Suite aux commentaires des uns et des autres je souhaite apporter quelques précisions quant à cet article, éléments que je n’avais pas souhaité développer initialement mais qui semblent finalement s’avérer importants.
Je souhaite d’abord rappeler que l’objet de cet article n’était pas les compétences des homosexuel(le)s en matière d’éducation des enfants. Comme cela a déjà été rappelé dans les commentaires, cette problématique titille davantage les conservateurs de la morale que les défenseurs du bien-être des enfants. "Irait t’on confier des enfants, sans sourcier, a des parents dont on sait qu’ils sont SM, zoophiles, echangistes, exibitionnistes ?" Et pourquoi pas ? Il me paraît déraisonnablement naïf d’imaginer que la plupart des parents biologiques sont restés cantonnés au missionnaire... pourtant les services de l’ASE ne retirent pas la garde de leurs enfants biologiques aux couples SM ou échangistes, que je sache. De ce fait on voit mal en quoi les comportements sexuels des candidats à l’adoption concernent l’ASE.
Dans la même optique, et c’était là mon propos, les critères retenus par les services de l’ASE ne garantissent en rien l’épanouissement psychosocial des enfants (j’y reviens plus bas). Dans l’absolu, si l’on considère que remplir les critères de l’ASE (de préférence un couple marié sans enfant habitant un logement spacieux, possédant des revenus importants, etc.) est nécessaire pour se voir remettre le certificat d’aptitude à élever un enfant qu’on appelle "agrément", alors il devient urgent de réclamer la mise en place d’un permis de procréer remis exclusivement aux personnes qui seraient éligibles à l’agrément afin d’éviter que des centaines de milliers d’enfants soient élevés par des personnes à qui l’on ne confierait pas, par ailleurs, l’éducation d’un orphelin. Cette idée est ridicule, probablement, mais pas davantage que celle qui consiste à décréter que telle ou telle personne est apte à élever un enfant sur d’autres critères que son casier judiciaire et un examen médical de surface. De la même manière, on justifie l’existence de ces critères discriminatoires par le fait que ce soit l’intérêt de l’enfant qui prime et non la satisfaction d’un désir des adoptants. Belle hypocrisie que celle-là : quand des individus lambda font un enfant, ce n’est certainement pas pour l’intérêt de l’enfant qu’ils le font mais bien pour satisfaire un désir personnel... alors pourquoi, lorsqu’il s’agit d’éduquer un enfant sans parent, réclame-t-on aux adoptants d’être plus héroïques que le reste du monde ? Rien ne justifie cet état de fait sinon de travailler à l’autoreproduction de modèles sociaux archaïques.
Je reviens enfin sur la pertinence de préférer confier un enfant à un couple (indépendamment du sexe des partenaires) plutôt qu’à une personne seule. L’argument selon lequel un couple est le garant d’un relai dans l’éducation de l’enfant en cas de difficultés de l’un des partenaires ne me semble pas pertinent. D’abord, dans notre société qui s’émancipe, il devient de plus en plus prétentieux d’imaginer pouvoir prédire l’avenir affectif d’une personne ou d’un couple, y compris à court terme. De façon caricaturale, il y a même de fortes chances pour qu’un enfant adopté par un couple connaisse la séparation des partenaires alors qu’il connaîtrait peut-être le bonheur de la naissance d’une relation s’il était adopté par un parent seul. Voilà qui met à mon avis du plomb dans l’aile du modèle "deux parents plutôt qu’un". Le relai peut d’ailleurs le plus souvent être pris par un membre de l’entourage socioaffectif (familial, amical) et le fait d’être célibataire ou marié ne détermine en rien la qualité du tissu social et familial qui existe autour de l’adoptant. Le nombre impressionnant de familles monoparentales dans lesquelles l’enfant se développe normalement rend également caduque cet argument de la biparentalité. Personne ne remet en doute la souffrance que peuvent éprouver les enfants au moment de la séparation de leurs parents et le manque qu’ils peuvent ressentir à l’égard du parent avec lequel ils ne vivent pas. Mais, d’une part, nous nous intéressons plutôt aux enfants adoptés pour lesquels la problématique n’est pas la même et pour lesquels le modèle monoparental n’est pas nécessairement plus dommageable que le modèle biparental (ce dernier, contrairement au premier, présentant notamment l’inconvénient majeur de la possible incohérence des informations communiquées à l’enfant). D’autre part, dans une perspective développementale, la solution optimale pour l’épanouissement des enfants n’est certainement pas de les placer au sein de cocons idéaux, aseptisés et surprotecteurs car la construction psychosociale des individus s’opère avant tout par la confrontation aux réalités de l’environnement, et ces réalités correspondent de moins en moins au modèle patriarcal judéo-chrétien. "on n’adopte pas une fratrie de 4 enfants dans 15 m² avec un smic". Eh bien non, justement, cela n’arrive pas, probablement parce que les candidats à l’adoption ne sont pas nécessairement les personnes déraisonnables pour lesquelles "on" essaie de les faire passer, raison pour laquelle ces critères-là ne devraient pas entrer en ligne de compte.