FARNIENTE : "Vous parlez de mouvements de résistance aux US, de réveil citoyen.
Quel est leur impact réel, face à la détermination des Cheney, Bush et consors ?"
Impossible à savoir avec cette équipe à la Maison-Blanche, sans doute la plus dangereuse depuis la constitution des
Etats-Unis...
D’un autre côté, les mouvements de résistance se nourrissent
des quantités inédites de mensonges et de manipulations réelles et documentées produites par cette administration,
autant autour de l’engagement iraquien que du 11 septembre... Ce qui entraîne un mouvement de progression plus lent qu’une
explosion médiatique, mais aussi plus solide car fondé sur une communication interpersonnelle : les gens échangent les informations, les images, les documents, les archives dans leur réseau familial, amical, voire socio-professionnel selon les secteurs d’activités... On se passe des DVD, on en discute entre amis, même si c’est en termes parfois conflictuels de « naïveté » contre « conspiration », effet-miroir du discours médiatique dominant...
Donc c’est un vrai mouvement issu de la « base »citoyenne -du Monsieur Tout-le-monde américain- ce qui explique sa transversalité sociologique : on y trouve toutes les classes de la société US et toutes les orientations politiques...
Il faut aussi se dire que la durée de la guerre en Irak, le volume des contingents et celui des pertes produisent mécaniquement de l’opposition à l’administration qui la mène. C’est en ça que l’époque Bush a un côté « redite » de l’époque Nixon : l’administration poursuit une guerre injustifiée (fiable) et doit donc manipuler l’opinion publique pour qu’elle la « supporte », elle truque sa communication...
Mais en 71, il y a eu Ellsberg, un simple exécutant qui n’a plus supporté d’être complice, plus supporté de trahir
certaines valeurs fondamentales pas simplement inscrites dans la constitution des Etats-Unis...
Ellsberg en appelle aux gens qui font aujourd’hui pour Bush ce qu’il a fait hier pour Nixon, pour qu’ils se réveillent comme il s’est réveillé et sortent les éléments qui pourraient mettre fin à la dérive de cet exécutif... Mais je pense que la peur que génère cette administration est bien plus grande que celle qu’inspirait l’administration Nixon et l’alignement des médias US n’encourage pas non plus : personne ne sortira rien sans être sûr que ce soit repris...
Il fait aussi partie des signataires d’un appel à la désobéissance lancé aux militaires début octobre 2007, avec des gens comme Thom Hartmann, Rabbi Michael Lerner, Rabbi Steven Jacobs, Cynthia McKinney, Willie Nelson, Cindy Sheehan, Norman Solomon, Elizabeth de la Vega, Gore Vidal, Ann Wright et des dizaines d’autres...
Voici une traduction française de l’appel, ainsi que le site US où il a été lancé.
En complément à l’article, pour mieux comprendre les parallèles et les différences entre Vietman et Iraq du point de vue de Ellsberg, voici un texte qu’il a publié dans le Los Angeles Times du 29 février 2004
« I Wrote Bush’s war words — in 1965 »
J’ai écrit les mots guerriers de Bush
Aniel Ellsberg
Traduction alterinfo
L’explication donnée mardi soir par le Président Bush sur la poursuite de sa politique en Irak avait pour moi un air de déjà vu, mais sans nostalgie. J’ai déjà entendu pratiquement tous ses arguments, presque mot pour mot, dans des discours prononcées par les trois présidents que j’ai servis : John F. Kennedy, Lyndon B. Johnson et Richard M. Nixon. Sans fierté, je reconnais avoir proposé moi même certains de ces termes.
Pour préparer un discours sur la guerre du Vietnam pour le secrétaire à la Défense Robert S. McNamara en juillet 1965, j’étais chargé de la même tâche que les rédacteurs des discours de Bush en juin 2005 : comment justifier et motiver le soutien de l’opinion publique pour une guerre désespéramment sans issue et inutile dans laquelle nous avions été entraînés par les mensonges du président.
