En toute honnêteté, il semble que le pape ne soit ni gaffeur, ni seulement clairvoyant. Pour avoir cotoyé d’assez près les arcanes étonnantes de la Curie, je peux vous assurer que chaque déclaration officielle, et a fortiori celle du souverain pontife, est pesée avec beaucoup de soin. En dépit du prétexte universitaire, il était évident que son intervention serait interprétée et, selon toute probabilité, déformée par les médias occidentaux aussi bien que par les réactions épidermiques des pays musulmans.
D’ailleurs il n’a échappé à personne que Benoit XVI ne s’excuse à aucun moment de son intervention. S’il s’excusait, cela accréditerait peut-être l’hypothèse de la gaffe, mais non, il est « vivement attristé »... Pensez-vous ! Il se réjouit ! Pari gagné !
Qu’on arrête également de croire à l’ignorance supposée de Benoit XVI sur l’Islam. Un des plus grands théologiens de notre temps ne saurait faire l’économie d’une réflexion approfondie sur une religion-soeur, d’autant plus dans le cadre de son poste à la tête de la congrégation pour la doctrine de la Foi.
A mon sens, il apparaît donc tout à fait clairement que l’intervention de Benoit XVI était un pari délibéré, un combat de religions plutôt que de civilisations ayant pour objectif de mettre en relief que le manque de cohésion interne à l’Islam témoigne de l’immaturité (au sens de PAS ENCORE mature) politique et sociale d’une religion à vocation totalisante.
Une preuve supplémentaire est apportée par la réaction récente d’Ahmadinedjad, qui indique respecter le Pape. Pourquoi le chef d’une théocratie aussi stricte ferait-il ce geste d’apaisement, si ce n’est pour tenter de réduire à quia la démonstration éclatante réussie par Benoit XVI quelques jours auparavant ?
Pour conclure sur une note légèrement différente, il est clair que Benoit XVI, mais cela démontre en même temps que le prosélytisme actuel de l’Eglise catholique se place sur le terrain de l’intellect, voire de la diplomatie de couloirs, dans une religion à caractère contemplatif au détriment de l’action. En cela, il fait une autre démonstration : celle du passéisme affiché de l’Eglise catholique. Je dois avouer que je n’aime pas cette idée.