Chose promise à Saint-Pierre, chose dues à tous ...
« Los Angeles Times. 30 mai 2007.
HUGO CHAVEZ CONTRE RCTV, par Bart Jones.
Le refus du président Vénézuelien, Hugo Chavez, de renouveler la licence de Radio Caracas Television pourrait justifier les craintes de voir Chavez éradiquer la liberté d’expression et éliminer les critiques.
Amnesty International, Human Rights Watch, le Comité pour la Protection des Journalistes et des membres du parlement européen, le Sénat des Etats-Unis et même le Congrès du Chili ont dénoncé la fermeture de RCTV, la plus ancienne chaîne de télévision privée du Venezuela.
Les détracteurs de Chavez ont reçu quelques arguments supplémentaires mardi lorsque le président a inclus une autre chaîne d’opposition, Globovision, parmi les « ennemis de la patrie ». Mais l’affaire de RCTV - comme la plupart des affaires concernant Chavez - s’est retrouvée prise dans une toile de désinformation. Tandis que les médias du monde entier titrent sur une partie de l’histoire, l’autre partie est à peine audible.
Le sort de RCTV est un événement quelque peu regrettable pour les Vénézueliens. Fondée en 1953, elle était une institution dans le pays, ayant produit une émission politique satirique « Radio Rochela » et le feuilleton du soir étonnement réaliste « Por Estas Calles ». C’est RCTV qui diffusa au Venezuela les premières images en direct de Neil Armstrong en train de marcher sur la lune en 1969.
Mais après l’élection de Chavez en 1998, RCTV s’est engagée dans une autre mission : renverser le président démocratiquement élu. Contrôlée par des membres de l’oligarchie fabuleusement riche du pays, dont le dirigeant de RCTV, Marcel Granier, elle considérait que Chavez et sa « Révolution Bolivarienne » en faveur de la majorité pauvre du pays représentait une menace.
L’exemple le plus célèbre de ces efforts pour renverser Chavez eut lieu pendant la tentative de coup d’état, le 11 avril 2002. Pendant les deux jours qui ont précédé le putsch, RCTV changea sa programmation et couvrait en boucle la grève générale déclenchée pour renverser Chavez. Une armée de commentateurs déversèrent sans discontinuer des attaques au vitriol contre lui - sans accorder un droit de réponse au gouvernement.
Puis RCTV diffusa en boucle des messages pour encourager les gens à participer à la marche du 11 avril visant à renverser Chavez et diffusa l’événement en intégralité. Lorsque la marche se dispersa dans la violence, RCTV et Globovision diffusèrent des films truqués pour accuser les partisans de Chavez d’être à l’origine des morts et des blessés.
Après que des rebelles militaires eurent renversé Chavez et qu’il eut disparu pendant deux jours, RCTV bascula ouvertement dans le camp de la sédition. Des milliers de partisans de Chavez manifestèrent pour exiger son retour, mais aucune information ne fut diffusée par RCTV ni par aucune autre chaîne de télévision. Le Directeur de l’information de RCTV, Andres Izarra, témoigna plus tard lors d’une audition sur le coup d’état, à l’Assemblée Nationale, qu’il avait reçu des ordres de ses supérieurs. « Rien en faveur de Chavez, rien sur lui ou ses partisans... L’idée était de créer un climat de transition et de promouvoir d’une nouvelle ère pour le pays ». Tandis que les rues de Caracas s’enflammaient de rage, RCTV diffusait des dessins animés, des feuilletons et des rediffusions comme « Pretty Woman ».
Le 13 avril 2002, Granier et d’autres barons des médias se rendirent au Palais (présidentiel) Miraflores pour jurer fidélité au tout nouveau dictateur, Pedro Carmona, qui venait d’abolir la Cour Suprême, l’Assemblée Nationale et la Constitution.
Aux Etats-Unis, une chaîne de télévision qui aurait participé à un coup d’état contre le gouvernement serait-elle autorisée à poursuivre ses activités ? Le gouvernement US aurait probablement fait fermer la chaîne cinq minutes après l’échec du coup d’état - et aurait mis ses propriétaires en prison. Le gouvernement de Chavez a laissé la chaîne poursuivre ses activités pendant cinq ans puis refusa de renouveler sa licence d’émettre par voies hertziennes. La chaîne peut toujours émettre par câble ou satellite.
Granier et les autres ne doivent pas être considérés comme des martyrs de la liberté d’expression. Les radios, télévisions et journaux ne sont pas censurés et ne font l’objet d’aucune pression ou menace de la part du gouvernement. La plupart des médias au Venezuela sont encore sous le contrôle de l’ancienne oligarchie qui est radicalement anti-Chavez.
Si Granier n’avait pas pris la décision de renverser le président du pays, les Vénézueliens auraient peut-être encore la possibilité de regarder « Radio Rochela ».
http://www.latimes.com/news/opinion/commentary/la-oe-jones30may30,1,5553603.story