L’une des causes du succès de la narration (désolé, je parle français), est que tout bêtement, elle ne fait pas appel à des notions abstraites : on ne parle que de personnages, d’actions, de lieux, etc., bref que du concret. Comparons par exemple la Critique de la raison pure de Kant et Jacques le Fataliste de Diderot, oeuvres contemporaines, et on comprend tout de suite la différence. Pourtant, on ne peut pas dire que le roman de Diderot soit superficiel.
Il est probable que la narration est apparue très tôt dans l’histoire de l’humanité, juste après les premiers mots exprimant des besoins primaux (boire, manger,..). Cette forme de discours est très archaïque et donc très tentante, puisque tout le monde peut la comprendre. D’ailleurs l’Iliade et l’Odyssée, âgées d’environ 3500 ans, sont encore rééditées...
C’est vrai qu’en France, « raconter des histoires » est moins prestigieux qu’agiter des abstractions. Ne dit-on pas aux enfants qui mentent : « arrête de raconter des histoires », comme si narrer et mentir (moralement dévalorisé) n’étaient qu’une seule et même chose ? En langue anglaise, la narration est appréciée depuis toujours, ce qui explique qu’en Angleterre et aux Etats-Unis, le roman et la nouvelle soient des genres littéraires très valorisés.
Je connais particulièrement bien le domaine de la science-fiction, où les productions anglaise et américaine sont prédominantes. La France, sauf depuis quelques années, peine à produire des oeuvres majeures dans ce genre. Mëme problème : en France, on valorise soit la réflexion abstraite, soit le descriptif des sentiments, mais rarement l’action. Il faut avouer qu’on continue à y opposer de façon idiote et stérile littérature et sciences.
L’exemple de la petite vietnamienne évoqué par Reagan, que vous racontez (!) est tout à fait édifiant à cet égard entre les mentalités française et européennes.
Nicolas Sarkozy entre à fond dans ce domaine de l’anecdote significative, déjà défriché par Le Pen, mais aussi par de nombreux démagogues, car l’anecdote singulière leur permet de faire passer des idées très générales par des raccourcis fallacieux (une victime, donc la peine de mort pour tous).
Dommage que sa culture personnelle ne lui ait permis d’accéder qu’aux narrations des séries télé des années 70, ce qui lui donne ce côté « Starsky et Hutch » un peu pitoyable, parfois. Et ce qui explique son amour de la justice rapide et expéditive : on bricole des lois sur le perron de l’Elysée 24 heures après un crime odieux, on se croirait dans un feuilleton U.S. où le Maire de New-Yourk annonce qu’il a été convaincu par le brillant détective (Starsky ou Hutch ? Je vous laisserai choisir...).
Je suis un grand amateur de narration, et je concluerai cette note en lui donnant un titre reprenant (en l’amendant) le vôtre : « petites digressions sur le retour de l’homme-histoire ».
25/06 18:50 - StevDang
C. Salmon mélange effectivement allègrement les gens et les genres. Pour avoir un avis (...)
23/11 16:45 - Arnaud
Pour compléter le propos de l’auteur, l’art du « storytelling » est avant tout une (...)
07/09 12:32 - Vilain petit canard
L’une des causes du succès de la narration (désolé, je parle français), est que tout (...)
04/09 23:06 - moebius
04/09 23:05 - moebius
tres bon... le storytelling c’est bien dans la culture americaine, protestante, une (...)
04/09 18:13 - Adama
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