Dénoncer l’impérialisme chinois, c’est bien. Lui opposer comme alternative obligée le bouddhisme dégénéré de l’ex-monarque du Tibet, c’est aberrant. D’autant plus qu’en ce qui concerne le droit des Tibétains à l’autodétermination, il y a longtemps qu’il a lâché l’affaire, le dalaï-lama.
La résistance tibétaine a bel et bien lutté les armes à la main jusqu’en 1974. Un détail de l’Histoire que « Sa Sainteté » voudrait faire oublier car il ne cadre pas avec son image new look d’apôtre de la non-violence.
Ça n’est pas la première fois qu’il renie les mouvements d’indépendance tibétains. En 1959, après avoir violemment dénoncé l’accord en 17 points, il se voyait déjà à la tête d’un Grand Tibet réunifié, incluant même des régions disputées pendant des siècles entre Mongols, Chinois, Tibétains... Comme la région du Qinghan où il est né. En gros, partout où il y avait des Tibétains, c’était le Tibet.
Comme ça n’a pas marché, il s’est rabattu sur une théorie de l’autonomie modérée, tout en s’opposant officiellement à la résistance armée dont il n’ignorait rien (c’est un de ses frères ainés qui assurait le contact entre la CIA et le chef de la résistance, Gompo Tashi. Prière de vérifier avant de me traiter de taupe de Pékin. . C’est lui qui a demandé à la résistance de déposer les armes en 1974, tout comme il l’avait déjà fait en 1956 (mais là il était encore à Lhassa et il trouvait Mao très sympathique).
Et je ne parle même pas de sa guerre des sectes : d’abord avec le précédent karmapa, puis avec les dévôts de Dorje Shugden, une divinité très importante de la Gelugpa dont il essaie de se débarrasser. Voilà 12 ans qu’il accuse les adorateurs de Dorje Shugden de former une secte néfaste, après en avoir été un lui-même, tout comme le 10e panchen-lama, ainsi que l’oracle qui lui aurait permis de fuir en Inde, en 1959 ! Il a interdit le culte de Shugden dans les monastères en 1996, ce qui n’est pas allé sans remous. Cela va complètement à l’encontre de la liberté de culte qu’il ne cesse de proclamer, mais ce n’est pas la moindre de ses contradictions.
Il va sans dire que le gouvernement chinois a sauté sur la perche que le dalaï-lama leur a tendue, en encourageant le culte de Shugden pour semer la division parmi les moines. Bien évidemment, la rumeur d’une « secte Shugden » collaborationniste est reprise par les médias occidentaux, il ne peut y avoir qu’un seul bouddhisme au Tibet et c’est celui du ci-devant dalaï-lama, seule voix autorisée de l’indépendance tibétaine. Pauvres Tibétains, ils ne sont pas tirés d’affaire.