Lipton,
En somme, je n’ai pas le droit de dire que l’anglais est extrêmement difficile sur le plan phonétique, et par d’autres aspects, mais les profs d’anglais ont le droit de répéter chaque année à mes enfants combien c’est une langue facile ? Pas un ne définit l’accent tonique, ça les obligerait à dire qu’il est mobile !
Dire que le sujet de l’espéranto n’a rien à voir avec le plurilinguisme dans une perspective européenne est incroyable, vu que c’est la seule solution crédible, autre que l’anglais lingua franca (cf. rapport Grin qui analyse toutes les options), un plurilinguisme organisé dans lequel les européens disposeraient d’une langue auxiliaire facile, histoire de se comprendre même entre gens pratiquant peu, avec aussi l’apprentissage de deux autres langues en fonction des besoins professionnels, des pays dans lesquels on séjourne, de la famille, des langues régionales, etc, ça ce serait un plurilinguisme efficace et possible. Alors que l’UE a glissé vers l’anglais pour les élites et le kitchen english pour la plèbe !
Sur l’artificialité, vieux cliché : l’espéranto est légèrement plus artificiel (la synthèse globale et quelques mots de liaison) que le français ou l’anglais, mais à peine : TOUS les mots ont autant de légitimité historique et linguistique que n’importe quel mot français, pusiqu’ils ont tous été puisés dans diverses langues, de même que le français est fait de bric et de broc, de multiples apports culturels, car les langues sont comme des mers qui se mélangent sans cesse.
Mais peut-être ferez-vous davantage confiance à des linguistes :
« Ce sont des idiomes existants qui, en se mêlant, fournissent l’étoffe [de l’espéranto]. Il ne faut pas faire les dédaigneux ; si nos yeux [...] pouvaient en un instant voir de quoi est faite la langue de Racine et de Pascal, ils apercevraient un amalgame tout pareil. [...] Il ne s’agit pas, on le comprend bien, de déposséder personne, mais d’avoir une langue auxiliaire commune, c’est-à-dire à côté et en sus du parler indigène et national, un commun truchement volontairement et unanimement accepté par toutes les nations civilisées du globe. »
(Michel BRÉAL, linguiste, XXe s.)
« La résistance contre une langue internationale a peu de logique et de psychologie pour soi. L’artificialité supposée d’une langue comme l’espéranto, ou une des langues similaires qui ont été présentées, a été absurdement exagérée, car c’est une sobre vérité qu’il n’y a pratiquement rien de ces langues qui n’ait été pris dans le stock commun de mots et de formes qui ont graduellement évolué en Europe. »
(Edward SAPIR, linguiste américain, Encyclopaedia of Social Sciences, 1950, vol. IX, p. 168)