La vraie question est celle de savoir si le Président de la République est un Monsieur-tout-le-monde ou s’il est tenu à une forme d’exemplarité comme incarnation de la Nation. A partir du moment où sa vie privée est étalée dans les journaux, alors celle-ci doit participer, elle aussi, à cette exemplarité. Si le Président n’est pas exemplaire, et si’l n’y a pas un minimum de dignité ainsi que cette ’magic that doth hedge the monarch’ comme l’écrivent les Anglais, alors comment justifier cette omniprésence et toute-puissance. ?Certainement pas les maigres 53% d’un pseudo-plébiscite, qui aurait pu basculer aussi bien de l’autre côté si son adversaire avait été plus pugnace, ou mieux entouré.
Déjà, Sarkozy a délibérément jeté aux orties sa fonction d’incarnation nationale en se comportant strictement en chef de parti. Et il ne saurait représenter tous les Français en s’affichant ostensiblement avec les seuls milliardaires tout en s’acharnant comme le moindre parvenu à arrondir son magot.
Quant à l’exemplarité de la vie privée, tout dépend de ce que l’on entend par là. Si bon goût, décence, moralité, respect de l’autre sont désormais obsolètes grâce à oplusieurs décennies de persiflage et de dérision, alors oui, Sarko peut bien incarner le Français nouveau.
Mais on peut estimer aussi qu’en amour ’le coq se montre et l’aigle se cache’. Qu’on n’a pas à infliger aux Français le spectacle désolant d’une ’Première Dame’ cocufiante et obsédée de fric (version Cecilia), ni d’une Première Dame potentielle dont les états de service consistent à coucher avec le père, débaucher le fils, se faire faire un môme par celui-ci, puis le larguer pour promener ledit pauvre môme sur les épaules de divers ’beaux-pères’ passagers. Que l’Elysée n’a pas à se confondre avec la Jet-Set apatride. Qu’on a le droit de qualifier d’immoral tel ou tel comportement, fut-il dans la vie privée.
On pourra moquer et critiquer tant qu’on veut l’enfant cachée de Mitterrand, le camion de laitier de Giscard. Plus grave, semble-t-il, était la goujaterie de Mitterrant quand il était confronté à une femme qui lui résisait. Mais est-ce plus affligeant que les proclamations pathétiques genre ’les femmes, je peux les avoir toutes’ de Sarko ? Et je verrais mal une Ségolène Royale élue qui se serait séparée d’avec Hollande pour s’afficher avec un Rocco Siffredi..
Quant à la conférence de presse, les journalistes se sont laissés moucher car ils le voulaient bien. On imagine ce que les grandes plumes de la 3ème République auraient réservé à Sarkozy. Sans parler des députés qui pourraient à longueur de temps apostropher Sarko (puisqu’il tient à s’expliquer devant eux) sur sa ’Connaissance’ ou ses ambitions (’il s’est voulu César, et n’a été que Pompée...’).