Le communisme n’a de sens et d’efficience, il me semble, qu’au sein d’une société restreinte, bien définie et délimitée, dont tous les éléments ont accepté les règles volontairement et préalablement (monastère, kibboutz...). Imposé, son effet le plus puissant sur l’individu est la déresponsabilisation et l’étouffement des talents. Et le marxisme, qui rêve de voir s’étendre le collectivisme à la société humaine entière, est une utopie. Et une utopie, en politique, pour le dire franchement, est une charlatanerie.
Mais l’élément le plus critiquable et le plus dangereux de la gauche en général, à mes yeux, est un certain mensonge : le fait de baser une approche systématique (et dès lors forcément étatique) de la société sur une réaction à la supposée nuisance inhérente à l’absence de ce système, sans jamais démontrer honnêtement ladite nuisance.
Pour prévenir la déviance, certes inévitable, de certains, l’esprit de gauche veut imposer des règles à la communauté entière, sans voir qu’il crée ainsi l’objet même du désir des pires des déviants. L’exemple typique est sans doute la création d’un système de prise en charge social surdimensionné, censé éviter les injustices ; mais ledit système, dès la disette venue, va ployer sous les déficits et profiter dès lors surtout à ceux qui s’en feront une spécialité, soit en s’installant confortablement dans ses rouages administratifs, soit en en devenant un bénéficiaire sans nécessité impérieuse. En chemin, on aura créé un État surpuissant, l’outil même dont rêve tout dictateur. C’est ainsi que l’utopie marxiste mène systématiquement au despotisme. Ou, dans le meilleur des cas, à l’obésité étatique.
Il y a là au fond une sorte de lâcheté, ou d’irresponsabilité, de refus de prendre en charge personnellement la déviance, de confier sa gestion à quelque organe, tout en la stigmatisant dans quelque épouvantail. Je dirais que c’est au fond la peur de la liberté. La peur de soi-même. C’est humain et compréhensible. Cela doit être pris en compte, mais cela ne doit jamais devenir la règle.
La gauche, c’est un peu comme le sel. Socialiste minoritaire, elle raffine le goût des bonnes recettes. Mais comme aliment, comme communisme, elle est mortelle.