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Commentaire de Norbert Balcon

sur Portrait robot du psychopathe


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Norbert Balcon 26 février 2008 16:54

Pour illustrer l’article, je vous recommande de vous intéresser à l’histoire de ce psychopathe, dont on n’a pas beaucoup parlé en France, Robert Hendy-Freegard. Je ne sais pas quel score il obtiendrait sur l’échelle de Hare, mais il doit monter très haut.

Un reportage en français

Sur Wikipedia (il y a des liens vers des papiers de la BBC)

Sinon, un fait divers qui a fait un peu de bruit en Espagne au mois de janvier. Je ne sais pas si le principal protagoniste serait diagnostiqué psychopathe, mais son histoire montre assez bien comment on peut se comporter lorsqu’on n’a pas d’empathie. C’est l’histoire d’un chauffard qui a tué un adolescent puis qui a assigné les parents du gamin en justice pour obtenir les frais de réparation de sa voiture :

 

En août 2004, Tomas Delgado Bartolomé[1], un Espagnol de 43 ans, renverse et tue Enaitz Iriondo, 17 ans. Le chauffard roulait à plus de 160 km/h sur une route limitée à 90. L’accident s’est produit en pleine nuit. L’adolescent, à vélo, roulait en direction de son camping. Il ne portait ni casque ni bandes réfléchissantes, obligatoires dans ce pays. Son corps a été retrouvé à 107 mètres du lieu de l’impact. Le chauffard a rapidement été relaxé. Selon lui, Enaitz avait grillé un stop et traversé la chaussée sans regarder. Les parents ont renoncé à faire appel, dans l’espoir d’oublier ce drame au plus vite. Ils ne voulaient pas non plus accabler le chauffeur : « Nous pensions que le pauvre allait vivre avec cette mort sur la conscience jusqu’à la fin de sa vie », a expliqué la mère.

Mais au mois de mars 2006, ils ont reçu un courrier les informant que Tomas Delgado Bartolomé les poursuivait en justice pour obtenir 20 000 euros de dommages et intérêts : 14 000 pour les frais de réparation de son Audi ; 6 000 pour la location d’un nouveau véhicule « nécessaire pour l’exercice quotidien de son métier ».

Cette actualité, largement diffusée, a suscité une indignation très vive dans l’opinion publique. On a reproché à cet homme d’être un « monstre », une « canaille », de n’avoir pas de conscience, pas d’âme, pas d’empathie. « Hay gente que no merece vivir », constate un internaute sur un forum de discussion. D’autres ont appelé à boycotter le commerce de ce chef d’entreprise.

« Moi aussi je suis une victime », a déclaré l’intéressé à la presse. « L’histoire du petit, on ne peut pas y remédier, mais la mienne si. » On a pu le voir dans un reportage télévisé - un homme soigné, très à l’aise devant la caméra- tenter maladroitement de s’expliquer. Sa démarche lui paraissait justifiée parce qu’ « il fallait bien que quelqu’un paye  ». « Ce n’est pas que j’aie absolument besoin de ces 20 000 euros, a-t-il concédé, mais je ne vois pas pourquoi je devrais y renoncer. »

Le journal El Correo a publié une chronique intitulée « Idiota moral », dans lequel l’auteur rapporte la réaction d’un juge au procès de Nuremberg, qui aurait dit, après avoir visionné un film tourné par les nazis dans les camps de la mort : « Maintenant, je sais ce qu’est le mal, c’est l’absence d’empathie ». Idiotie morale ou imbécilité morale : c’est ainsi que les premiers aliénistes qualifiaient les psychopathes.

Ana Maria Ortiz, une journaliste d’El Mundo[2] est allée enquêter sur cet homme. Elle a d’abord été surprise par la peur de témoigner manifestée par ses voisins. Elle n’est pas parvenue à trouver la trace de la société de celui qui s’était présenté aux médias comme « chef d’entreprise ». Son nom ne figurait pas dans les registres des chambres de commerce. On ne lui avait d’ailleurs jamais connu d’activité professionnelle bien claire. Il menait néanmoins la grande vie, possédant trois voitures, dont un 4x4, et la fameuse Audi. Pourquoi avait-il eu besoin de louer un véhicule supplémentaire ?

Sous couvert d’anonymat, des langues se sont déliées. Certains l’ont comparé à Don Vito Corleone. D’autres pensaient qu’il gagnait son argent dans les milieux de la nuit. Ces dernières années, Tomas Delgado avait été impliqué dans trois accidents de la route et avait dû s’acquitter de diverses contraventions pour excès de vitesse. Plusieurs plaintes avaient également été portées contre lui pour non respect de la réglementation sur la chasse. A l’âge de 16 ans, il avait attaqué une station service, armé d’un couteau. Cela ne l’empêchait pas, aujourd’hui, de faire son plein régulièrement dans cet établissement. Un jour, les policiers ont dû intervenir alors qu’il battait sa seconde épouse. Il n’a pas été inquiété car elle n’a pas osé porter plainte.

Au terme de deux années de procédure, Tomas Delgado Bartolomé a renoncé à sa poursuite contre les parents d’Enaitz, en se disant victime d’un lynchage médiatique.

Un juge a décidé de rouvrir le dossier de l’accident meurtrier. A l’époque, l’éthylotest avait révélé que le chauffard avait 0,15g d’alcool dans le sang, une heure et demi après le drame. Selon les parents de l’adolescent, si on l’avait fait souffler plus tôt, il aurait peut-être franchi la limite légale de 0,25g. Des experts ont par ailleurs émis des doutes sur sa version, selon laquelle le cycliste traversait la chaussée au moment où il a déboulé.


[1] Un conductor pide 20.000 euros a los padres del joven al que mató, El Pais, 25 janvier 2008.

 [2] Cronica, El Mundo, 3 février 2008

 

 

 


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