Plainte pour génocide : trois moines tibétains entendus par un juge espagnol
AFP 19.05.08 | 15h13
Trois moines tibétains ont été entendus comme témoins lundi en Espagne par un juge instruisant une plainte pour génocide contre le peuple tibétain, visant notamment l’ancien président Jiang Zemin et l’ex-Premier ministre chinois Li Peng, a rapporté une correspondante de l’AFP.
Le juge madrilène Ismael Moreno a entendu pour la première fois Palden Gyatso, Janpel Monlam et Bhagdro, trois moines exilés qui ont tous effectué des peines de prison en Chine pour "activités contre-révolutionnaires" au Tibet.
Le magistrat de l’Audience nationale instruit depuis juin 2006 une plainte pour "génocide, crimes contre l’humanité, torture et terrorisme contre le peuple tibétain", déposée par une ONG, Comité de soutien au Tibet (Cat), et la Fondation Maison du Tibet, dirigée par le moine exilé Thubten Wangchen.
Outre Jiang Zemin et Li Peng, cette plainte vise cinq présumés responsables chinois de la répression au Tibet dans les années 1980-90.
La justice espagnole a accepté d’instruire cette plainte en raison de la compétence universelle qu’elle s’est reconnue en 2005 en matière de génocide et de crimes contre l’Humanité, au motif que "le principe de juridiction universelle prime sur l’existence ou non d’intérêts nationaux".
Les trois moines se sont déclarés satisfaits à la sortie de leur audition, expliquant aux journalistes avoir pu décrire les "souffrances des Tibétains" et les vexations et tortures dont ils affirment avoir été victimes pendant leur détention.
"Le Tibet est soumis à la dictature de la Chine", a dénoncé Thubten Wangchen qui accompagnait les trois moines à leur audition.
"Notre souhait est que s’instaure un dialogue entre le dalaï lama et (le président chinois) Hu Jintao, a-t-il ajouté, appelant l’ONU à "ne pas se taire" face à la répression chinoise au Tibet.
L’avocat des trois moines tibétains s’est plaint pour sa part que le juge n’ait pas laissé ses clients s’exprimer sur tous les sujets qu’ils souhaitaient aborder. Il a annoncé qu’il réclamerait une nouvelle audition.
Depuis le début de son instruction, le juge de l’Audience nationale a envoyé des commissions rogatoires à Londres et au Canada pour interroger des victimes et témoins des faits dénoncés par la plainte.
L’Audience nationale a reconnu le 12 mai dernier n’avoir pas les "moyens suffisants" pour enquêter sur les génocides et crimes contre l’humanité commis dans d’autres pays quand il n’y avait pas de victimes espagnoles.
Ce tribunal instruit actuellement plusieurs affaires pour "génocide", notamment au Guatemala, en Argentine, au Rwanda.
Source : Le Monde