En affirmant bien clairement - et bruyamment - « qu’il n’est pas un intellectuel », Sarkozy ne fait que reprendre une vielle antienne américaine de tous les candidats à la Présidence : « I’m not an egghead » (je ne suis pas une tête d’oeuf, surnom classique des intellectuels dans les classes populaires). Pour être élu aux US, il faut surtout rassurer l’éelcteur moyen, et donc marquer sa différence avec les songe-creux, les théoriciens, les stratèges en chambre, bref, tous ces cerveaux sans mains et sans pieds, qui font que rien n’avance, etc.
Cette rhétorique de l’intellectuel comme poids mort a été longtemps reprise en France par les poujadistes et poujadoïdes (dont notre inimitable Le Pen, chéri des médias), Barthes a écrit un texte très lucide à ce sujet dans Mythologies, dans les années cinquante.
Cette distanciation d’avec l’intellectuel sert à l’opposer à l’homme d’action, qui, lui, ne perd pas de temps à réfléchir, et bénéficie du coup de toutes les qualités guerrières supposées de ceux qui se « jettent dans la bataille », et donc métaphoriquement « courent à la victoire ».
Cette disctanciation de l’intellectuel est à mettre en parallèle avec sa haine factice des tabous. Avez-vous remarqué que ce gouvernement marmonne comme un mantra à chaque occasion de « réforme » (c’est-à-dire de régression) qu’il examinera la question « sans tabous », comme le bien-aimé Président, qui comme chacun sait, pourfend quotidiennement des tabous à son petit déjeuner.
En bref, si on décode (sans tabous) le discours présidentiel, on arrive à : « ne pensez pas, ne tenez rien pour acquis, et si n’êtes pas d’accord avec moi, c’est que vous êtes soit quelqu’un qui pense trop, soit quelqu’un qui est sous une emprise maléfique dont il ne se rend pas compte ».
Et il veut « rassembler » ? Bon courage, amis citoyens, débranchez votre cerveau,vous êtes arrivé à bon port...