@ Isabelle Buot-Bouttier,
Non, non, je parlais bien de genre (puisque pour le « sexe », c’est-à-dire le côté biologique, la différence est évidente). Sans doute me suis-je mal exprimée, mais mon propos était donc bien de dire que cette différence d’expérience de vie possible (à savoir, porter un enfant 9 mois et l’accoucher voire l’allaiter) a, je le crois très sincèrement, d’importantes conséquences psychologiques et sociales que l’on ne peut nier. Il n’est pas question ici de dire « elle » est plus douce tandis qu’ « il » est plus courageux. C’est tellement caricatural !
Par contre, je crois que c’est une réalité incontournable, qui va au-delà du contexte social et culturel, que de dire qu’une femme sous pleins d’aspects (mais que l’on ne peut pas forcément mettre dans des « cases » et réduire à des traits de caractère bien marqués) est différente d’un homme (et donc pas seulement au niveau biologique). Encore une fois il ne s’agit pas de nier les différences flagrantes d’éducation entre les deux sexes. Il n’y a qu’à voir la différence des jouets proposés : aux petits garçons les jeux de construction et de guerre ; aux petites filles les poupées et autres jeux de perles, sans parler des habits avec le retour en force ridicule du rose Barbie pour les filles. Sans parler également des nombreuses affirmations que l’on entend régulièrement comme : « Ah, ben ça c’est bien une fille ! » lorsque qu’une petite fille se montre curieuse par exemple (idem pour un garçon courageux) avec une évidence de ton qui a le don de m’exaspérer. Et toute la société (que ce soit au niveau des affiches publicitaires, du langage lui-même (et là il y aurait énormément à dire entre autres sur les « le masculin l’emporte sur le féminin » que l’on a entendu toute notre enfance comme une litanie durant les cours de grammaire), etc...Tout cela a évidemment des conséquences sur le caractère, les envies et le comportement des enfants puis adultes en fonction de ce que leur renvoie leur famille et la société dans laquelle ils évoluent. Tout cela doit évidement être dénoncé par le combat féministe.
Vous écrivez : « Enfin s’il est vrai que ce sont les femmes qui portent et donnent naissance aux enfants et que des dispositions doivent être prises de manière à ce que cette période puisse se dérouler dans les meilleures conditions, cela ne justifie en rien qu’il en soit ensuite nécessairement du rôle de la femme de s’arrêter de travailler pour élever l’enfant »
Bien sûr que cela ne justifie pas une « obligation » pour la femme de s’occuper plus de ses enfants. Cependant, la réalité me montre souvent (mais il est vrai pas toujours) que ce sont les femmes (plutôt que leur conjoint) qui ont envie de faire passer un temps leur vie professionnelle en arrière plan de leur vie familiale pour privilégier l’éducation de leur enfant. Et je ne parle pas ici de femmes ayant un poste inintéressant ou sous-payé (ce qui va souvent de pair). Je parle en connaissance de cause des nombreuses femmes avec une vie professionnelle épanouissante ayant trouvé plus important de consacrer du temps à leur enfant plutôt qu’à leur travail à un moment donné de leur vie. Forcément c’est un choix de vie et il ne s’agit en aucun cas de l’imposer comme une norme (une femme n’est pas moins « femme » parce qu’elle a préféré se consacrer à sa vie professionnelle et ses enfants, si elle en a, ne seront pas plus malheureux pour autant). Par contre il me semble que le combat féministe, c’est aussi de ne pas nier cette réalité-là mais de l’accepter et de permettre aux femmes (et d’ailleurs aux hommes qui le souhaitent également) cette possibilité de privilégier l’éducation de leur enfant sur leur vie professionnelle... sans crier au scandale qu’ « on » cherche à renvoyer les femmes à la maison.
En fait, que les femmes aient plus l’envie de s’occuper de leurs enfants et le fassent différemment des hommes me semble être une réalité que l’on ne peut nier. La question qui nous « oppose » ici est bien de savoir si cette réalité actuelle trouve ses origines dans la différence physiologique ou si c’est le résultat d’une construction historique, sociale et humaine. Vous-même ainsi que E. Macé pensez que c’est uniquement un schéma résultant d’une construction sans fondement biologique. Pour ma part, je suis persuadée que ce sont bien ces deux origines (on pourrait parler de la part de l’inné et celle de l’acquis) qui déterminent la question du genre et que l’on ne peut pas la réduire à l’une d’elles. Et donc que les différences physiologiques entre les deux sexes ont des conséquences qui vont bien au-delà de la différence entre races (pour reprendre les propos de E. Macé).
Personnellement je ne crois pas que ce constat soit réducteur pour la femme (ou pour l’homme). Ce serait plutôt le contraire qui le serait : croire que l’homme et la femme sont pareils et qu’ils sont interchangeables. Encore une fois, et je me répète, il ne s’agit pas de dire que l’un(e) est « mieux » ou « supérieur » à l’autre (c’est pour cela que je n’aime pas tellement le terme de « féministe pro-femme ») mais seulement d’accepter cette différence. Je reprends donc la conclusion un peu modifiée de mon post précédent : Aujourd’hui, je crois donc qu’être féministe c’est la recherche d’une égalité entre les sexes, « avec » leurs différences et non « malgré » leurs différences ou « en niant » leurs différences.