manipulations qui profitaient à des profiteurs. Derrière les jeunophiles, il flairait l’avidité des marchands de marchandises. Bien avant la presse et les juges d’instruction, il avait observé parmi les amis auto-proclamés du genre humain des aigrefins ivres d’amour d’eux-mêmes, de goût de l’argent et du pouvoir. Parmi ceux-là, il avait repéré des antiracistes professionnels faisant carrière sur l’exhibition de leur belle âme. C’est qu’il avait l’œil, Pierre Desproges, et, comme je viens d’avoir l’honneur de vous le dire, un œil qui faisait le détail. Ce n’est que l’une des raisons pour lesquelles il nous manque.

"Je relisais Juifs et Français d’Harris et Sédouy1. Les auteurs demandaient à une grande journaliste très belle et pleine de talent (que ma discrétion m’interdit de nommer ici) si elle aurait épousé Ivan Levaï dans le cas où ce dernier n’eût pas appartenu comme elle à la communauté israélite. Cette dame a répondu que non, qu’elle n’aurait probablement pas pu tomber amoureuse d’un non-Juif. Je comprends aisément cette attitude qu’on pourrait un peu hâtivement taxer de racisme. Moi-même, qui suis Limousin, j’ai complètement raté mon couple parce que j’ai épousé une non-Limousine. Une Vendéenne. Les Vendéens ne sont pas des gens comme nous. Il y a le barrage des patois, fort lointains. Et puis nos coutumes divergent et divergent c’est énorme. Voilà une femme qui mange du poisson le vendredi en tailleur Chanel. Moi je mange de la viande le mardi en pantalon de coton. Il n’y a pas de compréhension possible. Nous avons notre sensibilité limousine. Nous avons bien sûr notre humour limousin qui n’appartient qu’à nous. Nous partageons entre nous une certaine angoisse de la porcelaine peu perméable aux Chouans. Il faut avoir souffert à Limoges pour comprendre."

1.Grasset, 1979

Textes de scène

’« Ah c’est dur l’élevage », disait ma grand-mère qui pratiqua volontiers sur sa descendance des méthodes de puériculture pluralistes surannées alternant les sévices corporels de type panpan-cucul et la répression hypoglycémique axée sur la privation temporaire du roudoudou. Oui c’est dur. Un jour que je scribouillais avec soin dans ce bureau tranquille d’où jaillissent tant bien que mal ces élucubrations, la plus jeune de mes deux crapulettes, qui va sur ses six ans sans lâcher sa sucette, est venue me faire une de ces visites dont elle m’honore quand elle a du temps à perdre, c’est-à-dire rarement.s’envoyer en l’air quand on a le moral en bas.

Fonds de tiroir Extrait du réquisitoire contre Toscan du Plantier. Cet enregistrement sonore sortira en novembre chez « Tôt ou Tard »

"Le rouquin est un mammifère vivipare assez voisin du blondinet. Pas trop voisin quand même, car le blondinet fuit le rouquin dont on nous dit qu’il pue, qu’il est la honte de l’espèce, le banni pestilentiel au regard faux sous un sourcil rouille. (...) Passé la cinquantaine, le rouquin risque de perdre ses cheveux, soit par un simple effet du temps qui passe, soit à la suite d’un traitement anticancéreux généralement inutile, mais toujours à la mode chez les mondains de Villejuif. Dans un cas comme dans l’autre, il serait presque impossible alors de reconnaître un rouquin d’un homme normal, n’étaient-ce les taches de rousseur que Dieu inventa au soir du Premier Jour, alors qu’il secouait ses pinceaux sans malice après avoir créé le premier crépuscule flamboyant à l’est d’Éden."


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