L’évaluation des performances n’est pas vraiment nouvelle. Elle a toujours été pratiquée dans les entreprises privées car elle servait et sert encore à motiver une eventuelle augmentation de salaire. Ce qui est nouveau, c’est la "codification" de ces évaluations dans cette nouvelle et grande "science humaine" qu’est le management.
Ce système n’existait pas dans la fonction publique puisque les augmentations n’étaient pas liées aux résultats personnels d’un fonctionnaire, ou,si elle existait, n’était pas utilisée pour justifier un changement du traitement
L’évaluation des performances n’est pas naturellement mauvaise. Elle permet, à un moment donné de faire le bilan de la période écoulée depuis le précédent entretien. A titre individuel, une personne peut se sentir valorisée par autre chose que l’argent.
"Bien utilisée", l’évaluation permet dans ce cas à une équipe de direction de maintenir un climat social correct parmi les salariés de l’entreprise sans que les salaires ne bougent de trop.
Ces deux points sont importants : l’individualisation et la stabilité de la masse salariale.
En individualisant l’évaluation, on isole les salariés les uns des autres. Chacun d’entre eux est seul responsable de la réalisation de ses objectifs, et ne peut pas s’appuyer sur le groupe. En isolant, on prévient les conflits sociaux de masse.
La stabilité (relative) de la masse salariale est une resultante de l’individualisation. On fixe une envellope globale qu’on répartit sur l’ensemble des salaires, et on justifie telle augmentation par telle performance. X n’a plus automatiquement le même salaire que Y, même à niveau ou ancienneté equivalents.
L’objectif de l’introduction des évaluations dans la fonction publique devient plus clair si on tient compte de ces éléments.
Une évaluation individuelle suppose des objectifs individuels et entraine une augmentation individuelle. Traité comme un individu, un fonctionnaire qui se considérera comme bien traité se désolidarisera de celui qui se sentira lésé.
Tout cela aménera, espere-t-on dans certains milieux, la fin de la fonction publique en tant que groupe, et la diminution du pouvoir des syndicats de masse.