Les éditeurs disent qu’il est impossible de passer à côté d’un génie. C’est oublié que Proust a été publié à compte d’auteur. Cependant, vous le voyez vous-même puisque vous en avez écrit les chiffres, comment est-ce possible de vendre substantiellement son " œuvre " quand il y a 23 000 nouveautés en littérature pour une seule année sans compter les rééditions, les classiques ? Il arrive aussi des exceptions dont fait partie Anna Gavalda publiée par l’Arpenteur (qui je crois dépend de Gallimard) qui est passée au travers du tamis du copinage. Il y a eu aussi La conjuration des imbéciles parce la mère de John kennedy Toole s’est battue pour la publication de son livre. Dans ce débat pour être moins absolutiste il faut noter que plus de 90 % des textes de ceux qui veulent écrire sont des autobiographies, et la plupart du temps c’est assez peu intéressant et ou assez mal écrit. Il existe du reste une bibliothèque dont j’ai oublié le nom qui réserve une place à tous les manuscrits de France et de Navarre (je ne parle pas du dépôt légal) et ceci amène à parler de ces grandes escroqueries des publications à compte d’auteur dont certains éditeurs en sont les champions. Vous leur envoyez un texte et vous avez par retour de courrier un contrat et un texte très flatteur de la qualité de votre prose et de l’intérêt de l’intrigue. J’en parle, non parce que j’y aurais été confronté directement, mais parce qu’un jour maman m’avait rapporté un de ses livres qu’avait écrit et payé de sa poche le mari de la femme de salle de la cantine de l’entreprise où ma mère travaillait. Cette jeune femme, assez fière des talents de son mari (je le dis sans ironie) avait espéré que la bibliothèque de l’établissement en achèterait un. Elle avait joint à sa demande la lettre des éditeurs que j’ai lue. Le livre que j’ai lu également de bout en bout était dynamité de fautes de français, de fautes d’orthographe, de fautes de grammaire qu’ils n’avaient même pas pris la peine de corriger. Et ni l’histoire, ni le style n’avait grand intérêt, le style était pire que l’histoire car à la fin de tout on finit par s’attacher un peu quand il y a un fil conducteur si futile fut-il. Ceci est à comparer aux execrcies de style et de vacuité tels que la petite gorgée de bière qui est d’une platitude à mourir et qui fait s’émerveiller les intellectuels. Il est vrai que le nom, la filiation, les relations comptent. Ce fut le cas aussi de l’ex-mai d’une amie issu d’une famille à particule et reconnue, qui avait envoyé son manuscrit à un nombre certain d’éditeurs. Aucune réponse ne fut jamais favorable. Aucune. Il fut introduit auprès d’un éditeur, qui avait refusé son texte, qui l’acceptât en 48 heures. Je le tiens de sa bouche-même. Il fut donc publié chez Albin Michel et eut droit à un succès non négligeable, pas suffisant pour le faire vivre. Lorsqu’il s’en est étonné auprès de cet éditeur, celui lu répondit qu’ils n’avaient pas le temps de lire. Mais ce premier succès ne lui permet pas de se faire publier comme il le souhaite.
La réalité, du moins ce que j’en crois, c’est qu’il y a des obstacles et de mauvaises réponses. La mauvaise réponse et le turn over des éditeurs qui remplacent le travail dans la durée (laisser le temps à un livre de se développer) par la quantité d’édition car les coûts de typographie et d’impression ont baissé ce qui leur permet en faisant supporter aux libraires une part du coût, d’attirer les lecteurs par la nouveauté. Le second écueil est évidement la quantité de titres. 23 000 c’est hallucinant, alors imaginez s’il y a un 200 000 auteurs ! Il n’y a pas de place, et cela ce n’est pas la faute des éditeurs. Et enfin c’est le marketing et les places qui sont prises par les plus médiocres des personnes connues. Dans cette rareté de places une bonne partie est squattée justement par les coquins et les copains, ce qui n’empêche que parmi les écrivains connus et les personnalités il y a des personnes de qualité, mais par exemple en politique quand je vois que Joffrin, directeur de Libération, nous fait coup sur coup deux ouvrages, l’un contre Sarkozy dont la qualité littéraire est particulièrement médiocre (et Dieu sait si Sarkozy est un de mes ennemis politiques majeurs) et dont les idées développées sont aussi assez particulièrement médiocres, sert de sparring partner à Delanoe dans un ouvrage d’entretien ce qui prouve que Delanoé n’a pas la capacité à écrire lui-même et que ce Joffrin prend là la place d’un autre journaliste qui, de par sa position, serait sans aucun doute mieux placé pour servir de faire valoir. Rambaud aussi a écrit, comme il est de l’académie Goncourt, cela passe et pourtant ce n’est pas terrible non plus. Il bénéfice de la vague Sarkozy, de son nom et d’une couverture de presse complaisante.
Mais dans tout cela, j’ai retenu une leçon de John Cowper Powys qui était un amoureux fou des livres et qui y puisait toute son énergie. Il répondait à ceux qui critiquaient ce que l’on appelait à cette époque la littérature à l’eau de rose (Harlequin aujourd’hui) que du moment que ces livres qu’orgueilleusement je traitais de médiocres, avaient sa place et toute sa place puisqu’ils jouaient leur rôle d’apporter à leur lecture une émotion qui pour lui était la source de la vie. Et c’est ce qui fait la différence entre ceux qui aiment lire et ceux qui aiment " la littérature " cette dernière doit avoir le sceau d’une certaine intelligentsia pour être considérée et cette intelligentsia n’est pas uniforme elle a elle aussi ses cours. Et si on aime lire cela ne veut pas dire que l’on n’aime pas la " littérature ", mais que l’on n’est pas sensible aux coteries et que l’on peut aimer des livres qui paraissent infantiles, ou mièvres aux savants de la place.
01/06 19:24 - Baltar
Bravo pour l’article et bravo à tous ceux qui persévèrent et, heureuses nouvelles (...)
01/06 19:03 - Baltar
Votre ironie "Les éditeurs disent qu’il est impossible de passer à côté d’un (...)
28/05 15:47 - novisad
@armand Oui bien sur et tant mieux que le genre se soit elargi aux ...thrillers et a (...)
28/05 15:26 - armand
novisad : Pas faux. Mais il faut savoir que le polar est désormais une forme qui regroupe des (...)
28/05 13:10 - novisad
Maintenant puisqu’on parle de polar ,je crois qu’il faut replacer les choses dans (...)
28/05 11:46 - GT
Bonjour, Cette analyse est plaisante et c’est tellement ça, certains commentaires (...)
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