Il est vrai que la culture prédomine dans notre rapport à l’image, à notre image. Et l’auteur à raison de rappeler que suivant les cultures, on a pas du tout les mêmes réactions. Cependant, regardez les photos d’Izis, de Doisneau, d’HCB ou de Ronis. Les gens photographiés au quotidien semblent animés de bienveillance. Certes, les photographes sus-nommés étaient de vrais génies de la photographie sur le vif, mais je crois aussi que l’époque joue un rôle non-négligeable. En ce temps-là, les images étaient plus rares, et être photographié était souvent considéré comme un honneur, ou une bonne grâce. Dans les familles, on posait pour la postérité dans ses meilleurs atours, dans le jardin, l’été lorsque la lumière s’y prêtait. Les photographies étaient livrées avec de petits bords dentellés, et les images étaient ensuite collées dans de lourds albums reliés ( voir le travail de J-H Lartigue), bon, au sein des familles bourgeoises certes, mais le petit peuple connaissait déjà le clic-clac merci Kodak et depuis les premiers congés payés, les petits appareils en bakelite faisaient partie du décor.
Aujourd’hui, les écrans sont partout, ( et cela n’est pas prêt de s’arrêter), les paparazzis traquent les stars et les anti-stars se retrouvent sur les plateaux des émissions de télé-réalité. Chacun a enfin sa part de notoriété. Mais Andy Wharhol ne l’avait-t-il pas prédit ?. La part d’ingénuité et de rêve qui est souvent le dénominateur commun des peuples innocents ou des société balbutiantes (d’après-guerre par ex) est peut-être en passe de s’évanouir. Notre société est peut-être en train de vieillir. L’image est partout mais jamais elle n’aura eu aussi mauvaise presse. Impossible désormais de faire des images dans la rue (à moins de demander bien entendu) sans encourir des regards de franche répprobation quand ce ne sont pas des insultes. Sommes-nous blasés, revenus de tout, méfiants de tout et de tous ? La notion de propriété est si pregnante dans notre société moderne, et l’individualisme si développé que nous ne saurions souffrir qu’on nous emprunte même notre image. Des propriétaires intentent des procés aux photogaphes qui ont eu l’heur de cadrer leur propriété, et certains avocats se sépcialisent dans le droit à l’image. La société se judiciarise de plus en plus et corrolaire malheureux notre patrimoine iconographique s’apauvrit chaque année davantage. Quelle image de notre société livrerons-nous à nos descendants ? ces images libres de droits qui garnissent les catalogues des agences d’illustration, photos trop bien cadrées où des mannequins au physique calibré (cadre, executive women, seniors ...) baignent dans des lumières bibliques ?
comment leur transmettrons-nous les images de la vie de quartier, de la banlieue, des zones pavillonaires, des campagnes ? les endroits où il ne se passe rien, sinon la vie ?
Que comprendront-ils de la banlieue, en voyant ces images faites trop rapidement par des photojournalistes pressés (aux deux sens du terme) en quète de spectaculaire et de sensationnel. A part certains photographes, qui s’échinent à chroniquer les « temps morts » comme dirait R.Depardon, et qui ne trouvent plus guère de journaux pour publier leurs reportages, l’image s’est considérablement apauvrie. De la gastronomie, nous sommes passés en quelques années au rêgne du fast-food.
Je sais, c’est un constat un peu amer, mais malheureusement je crois assez réaliste.
VM