Je ne reviendrai pas sur mes récents échanges avec Carlo, mais sur le coeur du problème : la qualité de l’éditorial ne saurait se résumer à des améliorations de l’outil AgoraVox.

AV a grandi et s’il veut s’imposer comme un media crédible, et plus encore "média citoyen", il doit réellement s’inscrire dans une démarche citoyenne, et donc avec une certaine éthique, au-delà d’une plateforme d’outils mise à la disposition d’une communauté autogérée produisant un contenu hétéroclite et autorisant tous les dérapages (cf multiplication des campagnes de désinformation, des articles révisionnistes... avec la fuite de plumes de qualité vers d’autres cieux).

Comme je l’écrivais, "Une sonde lancée d’un laboratoire peut se passer de pilote, pas un A380 chargé à bloc. Pour sa survie, AV a besoin d’un véritable pilotage éditorial. Pas d’un censeur, mais d’un rédacteur en chef responsable devant le comité de rédaction, devant les lecteurs, devant les actionnaires et devant un public qui sait faire la différence entre une plateforme technique et un media citoyen". Si le terme de rédacteur en chef vous heurte, la loi et le bon sens justifient a minima l’existence d’un directeur de la publication.

Je vois bien la logique derrière la démocratisation de la modération. Par un effet Wikipedia, AgoraVox escompte un lissage par la masse. Mais l’échelle de temps n’a rien à voir entre un projet encyclopédique et un media d’actualité et une fois validé, un article AV ne fait plus l’objet de quelque forme de modération que ce soit. Les brûlots les plus sulfureux demeurent sur étagère pour l’éternité, tels ces pamphlets vichyssois dans les box des bouquinistes sur les quais parisiens.

Par ailleurs, le distingo entre analyse et factuel s’avère tout relatif : tout media est par nature subjectif, et le choix du sujet à la source, la sélection de l’article sont des actes éditoriaux.

Au final, AgoraVox refuse d’assumer son métier et ses ambitions à la fois sur l’axe media et sur l’axe citoyen. Dans "Enjeux Les Echos" il est question d’arriver à l’équilibre en 2008, et je souhaite que cela se produise au-delà des aspects financiers. J’espère sincèrement que l’ouverture de la modération ne se traduise pas par la multiplication des articles sulfureux, et je supplie à nouveau Cybion de considérer la nomination d’un directeur de la publication pour assumer sa belle mais parfois dangereuse créature.