Si elles étaient établies, la réalité et la viabilité d’un libéralisme de gauche aussi authentiquement libéral que de gauche contribuerait assurément à dédroitiser et recentrer une tradition libérale au champ élargi et à la dynamique revivifiée.
En tête de leurs conditions théoriques de possibilité figure l’existence d’une gauche dont l’engagement anti-totalitaire serait également anti-collectiviste. Qui ne se fourvoie pas dans l’illusion syncrétique d’une « troisième voie » entre capitalisme et socialisme, ne s’en tienne pas à la dimension politique du libéralisme pour oser en finir avec les excès de l’interventionnisme assistanciel, redistributif et ultra-réglementariste de l’Etat providence – et adhère sans restriction aux principes individualistes de responsabilité individuelle, de liberté contractuelle et de respect du droit de propriété.
Sur la base du paradigme libéral, le libéralisme de gauche illustrerait alors la possibilité intellectuelle d’en déduire des conséquences et applications pratiques autres que celles du libéralisme de pur laissez-faire. Son pari : dans la ligne des idées d’un Karl Popper suggérant dès 1958 de « réduire ce qui semble tant faire question dans l’Etat welfare : la bureaucratisation et la mise en tutelle de l’individu » (En quoi croit l’Occident ?), parvenir à concilier l’éradication des principes et effets pervers de l’Etat providence avec l’exigence d’accompagner le libre marché de dispositifs qui en suppriment la brutalité et la clôture pour les moins bien lotis. Il s’agirait de « rendre tout un chacun capable de prendre ses responsabilités et de faire preuve d’initiative pour affirmer sa compétence sur le marché au lieu de se comporter comme un « raté » et de recourir à l’assistance de l’Etat », pour reprendre les termes d’Habermas dans Après l’Etat-nation. Cet étrange narrateur théorique existe-t-il ? Certes, et qui plus est, il ne date pas d’aujourd’hui. A la question « le libéralisme de gauche, combien de divisions ? », il faut même de plus répondre qu’elle ne sont pas intellectuellement insignifiantes puisqu’au sein de la tradition libérale classique, il ne fut pas rare de voir des penseurs à précocement témoigner d’une incontestable sensibilité « de gauche ». A la fin de ses Droits de l’homme, Thomas Paine fut parmi les tous premiers à se soucier de protéger les droits des plus déshérités. Tocqueville, lui, dénonça les aspects aliénants de la division du travail et préconisa d’aider les prolétaires à se constituer une épargne. Et Stuart Mill, dès les dernières pages de De la liberté et plus encore en divers écrits parus peu avant qu’il ne disparaisse s’employa à rendre certaines des critiques et propositions socialistes compatibles avec la logique d’un libéralisme pour tous.
A ces premiers libéraux de gauche en ont succédé d’autres au Xxe siècle, en rangs relativement fournis. En France, il faut compter avec le leader radical Yves Guyot (rédacteur en chef du très laissez-fairiste Journal des Economistes…), ou Alain, partisan éclairé d’un libre marché à l’accès démocratisé, et d’une certains façon Raymond Aron, qui a toujours défendu le bien-fondé d’une correction des inégalités sociales par l’action de l’Etat. Dans l’aire anglo-saxonne, Isaïah Berlin et Karl Popper n’ont cessé d’allier leur anti-collectivisme à de vives critiques à l’encontre des injustices entraînées par un laissez-faire intégral. En Allemagne, les thèses « ordo-libérales » de W. Röpke (… membre de la Mont-Pèlerin Society) exposées en particulier dans Une économie humaine : le cadre social du marché libre furent toutes entières orientées vers l’édification d’une économie sociale de marché. A ce recensement qui ne saurait être exhaustif, il faudrait entre autres ajouter les noms d’Ortega Y Gasset, et, en Italie, ceux de Luigi Einaudi et de Norberto Bobbio : preuve, s’il en fallait, qu’à l’instar du libéralisme en général, le libéralisme de gauche est non seulement une réalité « vivante », mais aussi l’œuvre d’un concert européen des nations.
Extrait du blog de Copeau
08/06 19:47 - Le péripate
Si elles étaient établies, la réalité et la viabilité d’un libéralisme de gauche aussi (...)
07/06 17:13 - genev.tabouis
Désolé de contredire votre analyse, mais il me semble que vos deux axes sont fortement (...)
06/06 11:16 - chmoll
si j’fais une comparaison des socialos, avec une recette de cuisine ça s’rait une (...)
06/06 10:12 - JoëlP
Est-ce que lerma après avoir posée sa crotte après chaque note revient sur les lieux de sa (...)
05/06 20:38 - JL
Communisme : protection des personnes et interventionnisme économique (Utopie) Fascisme (...)
05/06 20:31 - mikaboom
Le parti national socialiste était le successeur du parti ouvrier allemand. En outre, je vous (...)
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