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Commentaire de Jean-Philippe Immarigeon

sur Oublions la repentance


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Jean-Philippe Immarigeon Jean-Philippe Immarigeon 21 mai 2007 11:15

Article et commentaires intéressants, parce qu’on met le doigt sur l’ambivalence de la repentance. Qui le fait pour qui et pour quoi ? La France ne peut pas se repentir pour une autre nation, ni les catholiques pour les protestants. Si d’autres pensées ne le font pas, c’est leur problème. La France se regarde en face, et elle se repent pour elle, et pour personne d’autre. Si d’autres nations ou d’autres cultures occultent leur histoire, tant pis pour elles après tout.

Je prends le cas paroxysmique de la livraison des 4.200 enfants juifs de Pithiviers et Beaune-la-Rolande à l’automne 1942. Lorsqu’on lit les textes rassemblés par Serge Klarsfeld pour son Mémorial notamment les témoignages des gens de la Croix Rouge française (textes illisibles tellement ils sont insupportables d’horreur, comme ce gamin qui, lorsque la porte du wagon - SNCF - se referme, murmure : « Maman, maman, qu’est-ce que je vais avoir peur... »), on se demande comment des Français, élevés à Jaurès et Hugo, ont pu faire embarquer ces gamins dans ces conditions, et surtout ce que nous referions dans un cas similaire (même si la Shoah est un moment unique, sans équivalent et non reproductible). Les Français ne peuvent se poser la question que pour leur propre histoire, pas pour les Turcs, les Cambodgiens, etc...

Plusieurs limites donc à la repentance : le désir de reconnaissance des autres n’a pas à être pris en compte, la France n’est pas psychanalyste et son histoire n’est pas un divan. Surtout il ne faut pas faire dire n’importe quoi à l’histoire de France. Elle ne s’est pas construite, contrairement à ce que l’on prétend, sur la négation, mais plutôt sur un tri sélectif : rien n’a jamais été nié des massacres de Vendée, ni de ceux de la Commune, il suffit pour cela de relire Hugo, simplement on passait rapidement sur le sujet. Ceux qui nous disent que l’histoire de France leur a refusé une identité mentent : l’épopée en Guadeloupe du colonel Delgrès, par exemple, est connue depuis toujours, et nombre d’ouvrages y ont été consacrés (à quand toutefois une promotion de Saint-Cyr à son nom).

On peut en venir à raconter n’importe quoi : je discutais ainsi récemment avec quelqu’un de l’armée de Lattre en 1944 et il prétendait que Paris avait également été libéré en premier par des Africains. Non, dis-je, la colonne Dronne était composée de Républicains espagnols, et il n’y avait pas de noirs dans les trois DB françaises, puisque les Américains avaient exigé qu’il n’y en ait pas dans l’arme blindée, à la grande protestation de Leclerc. Ca ne fait rien, me fut-il répondu, ce sont tout de même des noirs qui sont entrés les premiers dans Paris. A ce niveau de relecture de l’histoire, il n’y a plus de discussion possible.

Pour conclure, que Sarkozy ne se sente pas personnellement concerné est vrai, mais il n’y a pas de bénéfice d’inventaire pour l’histoire.


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