Non, funram. Rien ne prouve que l’on assisterait au même phénomène avec l’espéranto qu’avec l’anglais, que l’« on souffrirait d’une grande carrence en anglais, espagnol, allemand, japonais, hougandais, malien, arabe, roumain, thaïlandais et portugais, dans les classes ». Il ne faut pas jouer les prophètes. D’abord il n’existe pas de langue nommée « hougandais », et les principales langues de l’Ouganda sont l’anglais et le kiswahili. Il y a aussi plusieurs autres langues dont le « luganda »... Mais peu importe, ça n’empêche pas de comprendre ce que vous voulez exprimer.
Il ne faut pas de longues recherches pour se rendre compte que l’anglais accapare une part énorme du temps et des efforts des élèves, des étudiants, donc du budget de l’Éducation nationale (sur lequel le contribuable a un droit de regard et de critique), et aussi de citoyens ou d’entreprises qui se sentent contraints de sacrifier du temps et de l’argent pour cette langue. Et ceci pour tous les pays du monde. Les carences que l’on observe dans la connaissance du français (sans parler des langues étrangères) à cause de la contrainte de tout sacrifier à l’anglais sont déjà énormes. L’effort sacrifié pour l’anglais est soustrait de celui qui devrait être fait pour combattre l’analphabétisme et l’illettrisme, pour améliorer l’enseignement général, l’éducation civique et j’en passe. L’effort serait considérablement réduit avec l’espéranto et, à effort égal à celui sacrifié aujourd’hui pour le seul anglais, il serait possible d’enseigner et l’espéranto et au moins une autre langue vivante (dont l’anglais, mais pas forcément). Évidemment, c’est là une chose qui paraît incroyable pour bon nombre de gens : deux langues pour le prix d’une. Et pourtant, ça n’a rien d’un tour de magie. Le prix Nobel Reinhardt Selten a récemment plaidé, devant le Parlement européen, pour l’enseignement de l’espéranto comme première langue étrangère. De son côté, Claude Hagège estime que l’anglais ne doit pas être enseigné comme première langue étrangère, et il admet que l’espéranto doit être pris en considération. À l’inverse de l’anglais, qui coupe l’envie à la majorité de ceux qui ont peiné à l’apprendre d’étudier d’autres langues, l’espéranto éveille la curiosité pour celles-ci et stimule le désir d’en apprendre d’autres, l’envie d’aller plus loin. C’est comme les préliminaires en amour Il n’a pas l’effet inihibiteur de l’anglais. Mais, sortir d’une ornière ou d’une routine n’est pas chose facile. Surtout quand certains veillent à ce que nul n’en sorte. Alors, va-t-on continuer longtemps à dilapider un effort multiforme (budgétaire, mental, etc.) sans, au moins, favoriser la poursuite de l’expérimentation une autre voie ?