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Commentaire de Reid RASTER

sur Le phénomène « nolife », la pathologie de demain ?


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Reid RASTER Reid RASTER 20 août 2007 14:05

Etant moi-même un geek (sorte d’ancêtre du nolife) vaguement socialisé, je me sens une certaine légitimité à ramener ma fraise sur ce sujet.

Première chose, de mon point de vue le nolife est parfaitement comparable à l’employé de bureau moyen : 8 heures devant un écran enfermé dans un espace climatisé éclairé au néon.

Ces gens dont on prétend qu’ils n’ont pas de vie, c’est vous et moi, avec un coup de crayon plus accentué peut être. La seule vraie différence entre un nolife et un salaryman de base, c’est que le second est payé pour rester enfermé dans son bocal et qu’il peut se donner l’impression de vivre pleinement en partant tous les ans vers une destination-spectacle dont il raménera quelques cartes postales.

En second, j’ajoute que le nolife, tout comme le geek ou le nerd, est généralement un homme, car ce sont bel et bien les hommes qui peinent le plus à trouver une partenaire de vie. Il me semble bien que les femmes soient trop courtisées de toutes parts pour se retrouver seules, ce qui est le lot de bien des types qui passent alors le temps en jouant aux jeux vidéos.

Troisième et dernière chose qu’il me semble importante de préciser : La culture geek est une contre-culture née dans les années 75-80 en réaction à la médiocrité des valeurs culturelles de l’époque. Les geek d’origine aimaient les jeux vidéos et (un peu plus tard) les mangas car ils étaient une alternative à un monde perçu comme trop stupide et/ou ennuyeux.

Je me permet de copier/coller un billet de mon blog qui détaille un peu ma pensée, c’est un peu long, mais je crois que cela peut apporter quelque chose à la discussion :

« Les vieux micro-ordinateurs et les vieilles consoles sont présentés et perçus comme étant des hobbies pour mâles puceaux extra-longue durée à pellicules. S’il est vrai qu’une petite portion de cette »communauté" sent la baskette rance, les autres sont parfaitement fréquentables. Pour bien comprendre, il faut se souvenir. Se souvenir de la France des années 70/80, de la vie des enfants et adolescents de cette époque. Pas d’Internet, trois chaînes de télé, les radios libres interdites (eh oui, c’est Mitterrand qui, en 1981, a permis à ceux qui le désirent d’émettre sur la bande FM) et j’en passe, un vrai trou. Imaginez un préado/ado qui reçoit un Commodore 64 en cadeau de Noël : C’est un micro-ordinateur assez frustre, mais programmable.

Vu que les jeux sont chers et que les jeunes n’ont pas d’argent, ils se les échangent dans les cours d’école. Des réseaux se forment, des réputations se font ; Certains cassent eux-même les protections des jeux grâce aux outils de programmation intégrés aux ordinateurs et signent leurs forfaits. Le phénomène se répend, les signatures se complexifient jusqu’à devenir de véritables petits programmes présentant un logo animé avec musique. Les jeux passent d’un pays à l’autre, les signatures qui les accompagnent suivent ; C’est ainsi que des gamins du fin fond de la Meuse voient débarquer chez eux des cassettes ou des disquettes ayant fait le tour de l’Europe, des amitiés se lient entre des enfants de différents pays.

Au bout de quelques années (vers 1990) on a une sorte de scéne composée de jeunes programmeurs, musiciens et graphistes qui créent de véritables oeuvres d’art informatique d’un genre jamais vu. Leur niveau dépasse largement celui des professionnels de l’industrie du jeu vidéo ; En somme et pour la première fois dans l’histoire de l’Humanité, les adolescents ont le contrôle sur un média de haute technologie dont ils se servent pour diffuser une pensée et des éléments culturels quasiment absents des mass-medias de l’époque. Je pense que les raisons pour lesquelles certains ont pu s’attacher aux ordinateurs sont maintenant plus claires.

Le cas des amateurs de consoles de jeu vidéo, bien que plus simple, trouve sa source dans ce même désir de s’ouvrir au monde, de sortir de son patelin et d’afficher des idées et des usages modernes. Ces appareils de haute technologie étaient de véritables bénédictions dans les petits univers d’adolescents bien souvent confinés à leur village ou à leur ville ennuyeuse.

Faites l’essai vous-même : Installez WinUAE [cliquez ici pour lire le tutoriel en Français], téléchargez une démo et faites comme si vous étiez quelque part entre 1985 et 1990, dans un monde où Gaston LAGAFF’ rencontre le succès avec son « Oh qu’il est beau qu’il est beau qu’il est beau le lavabo, qu’il est laid le bideeeeeeeet ! », où Rondo Veneziano passe pour être moderne et où le mur de Berlin est encore une (bien navrante) réalité. Vous verrez l’Amiga d’un autre oeil et vous ressentirez combien est bénite cette petite console grise qu’on appelait autrefois « la NES ».

Au pays des abrutis footophiles à mobylette kitée, micro-ordinateurs et consoles de jeu sont nos seules bouées."


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