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Commentaire de armand

sur Turquie : vers l'interdiction du parti au pouvoir ?


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armand armand 28 mai 2008 09:51

Bon, je me risque...

Günaydin, Gül ve Cem...

Esayons de recentrer sur le sujet.

La plupart des observateurs qui n’ont jamais séjourné en Turquie ignorent tout de la complexité de la situation. Ils pourraient s’instruire en ouvrant un des nombreux et excellents romans d’Orhan Pamuk, ils pourraient aussi s’interroger sur les raisons qui font qu’une journaliste et romancière féministe comme Elif Safak (malheureusement non traduit en France) n’est absolument pas hostile au gouvernement AKP.

En fait, l’AKP regroupe plusieurs tendances. D’accord, en premier lieu, les gens lui sont redevables d’une situation économique améliorée, d’une inflation réduite. En cela, l’AKP est soutenu par la principale organisation patronale ainsi que par l’ensemble des commerçants.

L’AKP représente, en effet, des conservateurs religieux. Il peut y en avoir des extrémistes, comme partout, mais surtout, il brasse les pauvres, bénéficiaires de son noyautage au plus près de la population, et les classes moyennes, libérales en matière économique, conservatrices en matière de moeurs.

Culturellement, l’AKP permet la synthèse entre le passé ottoman et la modernité kémaliste. Comme je l’ai écrit ailleurs, dresser un pays contre son propre passé, présenté comme obscurantiste et ringard, et n’encenser que le moderne, en provenance d’Occident, a permis sans doute à la Turquie de ne pas sombrer dans les années 1920. Mais ce laïcisme à son prix - un comportement schizoïde envers le passé ottoman, et l’adhésion à un curieux nationalisme qui brasse les Hittites, les migrations turques d’Asie Centrale, le modernisme kémaliste.

Résultat : à l’heure actuelle, c’est l’AKP, qui assume volontiers mais sans excès ce passé ottoman plutôt ’universaliste’, qui offre les meilleurs chances de réconciliation avec les Kurdes, d’accord sur Chypre,alors que les partis prétendument de gauche laïque ont fait de la surenchère nationaliste et xénophobe au cours des dernières élections.

De plus, on notera la qualité de ses dirigeants. Erdogan et Gül sont très différents, l’un plutôt sportif et populiste, l’autre plutot intellectuel et universitaire. Mais tous deux sont reconnus et appréciés sur la scène internationale. Erdogan, en particulier, entretient les meilleurs rapports au monde avec son homologue grec - ce qui n’est pas négligeable - et ses activités en faveur d’un accord Syrie-Israël offrent sans doute une des meilleurs chances de paix au Proche Orient. Leur exclusion de la scène politique turque serait, à coup sûr, catastrophique.

Je ne suis pas, par définition, un thuriféraire de l’AKP. Mes séjours en Turquie m’onf fait rencontrer de nombreuses personnes, sincères, qui vouent ce parti aux gémonies. Et même la définition que l’AKP donne de lui-même - un parti plus proche des républicains U.S. que des chrétiens-démocrates européens, peut inquiéter... Même si le bellicisme bushien n’a pas d’équivalent chez les dirigeants de l’AKP. Mais la solution avancée par les adversaires de l’AKP conduiraient, de leur propre aveu, à bafouer le suffrage universel. D’ailleurs, ils ne s’en cachent pas, et affirment bien souvent que les culs-terreux de l’Anatolie profonde ou des bidonvilles n’ont pas la culture nécessaire pour voter.

Argument difficilement recevable dans une démocratie...


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