En relisant mon discours, je découvre que j’ai employé le mot « terroriste » pour désigner nos adversaires pour le même effet que celui recherché par Bush.
Tout comme les conseillers de Bush, je ressentais la nécessité de brandir une menace globale pour justifier l’ampleur de l’effort demandé. Pour cela, j’ai décidé que la Chine serait la mieux placée pour devenir notre « véritable » adversaire plutôt que le Nord Vietnam de Ho Chi Minh, tout comme Bush préfère se focaliser sur Al Qaeda plutôt que sur les nationalistes Irakiens. « Ils tentent d’ébranler notre détermination en Irak - tout comme ils ont tenté (sic) de d’ébranler notre détermination le 11 septembre 2001, » a-t-il dit.
Mon discours fût approuvé par McNamara, par McGeorge Bundy, conseiller en sécurité nationale et par le secrétaire d’Etat Dean Rusk, mais il ne fut pas prononcé parce qu’il constituait un appel à mobiliser les réservistes pour soutenir une escalade sans limites de l’intervention militaire, comme le demandaient les commandants militaires de Johnson.
Au lieu de cela, lors d’une conférence de presse, Johnson préféra mentir sur le nombre de soldats qui seraient immédiatement déployés (le double de ce qu’il annonçait), et de cacher le nombre de soldats qu’on estimait nécessaire pour remporter une victoire, à savoir au moins 500.000. (je relève que Bush dit que « nos commandants me disent qu’ils ont suffisamment de soldats pour effectuer le travail »)
Une partie du discours de Bush qui m’a particulièrement réveillé des souvenirs fut sa référence à « l’heure des mises à l’épreuve ». « Nous avons encore du travail à accomplir, et il y aura des moments difficiles au cours desquels la détermination de l’Amérique sera mise à l’épreuve, » a-t-il dit.
Ce thème me rappela un passage du discours de 1965 qui, pour des raisons qui paraîtront évidentes, je n’avais jamais décidé de reproduire auparavant. Je terminais en dressant un portrait de la Chine comme « un adversaire qui considère la politique internationale comme un vaste combat de guérilla, intimidant, tendant des guet-apens et affaiblissant ceux qui voudraient défendre un autre ordre mondial. »
« Nous sommes mis à l’épreuve, » avais-je écrit. « Avons-nous le courage et la détermination requis pour garder un cap difficile et meurtrier, le temps qu’il faudra ? Les communistes asiatiques sont convaincus que non. » Mardi, Bush dit : nos ennemis « croient que les sociétés libres sont par essence corrompues et décadentes, et qu’avec quelques coups bien placés ils peuvent nous obliger à battre en retraite. »
Ceux qui écrivent ses discours, tout comme moi, doivent ensuite aborder cette question sous l’autre angle. Face à cette mise à l’épreuve de nos ennemis, pendant combien de temps le public Américain doit-il soutenir ses soldats tandis qu’ils tuent et qu’ils meurent dans un pays étranger ? La réponse surgit dans le même style évasif qui celui qui servait tant à Kennedy, Johnson et Nixon : « le temps qu’il faudra (et pas un jour de plus). Jusqu’à la victoire. »
J’ose à peine relire ma proposition de réponse à cette question, en 1965. Une réponse qui a valu une réplique fameuse du feu Ambassadeur auprès des Nations Unies Adlai Stevenson pendant la crise des missiles à Cuba.
« Il n’y a qu’une seule réponse à donner. Et elle fut donnée, par un chef d’état américain, au coeur d’une autre crise qui a mis notre détermination à l’épreuve. Jusqu’à ce qu’il gèle en enfer. » [ ndt - en français aussi « lorsque les poules auront des dents » ].
Il n’est pas réconfortant d’entendre presque les mêmes mots dans la bouche d’un autre président 40 ans plus tard, pas plus que ces mots ne paraîtront adéquats dans quelques années à ceux qui ont rédigé ces discours. Mais les souffrance humaines qu’ils annoncent ne seront pas les leurs.
25/10 15:18 - Eloi
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25/10 13:14 - Dalziel
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