Beau portrait que celui de cet "imbécile cadre" que l’on rencontre en effet dans de nombreuses structures, qu’elles soient d’ailleurs privées ou publiques. A cette nuance près qu’il s’agit là d’un archétype, certes visible, mais rarement sous une forme ausi achevée et aussi croustillante. Cela précisé, quel bonheur d’ethnologue ou de sociologue lorsque l’on peut braquer sa loupe sur le comportement de ce brave serviteur d’une finalité qui le dépasse. C’en est même parfois fascinant.
Vous avez toutefois oublié l’une des caractéristiques de cet homo sapiens servilus : sa lâcheté. Car cet homme est le plus souvent lâche, non pas devant ses chefs qu’il sert avec zèle comme l’a montré Serge Uleski, mais devant ses propres collaborateurs. Il suffit qu’un type déterminé lui rentre dans le lard avec un minimum d’argumentation intelligente pour que, déstabilisé par l’assaut, il cède à son interlocuteur en contournant l’obstacle et en fichant une paix royale à son contradicteur. Mieux : il est possible qu’il gratifie ce subordonné récalcitrant d’un avancement pour le remercier de n’avoir pas poussé trop avant la contestation de son autorité. Et le plus remarquable réside dans le comportement des collègues du contestataire : malgré l’exemple de la rébellion réussie, l’écrasante majorité continue de courber l’échine devant celui qu’elle considère pourtant comme un imbécile. Et c’est ainsi qu’Allah est grand, comme disait Vialatte, et que les classes populaires se font manger la laine sur le dos !