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Commentaire de repub

sur Droit de vote en question


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repub (---.---.166.84) 3 septembre 2006 19:27

C’est fascinant la capacité de renouvellement des critiques du suffrage universel. Le plus amusant, c’est de voir des arguments passer d’un côté à l’autre du champ politique. Le vote familial, avec plus de voix aux parents de famille nombreuse, avait été un thème des conservateurs et de l’Eglise anti républicaine entre 1848 et la première moitié du XXe siècle : il est ressorti il y a quelques temps chez certains Verts allemands, sous prétexte de représenter les enfants... Le droit de vote, comme principe en soi pour le citoyen, et dégagé du lien à l’impot était une avancée majeure de la Seconde République, contre le suffrage censitaire de la monarchie Louis-Philipparde ; on voit ressortir le thème du droit de voter comme simple récompense du paiement des taxes dans un certain nombre d’argumentaires en faveur du droit de vote des étrangers aux élections locales... Maintenant, voici que l’idée que le suffrage n’est pas réservé aux « compétents » qui ont un avis « autorisé » et « informé » sur les choses (un thème largement défendu par tous les anti républicains depuis le XIXe siècle, et notamment par tous les technocrates, en France et aujourd’hui, particulièrement, dans le monde de la « construction européenne » (cf la BCE)) est à son tour attaquée. C’est ce qui ressort dans cet intéressant article de M. Crouzet, avec des arguments certes différents des Polytechniciens des groupes de réflexions élitistes des années 30 (qui finiront à Vichy, ce qui ne veut évidemment pas dire que cela aurait été le cas de notre auteur). Est-ce si difficile d’admettre le suffrage universel ? Il est amusant de voir que l’argumentation se pique de « modernité » : aujourd’hui, le suffrage universel serait « dépassé ». Curieux raisonnement, au moment même où jamais sans doute une proportion aussi importante de la population n’a les moyens et les capacités de s’informer, de se préoccuper des choses communes, d’opérer des choix sans s’en remettre à des « intermédiaires » (notables, élites, intellectuels engagés...). Bref, au moment où peut-être nous sommes le plus près (historiquement) de l’idéal républicain du citoyen raisonnable. Je comprends l’insatisfaction démocratique de l’interlocuteur devant la faiblesse de nos élites dirigeantes (ou du moins leur incapacité à répondre à la demande sociale des citoyens) et le sentiment de blocage devant l’éternel reproduction interne des partis « dits de gouvernement », mais vraiment est-ce en s’attaquant au modalité du vote, par la restriction qui plus est, que cela va s’arranger ? N’est-ce pas au contraire renforcer les « élus » dans l’idée qu’il y a une masse informe et inculte qui ne mérite que prêches et sermons (ce que la classe politique appelle le « necessaire travail de pédagogie »)et des « gens qui savent » : à savoir « eux » (lesélus) et les « demi-dupes » qui estiment être du même monde (et non membres de cette foultitude de non-internautes...). Par ailleurs, je crains pour le respect d’une loi adoptée par les seules personnes concernées et intéressées (au moment de son adoption) lorsqu’elle viendra -fatalement- à toucher les autres (les non-votants le jour X). Ils auront beau jeu de répondre qu’elle ne les concerne pas puisque votée par d’autres, et non au nom de l’ensemble de la communauté civique... C’est pénible, la démocratie ; c’est fondée sur l’illusion (sublime) du peuple souverain, participatif. Mais il n’y a pas mieux !

R.


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