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Commentaire de Bernard

sur Vaccination : nous avions vu juste


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Bernard 20 octobre 2007 15:04

Peut-on centrer une réflexion critique sur les vaccinations à partir du virus et de ses caractéristiques générales et en évitant de dissocier selon les maladies ? Telle est la question à laquelle certains ont répondu affirmativement ici, si j’ai bien compris leur propos. Franchement, je ne pense pas que ce soit possible. Je vais essayer de l’expliquer sans esprit de polémique.

Les maladies contre lesquelles on vaccine sont autant à bactérie qu’à virus. Deux des 3 vaccinations encore obligatoires pour les enfants sont dues à des bactéries : la diphtérie et le tétanos. Pour ce dernier, le bacille séjourne le plus souvent dans la terre, agit par sa toxine, est anaérobie et la maladie ne provoque pas d’anticorps. Autant d’éléments spécifiques à prendre en compte pour apprécier la vaccination. La coqueluche, les méningites Hib, la typhoïde et le choléra sont aussi provoqués par des bacilles.

Le bacille de Koch n’est pas une bactérie comparable aux précédentes. Il est maintenant classé dans la famille des mycobactérie depuis que les méthodes de préparation pour l’observation ont permis d’éviter de sectionner les filaments dont il est constitué alors qu’on le voyait auparavant en bâtonnets. Le BK est ainsi devenu Mycobacterium Tuberculosis. Le BCG est aussi une mycobactérie. La tuberculose comme le BCG ne provoquent pas la formation d’anticorps comme c’est le cas pour la diphtérie et la typhoïde par exemple. La tuberculose et le BCG occupent ainsi une place très à part et doivent être absolument traités de façon spécifique.

Les virus de la polio se propagent surtout par l’eau souillée par des excréments humains. Le traitement des eaux usées joue donc un rôle essentiel. L’OMS connaît de très grosses difficultés pour éliminer cette maladie dans les régions de l’Inde où l’eau souillée est la seule disponible. Peut-on éliminer la polio par la seule vaccination sans résoudre auparavant ce problème de l’eau ? La question n’a pas encore reçu de réponse positive.

Les virus de la grippe, très volatils et mutant aisément, ont des spécificités dont on a beaucoup parlé avec le H5N1. Il est évidemment indispensable d’en tenir compte. Leur comportement n’a rien à voir avec les entérovirus de la polio. Il est impossible de les traiter ensemble en avançant leurs propriétés communes.

Au contraire de la grippe (heureusement), si la variole se propage par l’air, c’est à très faible distance du malade (2 mètres en l’absence de ventilation). Cette propriété a permis une définition efficace des contacts : les personnes ayant rendu visite au malade. Après l’échec des grandes campagnes de vaccination, ce fut cette connaissance qui permis, après localisation d’un malade, de rechercher efficacement ses contacts et de les isoler avant qu’ils ne deviennent contagieux, interrompant ainsi la chaîne de transmission. Ce fut l’une des conditions essentielles de la victoire sur la variole. Mais cela ne pourrait s’appliquer à la polio par exemple où à la grippe car les contacts d’un malade sont beaucoup plus difficile à définir et à retrouver.

Les virus des gastro-entérites se propagent souvent en famille par des mains souillées par les selles alors que l’hépatite B est en particulier à transmission sexuelle et que la fièvre jaune se propage par un moustique. Sous la direction de Soper et financée par la Fondation Rockfeller, une gigantesque campagne contre les moustiques avait permis, en 1960, d’éliminer la fièvre jaune et la dengue d’Amérique du Sud et Centrale. Le refus des américains du sud de se plier aux exigences de cette lutte (visite des jardins, modification des façades des maisons..) permis au moustique de se maintenir au sud des USA et fit échouer l’entreprise. Le moustique a pu reconquérir le terrain perdu, ramenant la fièvre jaune et la dengue avec lui en Amérique du sud.

Cela me paraît clair, il n’est pas possible de se contenter de généralités communes à tous les virus pour réaliser une analyse intéressante et utile. D’ailleurs les études expertes soutenant telle ou telle vaccination le font toujours de manière spécifique. Mais c’est un travail énorme : la seule audition publique sur le seul BCG dura 2 jours pleins et l’ensemble des interventions, y compris celles faites depuis la salle, ont été compilées dans un ouvrage de 382 pages. Le rapport de la commission d’audition faisait 40 pages. Le seul rapport du HCSP sur la vaccination contre la varicelle fait 78 pages (hcsp.fr). L’ouvrage Droit, éthique et vaccination, rapport commandé par l’état, fait 434 pages. Le rapport officiel sur l’éradication de la variole en fait 140. Le calendrier vaccinal 2007 fait 16 pages. Les publications sur les vaccinations représentent un volume énorme. Elles sont toujours spécifiques de la maladie concernée, voire d’un des virus de cette maladie, comme par exemple les avis et rapport du Conseil d’hygiène publique (HCSP) ou encore ceux de l’Académie de Médecine (academie-medecine.fr). C’est pourquoi la longueur de l’enquête d’AgoraVox n’a rien d’exorbitant.

Pour faire un travail critique sans s’égarer, que faire ? Etudier patiemment cette littérature où j’ai constaté que les comparaisons statistiques jouent un rôle très important et n’ont rien à voir avec les virus. On peut y rechercher les lacunes et les erreurs de méthodes. C’est aussi un travail considérable.

Certains diront peut-être que c’est de l’antivaccinalisme que de faire une telle recherche. J’étais mathématicien et mon travail consistait, pour une très large part, à chercher les erreurs et les lacunes dans les démonstrations, et d’abord dans les miennes. Pour moi c’est tout naturel et je pense que cela peut être très utile pour faire progresser les méthodes de l’épidémiologie. Je l’ai constaté à l’audition BCG et j’ai mis des articles en ligne à ce sujet, les méthodes statistiques et mathématiques utilisées pour le BCG sont dignes du café du commerce et cela ne peut pas rester en l’état.

Il ne faut pas oublier que les principaux adversaires des vaccinations ne sont pas les antivaccinalistes mais les virus et les bactéries. Avec eux nous n’avons pas le droit de jouer.

L’antivaccinalisme est une réaction au vaccinalisme qui n’a rien à voir avec les vaccins qui sont un produit alors que le vaccinalisme est un comportement humain. On n’est jamais pour ou contre un produit mais pour ou contre un certain usage de ce produit. Mais le vaccinalisme a sacralisé le vaccin et a ainsi généré une opposition. Opposition au produit, à l’usage en vigueur ou à cette attitude abusivement zélatrice ? Pour ma part, je ne suis pas antivaccin (pourquoi être contre un produit ?) ; je pense que l’usage qui en est fait doit être repensé et devenir plus ciblé ; je pense que les pires adversaires du vaccin hépatite B en France furent ses plus grands zélateurs qui ont détruit la confiance que le public avait placé en eux.


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